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« La crise Covid a minoré la place du travail et le poids du collectif au profit des intérêts individuels » (Serge Perrot, professeur des universités)

ISRH | Conditions de travail | publié le : 08.02.2023 | Olivier Hielle

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Photo d'illustration.

Crédit photo Eric Audras / AltoPress / PhotoAlto via AFP

Si la crise sanitaire a eu, sans aucun doute, un effet sur le rapport au travail des salariés, l'individualisation des relations de travail peut être, assez paradoxalement en apparence, un sujet de négociation collective.

Finie pour toujours, la pause-café ? Dans les colonnes du dernier numéro de Liaisons Sociales Magazine, Serge Perrot, professeur des universités à Paris Dauphine-PSL, directeur du master conception et innovation en management s’inquiète de l’effritement des logiques collectives au travail. Coauteur d’une étude de l’Observatoire de l’engagement qui démontre le phénomène de débordement individualiste, il affirme que « la crise Covid a minoré la place du travail et le poids du collectif au profit des intérêts individuels ».

Il faut dire que cette crise sanitaire a fortement cassé les logiques collectives. Pendant de longs mois, de nombreux salariés, quel que soit leur niveau hiérarchique, se sont retrouvés seuls, chez eux, face à leur ordinateur professionnel. Lors de la deuxième vague, en décembre 2021, et alors que le monde du travail concerné peine à se remettre de plusieurs mois d’affilée de télétravail forcé, le collectif subit un nouveau coup dur : le nouveau protocole applicable dans les entreprises invite à suspendre les « moments de convivialité ».

Corrélation troublante, c’est aussi à l’issue de cette longue période de travail solitaire, ou presque, qu’une majorité de salariés voit le travail comme une contrainte. Dans une enquête menée par l’Ifop, publiée en octobre dernier, l’évolution de l’attitude des salariés vis-à-vis du travail laisse pantois. Ils sont désormais 45 % à indiquer que la rémunération, élément individualiste s’il en est, est leur principale motivation. Les salariés qui estiment que le travail est le moyen principal d’épanouissement sont désormais minoritaires (46 %). Première consolation, bien maigre celle-ci : la tendance vers une logique plus individualiste semble dater de bien avant la crise sanitaire.

Autre consolation, qui peut sembler paradoxale : l’accroissement des intérêts individuels au travail donne naissance à des accords collectifs plus ambitieux. C’est notamment le cas chez Secafi, agence de conseil des instances représentatives du personnel. « Les collectifs de travail ont aussi souffert du confinement et pâtissent encore de la distanciation physique. Il y a donc un sujet sur l’animation distancielle des collectifs à mettre en œuvre par les entreprises », expliquait, dès septembre 2020, Christelle Maintenant, responsable de mission santé et sécurité au travail.

Finalement, la minoration du poids du collectif ne trouve-t-elle pas sa cause dans la difficulté des entreprises à trouver des solutions pour maintenir ses salariés engagés ? La crise Covid peut avoir bon dos...

Auteur

  • Olivier Hielle