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De la qualité du bilan de compétences dépendra son avenir

Enquête | publié le : 27.06.2006 | L. G.

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De la qualité du bilan de compétences dépendra son avenir

Crédit photo L. G.

Après vingt ans d'existence, le bilan de compétences a trouvé sa place, notamment auprès des demandeurs d'emploi. Dans ce succès, le rôle des CIBC a beaucoup compté. Mais l'avenir du bilan devra passer par la preuve de sa qualité.

Le bilan de compétences a-t-il fini par s'imposer ? Le 27 avril dernier, la Fédération nationale des centres interinstitutionnels de bilans de compétences (FNCIBC), qui fêtait les 20 ans du bilan de compétences, s'est posé cette question. Assurément, le bilan connaît une part de succès. Selon Anne-Marie Bjornson-Angen, de Synthec, « le BC est aujourd'hui fortement portée par les branches, c'est un point central dans l'accord formation de la branche, dans la lignée de l'ANI et de la réforme ». Yannick Monsnereau, aujourd'hui à la RH de France 5, mais venue de la DGEFP, témoigne que, dans son entreprise, « le BC est porté par la DRH et connu et réclamé par les salariés, ce en quoi il a réussi ».

150 000 bilans par an

L'ANPE réalise 150 000 bilans de compétences approfondis par an, comptabilise Jean-Marie Marx, directeur général adjoint de l'Agence, « mais on a eu tendance à sous-estimer l'utilité de cet outil. C'est un tort, car le taux d'entrées dans l'emploi des chômeurs ayant suivi un bilan est supérieur de l'ordre de 5 points au taux de ceux qui n'en n'ont pas fait. Surtout, la récurrence du chômage est beaucoup moins importante après un bilan : elle est en baisse de 25 points, ce qui est énorme ! » Pour Pierre Nieul, directeur général adjoint de l'Unedic, « la définition paritaire de la mission de protection sociale vis-à-vis du chômage, c'est non seulement de l'indemnisation, mais aussi l'accompagnement personnalisé vers le retour à l'emploi. C'est pourquoi la nouvelle convention Unedic de 2001 a créé le bilan de compétences approfondi. Les erreurs de recherche et de positionnement en début de recherche d'emploi sont extrêmement coûteuses, c'est l'intérêt de tous que ce positionnement soit bien fait ».

Un rôle central

Le rôle des CIBC dans ce succès a notamment été pointé par Sylvie Bousier, de la mission politique de formation et de qualification à la DGEFP : « Les CIBC ne représentent que 10 % des 1 000 prestataires de bilans de compétences, mais 60 % des parts de marché ! Ce réseau a donc porté et mis en oeuvre le bilan de compétences avec trois valeurs fondamentales : sens du service public, éthique professionnelle et aide aux personnes. Aujourd'hui, l'orientation professionnelle et le bilan de compétences sont le fondement essentiel de notre construction sociale. Les partenaires sociaux reconnaissent cette nécessité. »

Michel Swieton, conseiller technique en charge de la formation professionnelle au cabinet de Gérard Larcher, confirme l'intérêt du rôle des CIBC, et affirme que « le ministère est très attaché au bilan de compétences. Et, dans le cadre du travail lancé avec les régions pour une organisation géographique optimale de la VAE, les CIBC ont un rôle à jouer en tant que point relais conseil, le ministère compte beaucoup là-dessus ».

Portage politique et qualité

L'avenir du bilan de compétences reste cependant encore à construire, et dépend de son portage politique et de sa qualité. En effet, estime Jean-Francois Nallet, de l'Afpa, « le bilan de compétences est un outil fondamental, mais à la condition qu'il reste plastique, qu'il s'adapte. Le champ des possibles, aujourd'hui, est encore plus encourageant et riche qu'il y a vingt ans ». Une analyse partagée par Michel Aberlen, de la DGEFP : « Les années 1990 ont témoigné d'une symbiose politique sur le bilan de compétences, une nouvelle histoire s'ouvre ».

Françoise Amat, secrétaire générale du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie, confirme l'importance du portage politique de l'Etat, des partenaires sociaux et des conseils régionaux : « Si le portage est fort, le bilan de compétences a de belles perspectives devant lui, alors qu'il était en avance sur son temps ».

Le rôle de l'entreprise dans ce portage n'est pas négligeable. Michel Bouffard, directeur du développement des ressources intérimaires Manpower, affirme même que « l'entreprise aussi est un élément porteur du bilan de compétences ; il doit être intégré dans la gestion de carrière et, pour cela, il doit être banalisé par l'entreprise et valorisé. Dans notre branche, il est très précieux et très utile, car les personnes ont une vision plus claire de ce qu'elles veulent faire et se vendent mieux ».

Si Dominique de Calan, délégué général adjoint de l'UIMM, partage cette analyse, il lui apporte un autre angle de vue. Il pense, en effet, que, « au bout de ces vingt ans de bilan de compétences, nous sommes à l'aube d'une profonde modification de la demande de bilan, de l'offre et de l'importance de l'enjeu. Tout d'abord, le prestataire devra savoir que les futures personnes en bilan de compétences auront eu, au cours de leur carrière professionnelle, des entretiens annuels nés de la réforme. Il devra en tenir compte ».

Bilan «seniors»

« Par ailleurs, ajoute-t-il, les plus de 45-50 ans et, surtout, les plus de 55 ans ont beaucoup de réticences à changer de métier. Mais si on leur propose de changer de métier dans le cadre d'un cumul emploi-retraite choisi, alors cela nous amène, nous, la métallurgie, à avoir la responsabilité de ce type de bilan de compétences «senior» pour 200 000 à 300 000 personnes par an.

Les partenaires sociaux insistent sur la qualité

Clairement, les partenaires sociaux, présents lors de la journée du 27 avril, reconnaissent l'intérêt du bilan de compétences : « Il a une double dimension, individuelle et collective, dont on ne peut que se féliciter », affirme Régis Regnault (CGT). « Si nous considérons que c'est un outil qui permet de favoriser la mobilité, alors, il faut le reconnaître, l'améliorer, le vulgariser, car c'est un important outil d'anticipation », déclare Gérard Lenoir (CFDT). « Attention, on veut faire porter au bilan de compétences la responsabilité de l'emploi et de l'avenir professionnel du salarié ! Il faut banaliser ce bilan pour qu'il fasse partie du parcours professionnel, et qu'il devienne un acte naturel. Mais il faut éviter la situation : «ça va mal, donc tu fais un bilan» », ajoute Sophie Simonpoli (CFE-CGC).

Les syndicats pointent aussi les enjeux de la qualité de la prestation. « Le label CIBC est nécessaire, car un bilan de compétences doit se faire dans de bonnes conditions. De même, il faut éviter de faire un bilan de compétences uniquement quand le salarié est en situation difficile », pense Jean-Pierre Therry (CFTC). « Il faut faire vivre la labellisation en cours et mettre, au service de tous, les acquis des CIBC. Ces derniers doivent s'ouvrir à d'autres partenariats, et notamment sur les chantiers tenant à la réindustrialisation », analyse Yves Derail (CGT-FO). « Il faut poursuivre les travaux de labellisation et de professionnalisation des prestataires et des conseillers, et améliorer leurs connaissances sur l'organisation des entreprises », conclut Bernard Falck, directeur de l'éducation et de la formation au Medef.

Paroles de partis politiques

Intéressante initiative, la FNCIBC a également invité des représentants de partis politiques à s'exprimer sur l'avenir du bilan de compétences.

Selon Maryse Arditi, des Verts, vice-présidente du conseil régional Languedoc-Roussillon, « VAE et bilan de compétences auront totalement partie liée dans les deux-trois ans qui viennent, et de manière indissoluble ».

Selon Arlette Grosskost, députée UMP du Haut-Rhin, viceprésidente du conseil régional d'Alsace et secrétaire nationale UMP, « le bilan de compétences est un bel outil qui a fait ses preuves. L'important est d'accompagner l'individu et non de protéger le poste. Il faut échanger sécurité contre souplesse ».

Pour Francis Vercamer, député-maire UDF de Hem (59), « le bilan de compétences doit entrer dans une démarche de qualité dans les entreprises. Il doit être normé et labellisé, afin de produire un meilleur accompagnement. Il faut affirmer la neutralité du conseiller face à l'inquiétude du salarié ».

Mais, pour Huong Ngoc-Liem, délégué national à l'économie au PS, « le bilan de compétences, c'est bien. Mais pas suffisant, en moyens comme en dimensions, pour répondre à l'ensemble de la problématique du chômage de masse ».

Auteur

  • L. G.