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Des tableaux de bord sociaux pour une gestion individualisée

Demain | Aller plus loin avec | publié le : 26.04.2005 | Sandrine Franchet

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Des tableaux de bord sociaux pour une gestion individualisée

Crédit photo Sandrine Franchet

D'ici à trois ou cinq ans, les tableaux de bord sociaux offriront, en un outil unique, une vue d'ensemble des principaux indicateurs RH de l'entreprise, et des zooms par process et par équipe. Combinés aux dossiers des salariés, ils ouvriront la voie à une gestion véritablement personnalisée des parcours et des compétences.

E & C : Quels sont, selon vous, les principaux objectifs des tableaux de bord sociaux ?

Bernard Martory : Les tableaux de bord sociaux ne sont, finalement, que des cadrans pour accompagner le pilotage RH. Leur objectif premier est d'aider les équipes RH à venir en appui aux managers. Par exemple, il s'agit de leur permettre de mieux mesurer et de combattre l'absentéisme, afin d'en réduire les coûts. Les tableaux de bord accompagnent également la mise en place de nouveaux processus RH : après s'être portée sur les frais de personnel, la demande actuelle est de professionnaliser et de rendre plus performant le processus de recrutement. Pour mesurer l'efficacité du service rendu par l'équipe de recrutement aux opérationnels, deux indicateurs s'avèrent indispensables : le délai de recrutement, qui sépare la demande exprimée par l'opérationnel et la fin de la période d'essai du candidat retenu, ainsi que le maintien dans l'emploi des nouveaux recrutés. Les tableaux permettent, en outre, d'évaluer le coût du recrutement.

E & C : Comment imaginez-vous l'évolution de ces tableaux de bord sociaux dans les cinq années à venir ?

B. M. : Le tableau de bord RH du futur ressemblera au tableau de bord de l'Airbus : le DRH ou le patron d'une entreprise disposera, en temps réel, d'un outil de pilotage unique, comprenant l'ensemble des données relatives aux effectifs et aux compétences, et permettant des zooms sur les indicateurs relatifs à un site, à une équipe, et même à un individu. Cet outil offrira la possibilité d'aller du plus général au particulier, c'està-dire vers une gestion individuelle des salariés, grâce à l'alimentation de répertoires des compétences, actualisés à l'issue de chaque formation. Ces tableaux de bord permettront aussi bien de décentraliser l'information auprès des managers locaux, qui disposeront, par exemple, des chiffres sur l'absentéisme de leur équipe, que de faire un reporting plus synthétique à l'attention de la direction générale, et de transmettre des indicateurs plus financiers au contrôle de gestion. Actuellement, ce type de tableau de bord est techniquement faisable et certaines offres de produits logiciels s'en rapprochent. Leur application dans les entreprises reste toutefois très rare.

E & C : Quels sont les autres avantages apportés par les technologies de l'information ?

B. M. : Elles permettent, notamment, à l'utilisateur de consacrer moins de temps à la construction et à l'alimentation de l'outil, et davantage à son utilisation. L'idéal serait d'arriver à un ratio de 10 % du temps pour l'outil et de 90 % pour l'interprétation des données et le pilotage, contre 50/50 aujourd'hui (quand ce n'est pas 70/30). Actuellement, il n'existe pas de tableau de bord RH standard, nous sommes obligés de construire des outils spécifiques, ce qui peut prendre de nombreuses semaines. Il s'agit, entre autres, de quantifier les critères qualitatifs, relatifs, en particulier, aux compétences : parmi les indicateurs possibles, on peut choisir de chiffrer le pourcentage de personnel polycompétent sur les métiers clés de l'entreprise, ou s'intéresser à la formation, en ne se limitant pas au montant dépensé ou au nombre d'actions, mais, par exemple, en suivant le nombre de collaborateurs dans les métiers stratégiques qui n'ont pas suivi de formation au cours des cinq dernières années.

Les nouveaux outils génèrent, en outre, des alertes automatiques. Par exemple, si seulement 70 % des entretiens annuels d'évaluation ont été réalisés au mois de novembre. Mais, attention : il ne s'agit pas de passer en mode «pilotage automatique». En effet, si un pilote a besoin de tableaux de bord, ceux-ci ont aussi besoin d'un pilote.

E & C : Des tableaux de bord de plus en plus sophistiqués pourraient-ils aller jusqu'à permettre de quantifier la valeur créée par la fonction RH ?

B. M. : Le contrôle de gestion sociale permet de comparer l'avantage/coût d'un type de formation ou de contrat par rapport à un autre. Pour autant, je ne crois pas qu'une véritable mesure du retour sur investissement (ROI) des actions RH soit du domaine du possible. L'appréciation du ROI d'un projet industriel est déjà extrêmement difficile et suppose toute une série de bémols, alors, parler du ROI d'un projet de formation me paraît illusoire. Dans un premier temps, j'aurais tendance à conseiller aux DRH de progresser sur l'identification des compétences de leurs salariés. Encore aujourd'hui, deux entreprises sur trois n'inscrivent pas dans les dossiers de leur personnel les formations suivies !

E & C : Quels facteurs pourraient inciter les DRH à progresser en matière de reporting social ?

B. M. : Tout d'abord, la demande des directions, qui ont besoin d'anticiper davantage les mouvements de personnel et les dépenses qui y sont liées. Mais aussi les obligations légales. D'ores et déjà, nous avons assisté à deux «poussées» en matière de tableaux de bord sociaux : l'une liée aux normes IFRS, qui obligent les financiers à se tourner vers les RH pour l'évaluation du passif social de l'entreprise, et une autre, due à la montée de la notion de développement durable, qui suppose d'approfondir les informations relatives aux effectifs.

Intégrale de l'oeuvre de Primo Levi, éditions Robert Laffont, collection Bouquins, Paris, 2005.

Méthodes et pratiques de la performance, de Philippe Lorino, éditions d'Organisation, Paris, 2003.

parcours

Docteur en sciences économiques et professeur agrégé de sciences de gestion, Bernard Martory a toujours partagé son temps entre l'enseignement et le conseil. Il s'est peu à peu spécialisé dans le contrôle de gestion sociale.

Il est actuellement professeur en GRH à l'université de Nice-Sophia-Antipolis, et conseille des entreprises sur la mise en place de tableaux de bord sociaux et le pilotage social.

Il est l'auteur de Tableaux de bord sociaux (éditions Liaisons, collection Entreprise & Carrières, Paris, 2004, 276 pages).

Auteur

  • Sandrine Franchet