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Le bloc-notes

Le social en campagne

Le bloc-notes | publié le : 01.03.2002 | Bernard Brunhes

Voyez loin, mesdames et messieurs les candidats !

Qu'il soit de droite ou de gauche, le prochain gouvernement assouplira les 35 heures. Il s'attaquera au problème des retraites : la droite et la gauche se différencient plus par le dosage et par la méthode que par le contenu des mesures à prendre. La législation du travail a besoin d'un lifting généralisé : experts de droite et de gauche en sont d'accord. Sur la santé et l'assurance maladie, si les passions retombent, on ne voit pas quel fossé pourrait séparer les positions des deux camps. Dans tous ces domaines les réformes à venir dépendent peu des couleurs politiques tant sont fortes les contraintes ; ce n'est qu'une question de position des curseurs.

Mais c'est d'une élection présidentielle que nous parlons, donc de grands choix, de grandes orientations, pas de projets pour un gouvernement du quotidien.

Qu'on nous épargne donc les recettes pour l'emploi qui ont déjà montré leur faible efficacité, mais que l'on parle des choix fondamentaux : la formation tout au long de la vie, base de l'employabilité durable, les inégalités dans l'accès à l'emploi et la volonté d'y remédier. Qu'on s'attaque à l'éducation nationale, pour qu'elle prenne mieux en compte les besoins du marché du travail, sans perdre son âme. En matière de santé, qu'on nous parle de la révolution biotechnologique et génétique qui changera la condition humaine. Qu'on nous dise comment les inégalités devant la santé pourront être traitées.

On attend des candidats qu'ils regardent avec franchise les conséquences de la démographie : il nous faudra travailler plus longtemps et non pas moins; la place des personnes âgées appelle une nouvelle politique de solidarité entre les générations; des cohortes très nombreuses de fonctionnaires vont partir à la retraite dans les dix ans. Va-t-on en profiter pour alléger l'État ?

Notre pays est devenu aujourd'hui une nation pluriethnique. Qui osera tracer les voies par lesquelles les différentes communautés ethniques apprendront à vivre et à travailler ensemble ? Il faut sortir du débat devenu théorique entre intégration républicaine et communautarisme pour inventer un nouveau « modèle français ».

J'arrête là ce début d'inventaire. Les débats de la campagne abordent certes ces questions, mais trop souvent en subliminal : nous, citoyens, ne nous contentons pas du Journal télévisé ou des scoops soigneusement lâchés par les chargés de communication des candidats, qui passent en général à côté de ces grands problèmes.

Geneviève de Gaulle-Anthonioz

Ce 15 février, France Info annonce la mort de Mme de Gaulle-Anthonioz, la grève des toubibs ainsi que des manifestations, à Orly et à Roissy, d'une corporation mécontente de sa RTT. Les médecins et cette corporation finiront par obtenir ce qu'ils veulent. Les millions de pauvres auxquels Mme de Gaulle-Anthonioz a consacré sa vie n'ont pas la même chance. Question : comment les pouvoirs publics, mais aussi les acteurs économiques et sociaux, les associations en tout genre peuvent-ils répondre aux appels de ATD Quart Monde, d'Emmaüs et d'autres ? Les gouvernements ont donné leur réponse, avec notamment le RMI et la CMU. Mais c'est la société dans son ensemble qui doit se rappeler que la pauvreté devient encore plus scandaleuse et insupportable lorsque le pays s'enrichit. Parlons-en puisque nous sommes en campagne électorale, en nous rappelant que, dans un monde dit civilisé où la violence – notamment urbaine – ne cesse de s'aggraver (dira-t-on assez que ce n'est en rien une spécificité française ?), la désespérance des marginalisés en est un catalyseur.

Reparlons de refondation sociale

C'est la mi-temps. Patronat et syndicats ont rentré leurs armes, en attendant la fin de ce printemps électoral. Mais le prochain gouvernement ne devra pas tarder à prendre position. Que souhaiter ?

Que l'on se décide enfin à redonner toute sa force à la négociation collective par un renforcement des syndicats, qui dépend des syndicats eux-mêmes mais aussi de la loi (critères de représentativité, etc.), par la possibilité offerte aux petites entreprises de négocier avec les élus lorsqu'il n'y a pas de syndicat, et par une révision de la hiérarchie des normes.

Que l'on ne tarde pas à redéfinir les fonctions des caisses de Sécurité sociale par rapport à l'État et à leur donner, dans un cadre bien défini, une responsabilité sans ambiguïté, qui permettra le retour des organisations patronales dans leurs conseils. Plus largement, que l'on se penche sur le mode de gouvernance des systèmes de protection sociale qui ont si mal vieilli, mais en préservant, voire en renforçant le rôle des partenaires sociaux. Ceux-ci ont pris l'initiative de la refondation sociale. Tant mieux. Au gouvernement à venir de s'inscrire dans cette logique.

Auteur

  • Bernard Brunhes