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LE SOCIAL S'INVITE A L'A.G.

SANS | publié le : 09.07.2002 |

Le social fait son entrée en fanfare dans certaines AG d'actionnaires, où les syndicats se font entendre. Mais la majorité des petits porteurs, actionnaires salariés et investisseurs institutionnels, restent imperméables à leur message. Seuls quelques gestionnaires de fonds commencent à mettre en oeuvre des stratégies concertées d'activisme actionnarial.

Les patrons de grandes entreprises cotées doivent s'y faire : leur assemblée générale annuelle d'actionnaires ne ressemble plus à une tranquille réunion de famille. Cette année encore, des actionnaires bien remontés par la chute des valeurs ont chahuté quelques dirigeants lors de la saison française des AG. Et, de plus en plus, le social fait son entrée dans les débats d'actionnaires.

Les principaux griefs exprimés concernent, bien sûr, la performance financière de l'entreprise et les dividendes versés mais, désormais, ils sont parfois liés à des éléments de la politique sociale. Au premier plan d'entre eux : les rémunérations des cadres dirigeants et les plans de stock-options. Le tout dans un langage qui ne s'embarrasse plus des accents diplomatiques de la haute finance. Exemple : une question lue à l'AG d'Alcatel, sous les rires narquois de la salle, demandant pourquoi « la rémunération de M. Tchuruk évolue en proportion radicalement différente du cours de Bourse ». Chez Vivendi, les plans de stock-options ont suscité une levée de boucliers des actionnaires, contraignant Jean-Marie Messier à s'imposer un seuil de remontée de l'action pour accepter ces options. Chez PPR, des ONG dénonçaient les conditions de travail chez des sous-traitants et une salariée évoquait une discrimination syndicale dans une filiale américaine (lire p.16). Ces éclats fréquents font, en outre, des AG un événement médiatique dont les syndicats entendent bien profiter, déployant des banderoles devant et dans la salle, jouant de la corne de brume et prenant leur part des questions orales.

Responsabilité sociale

Selon le Centre français d'information sur les entreprises (CFIE), qui a suivi 38 AG de grandes entreprises françaises en 2001, une question sur six a concerné la responsabilité sociale des entreprises. Une progression d'un quart par rapport à l'année 2000 et de 40 % par rapport à 1999. Parmi elles, les questions sur la gouvernance d'entreprise (l'implication des actionnaires) restent majoritaires : transparence de l'information, documentation, convocations aux AG... Mais les préoccupations sociales se situent en deuxième position. Les questions émanent souvent de membres du personnel ou de représentants syndicaux.

Question de politique sociale

Parmi 46 questions de politique sociale analysées, le CFIE en comptait une douzaine autour des rémunérations (actionnariat salarié, distributions de stock-options, politique de rémunération). Dix concernaient le dialogue social (accords 35 heures, conflits sociaux, rôle des syndicats). Enfin, six questions concernaient la présence ou l'absence de femmes dans le conseil d'administration. Pour les auteurs de l'étude, « les assemblées générales des grandes sociétés françaises deviennent un lieu de débat sur l'implication des entreprises dans la communauté et sur leur politique sociale ».

Sérieux bémol

Mais, sérieux bémol, l'enquête souligne que sur 146 questions liées à la RSE, seules 10 étaient écrites et, donc, appelaient, selon la loi, une réponse du conseil d'administration. D'autre part, les questions orales d'inspiration syndicale passent souvent assez mal en AG. Les actionnaires traditionnels sont impatients, attendent le cocktail et sifflent facilement les interventions un peu longues.

Plus efficaces, mais plus difficiles à imposer : les résolutions d'actionnaires. De telles stratégies réclament des moyens. Il faut travailler à rassembler une partie des actionnaires autour de la proposition. Ainsi, dans les grandes entreprises françaises, on ne peut proposer une résolution qu'avec 0,5 % du capital. « C'est hors de portée des petits actionnaires. Quant aux salariés actionnaires, ils sont souvent terrorisés et ne votent pas contre leur direction », explique sans détours Pierre-Henri Leroy, directeur de Proxinvest, société d'analyse financière spécialisée dans l'assistance à l'exercice du vote des actionnaires des sociétés cotées françaises. Pour leur part, les gestionnaires de grandes banques exercent peu leur droit de vote.

Nouveaux acteurs

Restent les nouveaux acteurs de l'investissement responsable. Aux Etats-Unis, les fonds de pension éthi- ques parviennent à déposer régulièrement des propositions de résolution, principalement sur les droits de l'homme dans les pays où sont implantés des centres de production ou des sous-traitants, la rémunération des dirigeants, les questions de diversité et d'égalité des chances et, notamment, le "plafond de verre" pour les femmes. Elles sont rarement votées, mais, quand une résolution proposée par des détenteurs de moins de 1 % du capital attire jusqu'à 15 % des votes, le conseil d'administration a tout intérêt à prendre en compte le mécontentement. « 15 % d'actionnaires prêts à se désengager, c'est aujourd'hui plus important que 15 % de grévistes, confirme Claude Cambus, vice-président de la CFE-CGC. Il faut savoir aussi jouer de ces leviers. »

En France, de rares questions écrites et quelques cas de votes d'investisseurs institutionnels contre la direction ont été relevés dans les AG, mais pas une seule proposition de résolution. Néanmoins, les questions orales se multiplient et l'épargne salariale, qui devrait de plus en plus se teinter de responsabilité sociale, pourrait graduellement faire évoluer la situation.

L'essentiel

1 La saison des assemblées générales d'actionnaires a encore été agitée dans les grandes entreprises françaises.

2 Les questions orales portant sur le social arrivent juste derrière les préoccupations sur les performances financières et sur la gouvernance d'entreprise.

3 Mais, au-delà du chahut d'AG, peu d'acteurs ont la volonté, ou les moyens, de pratiquer un réel activisme actionnarial pour faire évoluer les pratiques des entreprises. Les fonds socialement responsables s'y efforcent.

EN SAVOIR PLUS

CFIE (Centre français d'information sur les entreprises). Informations sur le profil social et environnemental des entreprises, dossiers en ligne.

http://www.cfie.net

La fondation Ethos rassemble 92 caisses de pensions suisses et gère leurs encours avec des critères de développement durable. Beaucoup d'informations en ligne sur son site.

http://www.ethosfund

Novethic est un site de ressources et d'informations sur la RSE. Beaucoup d'articles en ligne, des liens et des services aux professionnels.

http://www.novetic