Alors qu'une négociation interprofessionnelle sur le télétravail va s'ouvrir le 3 novembre, Christelle Maintenant, responsable de mission santé et sécurité au travail chez Secafi, constate que les accords négociés post-confinement ont tendance à se montrer plus ambitieux que les précédents.
Alors qu'une négociation interprofessionnelle sur le télétravail va s'ouvrir le 3 novembre, Christelle Maintenant, responsable de mission santé et sécurité au travail chez Secafi, constate que les accords négociés post-confinement ont tendance à se montrer plus ambitieux que les précédents.
Notez-vous une différence entre les accords sur le télétravail signés avant le confinement et ceux négociés après ?
Christelle Maintenant: Oui. Selon notre étude*, les accords signés avant le confinement étaient peu nombreux et relativement frileux : le nombre de jours de télétravail négocié s’élevait en moyenne à 1,6 pour les accords à portée « hebdomadaire » et à 3,5 par mois pour ceux qui calculaient le temps de télétravail sur le semestre ou sur l’année. Depuis le déconfinement, on constate chez nos clients une forte volonté de contractualiser sur ce sujet ! Cette tendance montre que les entreprises qui ont goûté au télétravail n’ont pas forcément envie de revenir en arrière. Elles ont pris conscience que le télétravail pouvait représenter une source d’économies en matière immobilière, mais aussi de consommables, d’énergie ou de matériel. Et malgré l’anxiété générée par la pandémie ou les difficultés liées à la garde des enfants, les salariés ont fait la part des choses entre la pratique du télétravail et les circonstances exceptionnelles que nous vivions. Ils sont donc aussi très demandeurs : 80% veulent prolonger le télétravail. En conséquence, les accords renégociés ont tendance à se montrer plus ambitieux avec des demandes portant sur deux ou trois jours de télétravail hebdomadaires, mais aussi une éligibilité plus large, notamment pour les salariés en temps partiel.
Que demandent les salariés à l’entreprise pour mieux télétravailler ?
C.M.: Le besoin d’accompagnement dans le travail (autonomie d’organisation, meilleure évaluation de la charge de travail, amélioration du management à distance) fait partie des demandes récurrentes des salariés. Les collectifs de travail ont aussi souffert du confinement et pâtissent encore de la distanciation physique. Il y a donc un sujet sur l’animation distancielle des collectifs à mettre en œuvre par les entreprises. Sont également citées les problématiques de santé ou de matériel. La première demande des salariés en télétravail est l’obtention d’un fauteuil ergonomique. Vient ensuite l’ordinateur à écran large ou le second écran pour des raisons similaires.
Les entreprises sauront-elles redonner à leurs salariés sous forme de compensation ce qu’elles économiseront grâce au télétravail ?
C.M.: Nos enquêtes rendent compte d’une grande disparité de l’indemnisation des salariés en télétravail. Dans les accords signés avant la pandémie, on a pu constater des disparités de barèmes pouvant s’étendre de 3 euros à 80 euros par mois ou des indemnités journalières variant de 2,5 à 10 euros par jour ! Il s’agit cependant là d’indemnités valables pour un télétravail établi pour un à un jour et demi par semaine. Celles valables pour des séances de travail à domicile de trois ou quatre jours seront sans doute plus élevées, car il faudra bien tenir compte des autres frais imputables au salarié : électricité, chauffage, nourriture, consommables. Les partenaires sociaux qui négocieront des accords savent qu’ils devront prendre ces éléments en compte sinon les salariés risquent de s’estimer lésés. De même, il faudra également réfléchir à une ou des modalités de compensation pour les salariés dont l’emploi n’est pas « télétravaillable » et qui pourraient se sentir victimes d’une certaine forme de discrimination.
* « Quelle dynamique de négociation pour l'encadrement collectif du télétravail ? » Newsletter Centre Etudes & Prospective du Groupe Alpha - Juin 2020 - N°37