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Rupture conventionnelle : un consentement de droit commun

Enjeux | LA CHRONIQUE JURIDIQUE D’AVOSIAL | publié le : 22.04.2014 | Clément Rouyer

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Rupture conventionnelle : un consentement de droit commun

Crédit photo Clément Rouyer

Entrée en vigueur en août 2008, la rupture conventionnelle du contrat de travail est aujourd’hui solidement inscrite dans le paysage juridique. Elle représentait, en 2012, 16 % des ruptures de contrat de travail à durée indéterminée (1) ; en 2013, plus de 320 000 demandes de rupture conventionnelle ont été homologuées. L’importance pratique de ce mode de rupture du contrat de travail n’est plus à démontrer, en particulier pour les PME, au sein desquelles son taux de recours est le plus élevé.

Il fait peu de doutes que son introduction explique, au moins en partie, la diminution significative du volume du contentieux prud’homal depuis 2009 – de plus de 23 % sur quatre ans (2).

Les trois arrêts rendus par la chambre sociale de la Cour de cassation le 29 janvier 2014 devraient encore favoriser cette tendance. Ces trois affaires mettaient en cause la validité de conventions de rupture conclues en application des articles L. 1237-11 et suivants du Code du travail et la portée de certaines de leurs dispositions destinées « à garantir la liberté du consentement des parties ».

Dans la première espèce (n° 12-27594), un salarié reprochait à son employeur de ne pas l’avoir informé de la possibilité de se faire assister par un conseiller extérieur lors de l’entretien préalable à la conclusion de la convention, en l’absence d’institution représentative du personnel dans l’entreprise (art. L. 1237-12 du Code du travail), pour demander son annulation. Dans la seconde (n° 12-24539), un salarié se prévalait d’une erreur qui affectait la mention relative à la date d’expiration du droit de rétractation que les parties peuvent exercer dans un délai de 15 jours à compter de la conclusion de la convention (art. L. 1237-13 du Code du travail). Toujours pour prétendre à l’annulation de la convention de rupture, le salarié reprochait à son employeur, dans la troisième affaire (n° 12-25951), de ne pas l’avoir informé de la possibilité de prendre contact avec Pôle emploi. Cette information, destinée à permettre au salarié, avant la conclusion de la convention, d’envisager la suite de son parcours professionnel, prévue par l’ANI du 11 janvier 2008, n’a pas été reprise dans le Code du travail mais figure sur le formulaire de demande d’homologation.

Pour la Cour de cassation, ces griefs ne sont pas, en eux-mêmes, susceptibles d’entraîner la nullité de la convention de rupture : l’absence d’information sur l’assistance par un conseiller extérieur (au demeurant fort peu utilisée) n’a pas pour effet d’entraîner la nullité de la convention « en dehors des conditions de droit commun » ; une erreur sur la date d’expiration du droit de rétractation ne peut entraîner la nullité que si elle a « pour effet de vicier le consentement de l’une des parties » et le défaut d’information du salarié relative à une prise de contact avec Pôle emploi « n’affecte pas la liberté de son consentement ».

La Haute juridiction confirme ainsi qu’une partie qui entend obtenir l’annulation d’une rupture conventionnelle doit prouver l’existence d’un vice du consentement, dans les conditions du droit commun, une information inexacte ou lacunaire relative à l’une des garanties prévues par le Code du travail n’étant pas, en elle-même, suffisante pour caractériser un tel vice.

Le succès d’une action en nullité suppose donc que soit démontré que le consentement a été donné par erreur, extorqué par violence ou surpris par dol (art. 1109 du Code civil). La jurisprudence a déjà eu l’occasion de sanctionner de tels vices en annulant, par exemple, une rupture conventionnelle conclue par un salarié dans une situation de violence du fait d’un harcèlement moral (Cass. soc., 30 janvier 2013, n° 11-22332). Le dol d’un salarié, ou à tout le moins l’erreur d’un employeur, en raison de la dissimulation par ce salarié de faits constitutifs d’une faute grave commis avant la conclusion de la convention a pu aussi être retenu à l’appui d’une décision d’annulation d’une convention de rupture (CA Metz, 6 mai 2013, n° 13/00173).

Renvoyant au droit commun des contrats pour l’appréciation de la liberté du consentement des parties à la convention de rupture du contrat de travail, la jurisprudence semble ainsi se montrer soucieuse de la volonté des partenaires sociaux de privilégier des solutions négociées lors de la rupture du contrat de travail et de minimiser les sources de contentieux (cf. ANI du 11 janvier 2008).

(1) Source : Dares – Analyses, mai 2013, n° 031.

(2) Source : Ministère de la Justice – Activité des juridictions.

Auteur

  • Clément Rouyer