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VAE inversée : « créer l’expérience qui suscitera les acquis »

Formation | publié le : 31.05.2023 | Benjamin d'Alguerre

David Rivoire, expert VAE

David Rivoire, expert VAE

Crédit photo DR

Le décret donnant le coup d’envoi d’une première expérimentation de trois ans sur la « VAE inversée » est paru cette semaine. Le ministère du Travail annonce vouloir intégrer 5 000 personnes au dispositif durant ce laps de temps avec l’objectif de définir les contours d’une nouvelle méthode d’acquisition et de reconnaissance des compétences. Explications avec David Rivoire, expert VAE et coauteur du rapport1 donnant naissance au dispositif.

Comment va fonctionner ce nouveau dispositif de développement des compétences ?

David Rivoire : L’idée générale de cette « VAE inversée » consiste à prendre le contrepied de la VAE traditionnelle. Alors que dans une démarche classique de validation des acquis de l’expérience, le candidat fait le bilan de ses expériences passées pour les transformer en diplôme, il s’agit ici de créer l’expérience qui suscitera ces acquis ! Le terme de « VAE inversée » subsiste, mais il vaudrait mieux parler en réalité d’un dispositif de « formation en situation de travail diplômante », qui mixe Fest2 et VAE. Ce dispositif a été imaginé après le constat qu’en matière de créations de compétences subsistaient encore de nombreux trous dans la raquette. Notamment parce que la formation, qu’elle soit initiale ou continue, partait toujours d’un enseignement théorique complété par une mise en situation de travail. Désormais, l’inverse est possible, ce qui ouvre la voie vers une vraie multimodalité de la formation qui n’existe pas vraiment aujourd’hui.

Pourquoi avoir associé ce dispositif au contrat de professionnalisation ?

D. R. : Il fallait un véhicule contractuel pour porter la VAE inversée et le contrat de pro paraissait opportun. Sauf qu’ici, le candidat ne divisera pas son temps entre enseignements théoriques en centre de formation et situation de travail : il sera à 100 % dans l’entreprise, car la colonne vertébrale de l’expérimentation, c’est l’expérience qui valide la personne. Tout ce qui est demandé à l’entreprise d’accueil, c’est de laisser du temps à disposition du salarié en VAE inversée et de le faire bénéficier d’un accompagnement extérieur.

Ce dispositif sera-t-il éligible aux financements Opco ?

D. R. : Oui, comme pour le contrat de professionnalisation classique. Sauf qu’ici, la part de la prise en charge destinée à financer le centre de formation sera dévolue à l’accompagnement. 

Cette offre d’accompagnement existe-t-elle sur le marché ?

D. R. : Oui. Les cabinets d’expertise en VAE, les centres de bilan de compétences et certains organismes de formation savent faire tout cela. Ce qui va changer par rapport à l’avant, c’est qu’il faudra désormais oublier la dimension collective de l’accompagnement pour créer des parcours sur-mesure. Il en va de même pour les financeurs et les acteurs de l’alternance. Hier, le contrat de professionnalisation était envisagé comme un dispositif collectif qui va devoir céder la place à une démarche individuelle.

Pensez-vous que les entreprises joueront le jeu ?

D. R. : C’est tout le sujet. Aujourd’hui, nombre d’employeurs sont rattrapés par un principe de réalité : ils ne trouvent pas de candidats pour occuper les postes à pourvoir, faute de compétences appropriées disponibles sur le marché. Dans ces conditions, beaucoup n’auront pas le choix : soit les entreprises prennent le temps de former elles-mêmes leurs futurs salariés à partir de ce dispositif, soit de toute façon elles ne disposeront pas de la main-d’œuvre nécessaire pour répondre aux commandes de leurs clients. Évidemment, les secteurs en tension (hôtels-cafés-restaurants, métiers du care et du soin, etc.) sont les premiers concernés, mais toute entreprise, quel que soit son secteur, pourra s’emparer de ce dispositif si elle en ressent le besoin.

Quels textes réglementaires sont attendus maintenant que le décret est paru ?
D. R. :
Nous attendons encore un arrêté qui définira le cahier des charges du dispositif. Ensuite, il pourra se déployer.

 

(1) De la VAE 2002 à la REVA 2020 : libérer la VAE. Reconnaître l'expérience tout au long de la vie, de Claire Khecha, Yanic Soubien et David Rivoire. Mars 2022.

(2) Formation en situation de travail.

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Auteur

  • Benjamin d'Alguerre