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Enquête

Lutter contre le manque de qualification

Enquête | publié le : 07.12.2004 | Marie-Pierre Vega

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Lutter contre le manque de qualification

Crédit photo Marie-Pierre Vega

Une centaine de groupements d'employeurs, pour la plupart monosectoriels, ont une vocation spécifique d'insertion par la qualification. Leur credo : remédier à la pénurie de personnel en mettant en oeuvre des parcours de formation.

C'est le plus gros des Geiq français : 330 entreprises adhérentes, qui se partagent une centaine de salariés. Le Geiq BTP Pays de Savoie est né en 1998. Ses parents sont les deux fédérations BTP de Savoie et de Haute-Savoie. Leur objectif : remédier à la pénurie de main-d'oeuvre dans le bâtiment. « La démarche est classique et représentative des Geiq : des entreprises d'un même territoire et relevant du même secteur d'activité sont confrontées à un problème d'emploi. Leur fédération les aide à monter une réponse collective et structurelle : le Geiq », résume Benoît Allègre, directeur du Geiq BTP Pays de Savoie.

Métiers en tension

Depuis plus de dix ans, le réseau des Geiq essaime en France. Son pari est de répondre aux problèmes de recrutement des entreprises en misant sur les personnes en difficulté, disposées à décrocher un premier niveau de qualification. « Les Geiq naissent dans les métiers en tension, confirme Arnaud Fahri, secrétaire général du Comité national de coordination et d'évaluation des Geiq (CNCE). Ils sont nés dans le bâtiment, un secteur dont relève un tiers de Geiq aujourd'hui, puis se sont développés dans la propreté, le transport, et désormais dans l'hôtellerie-restauration, la logistique et l'agroalimentaire. »

Vieillissement de la population active

Autre problématique à l'origine des Geiq : le vieillissement de la population active. Ainsi, dans la propreté, « la profession prévoit 15 000 départs à la retraite d'ici à 2006. D'où le succès de la formule. On compte déjà 13 Geiq propreté en France », souligne Turkia Ouchaou, directrice du Geiq Propreté Ile-de-France.

Comme dans un GE, le contrat de travail - jusqu'à présent, des contrats en alternance, désormais remplacés par le contrat de professionnalisation - est porté par le groupement, qui met le salarié à disposition de l'entreprise adhérente. Ce dernier effectue aussi toutes les démarches pour trouver ou monter une formation et gère également l'accompagnement social du bénéficiaire.

Ingénierie sociale

« Les adhérents trouvent dans le Geiq une réponse que l'intérim n'est pas en mesure de leur donner. Nos structures offrent des compétences en termes d'ingénierie sociale et d'ingénierie de formation dont les PME ne disposent pas en interne », précise Arnaud Farhi. « Ce n'est pas anodin si de plus en plus d'intérimaires viennent à nous soit directement, soit orientés par leur entreprise », relève Benoît Allègre. Notre plus-value réside dans l'individualisation des parcours et dans notre capacité à innover. Par exemple, nous avons mis en place des parcours de qualification sur une double activité saisonnière. Une dizaine d'expérimentations dérogatoires sont en cours. »

Le gouvernement semble avoir pris note de l'intérêt des Geiq. Le secrétariat d'Etat à l'Insertion professionnelle des jeunes vient de signer avec le CNCE une convention de partenariat qui s'inscrit dans le plan de cohésion sociale. Les signataires s'engagent à promouvoir le développement du réseau sur les territoires où les Geiq sont peu présents, à encourager le partenariat avec les grandes entreprises offrant des possibilités de recrutement et à favoriser le rapprochement avec les branches professionnelles.

Aides de l'Etat

« Concrètement, nous attendons des moyens supplémentaires de la part de l'Etat », précise le secrétaire général du CNCE. Car la stabilité financière d'un Geiq est fragile. Ses ressources proviennent à 85 % des mises à disposition de salariés facturées aux entreprises. Une subvention de l'Etat de 686 euros par salarié et des accords ponctuels avec les collectivités complètent le budget et permettent d'atteindre l'équilibre.

« Ils ont constamment une épée de Damoclès au-dessus de la tête, note Turkia Ouchaou. Nous devons veiller, en permanence, à ce que nos adhérents soient mobilisés et nous utilisent car ce sont eux qui font vivre le Geiq. Nous sommes très peu aidés. »

La suppression du contrat de qualification et son remplacement par le contrat de professionnalisation n'est d'ailleurs pas sans risque pour l'édifice. Le décret du 13 septembre dernier, qui encadre ce nouveau contrat, confirme le financement de l'accompagnement social pour les jeunes jusqu'à 25 ans et l'étend aux plus de 45 ans. Mais rien n'est prévu pour les tranches d'âge intermédiaires, qui constituent 40 % du public des Geiq.

Disparition des primes

Sans compter que les primes de l'ancien contrat de qualification adulte ont disparu et qu'aucune exonération de charges n'est accordée. « C'est une aberration qui risque de freiner le développement des Geiq », prévient Benoît Allègre. Celui-ci sonne aussi l'alarme quant à la durée du contrat de professionnalisation, fixée à un an, dont 15 % consacrée à la formation. « Or, la durée du parcours nécessaire à notre public pour obtenir une qualification est de 16 à 24 mois, au rythme d'une semaine de formation par mois », souligne-t-il.

Contrats dérogatoires

Il revient aux branches de négocier et d'ouvrir la possibilité de conclure des contrats dérogatoires de six à douze mois supplémentaires et de porter la durée de formation à 25 %. C'est ce que prévoit l'accord de la branche propreté. « Mais, globalement, dans les postes visés par les Geiq, à savoir agent qualifié de service et chef d'équipe, un parcours d'un an suffit », tempère Turkia Ouchaou, directrice d'un des premiers Geiq signataires d'un contrat de professionnalisation.

les geiq

> 108 labellisés par le CNCE dans 21 régions.

> 3 300 entreprises adhérentes.

> 265 permanents.

> 2 327 salariés engagés dans un parcours d'insertion au 1er janvier 2004, dont 60 % de jeunes et 40 % d'adultes.

> 85 % des salariés avaient un niveau inférieur ou égal au niveau V.

> 70 % des contrats terminés en 2003 ont débouché sur un CDD de plus de six mois.

Auteur

  • Marie-Pierre Vega