logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Pratiques

QuébecDES CERCLES DE LEGS POUR TRANSMETTRE LES COMPÉTENCES

Pratiques | International | publié le : 13.05.2014 | LUDOVIC HIRTZMANN

Remotiver les seniors à l’approche de la retraite et préparer au mieux la transmission de compétences est crucial pour les employeurs. Les cercles de legs, par lesquels un travailleur établit un héritage professionnel après son passage dans une entreprise, ont l’ambition de les y aider.

Plus que la Belle province, le Québec des entreprises est devenu la vieille province. Plus du tiers des cadres actuellement en poste prendront leur retraite dans les huit prochaines années : la transmission des compétences s’y avère cruciale. L’enjeu est d’autant plus important que selon un sondage de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés du Québec, 54 % des travailleurs affirment qu’il n’existe pas de plan de relève dans leur société. Si l’amnésie organisationnelle guette la province, plusieurs projets ont cependant été mis en œuvre pour contrer cette faiblesse par un transfert d’expertise.

Remotivation

Outre le mentorat, méthode déjà classique et répandue, les patrons optent parfois pour les cercles de legs professionnels, dispositif né au Québec, afin de parfaire le transfert d’expertise au moment de la retraite. La consultante québécoise Diane Doyon, fondatrice du concept de cercle de legs il y a une décennie, en a eu l’idée alors qu’elle intervenait dans les entreprises comme conseil stratégique en ressources humaines et développement organisationnel. « Je me suis rendue compte qu’un certain nombre de salariés vivaient mal la dernière étape de leur vie active. Certains font le décompte quotidien du nombre de jours qui les séparent de la retraite comme s’ils étaient des prisonniers », confie Diane Doyon. Le cercle de legs vise donc à briser ce processus. Il s’agit d’un atelier, mené par un animateur, qui regroupe une dizaine de personnes entrant dans leur “troisième tiers de carrière” et provenant d’entreprises différentes autour d’échanges sur leurs expériences professionnelles. Lors de ces groupes de discussion et de réflexion, ces futurs “retraités anonymes” déterminent quel héritage professionnel ils veulent transmettre. Pendant six séances de trois heures à raison d’une séance toutes les deux à quatre semaines, les salariés définissent un plan d’action avec leur coach. Tout au long de la démarche, ils utilisent un vademecum intitulé “Pour un troisième tiers de carrière porteur de vie” et rédigé par Jacques Limoges, un consultant et professeur en gestion de carrière à l’université de Sherbrooke. Un bilan de la réflexion est mené un mois après la fin de l’exercice. Les cercles de legs sont à la charge de l’employeur et coûtent environ 1 000 dollars (650 euros) par participant. Il revient ensuite à l’entreprise de définir quelles compétences elle souhaite transférer, et par quel moyen. En plus de remotiver, le cercle de legs joue un rôle prospectif dans l’identification des ressources nécessaires à la poursuite de l’activité. Or les entreprises canadiennes, surtout petites et moyennes, pèchent sur ce point par défaut d’anticipation.

Départs de baby-boomers

Ces transferts de compétences ont le vent en poupe dans les entreprises publiques, où le gouvernement québécois a procédé à des licenciements massifs, sans réflexion préalable, à la fin des années 1990. Il s’est ensuivi une perte de compétences importantes. C’est dans ce contexte que le Centre de santé et de services sociaux La Pommeraie, dans la banlieue de Montréal, confronté à une démotivation des personnels seniors, a entamé la démarche il y a quelques années. Vingt infirmières ont participé à des cercles de legs en 2009 et 2010. La majorité a transmis leurs compétences par accompagnement professionnel auprès de jeunes recrues de moins de deux ans d’expérience, lors de séances non rémunérées après leurs heures de travail. Dans le cas de cette clinique où un comité de pilotage avait été créé en amont, à peu près tous les acteurs - le syndicat, la direction et la DRH - se sont impliqués.

Alors que les départs de baby-boomers qui s’accélèrent pointent l’intérêt de la démarche au Québec, Diane Doyon a pris son bâton de pèlerin pour populariser sa démarche Outre-Atlantique, dans des pays confrontés à la même difficulté. Les cercles de legs s’implantent déjà en Suisse et la consultante est intervenue en Belgique auprès de professionnels RH.

Auteur

  • LUDOVIC HIRTZMANN