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« On va vers des régimes homogènes »

Enquête | publié le : 13.11.2012 | SABINE GERMAIN

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« On va vers des régimes homogènes »

Crédit photo SABINE GERMAIN

E & C : En quoi l’harmonisation de régimes de protection sociale complémentaire est-elle complexe ?

J.-P. F. : La gestion des délais peut être délicate. Les entreprises ont trois mois pour dénoncer leur accord collectif, puis douze pour en négocier un nouveau.

Or les contrats d’assurance sont souscrits pour un an, avec deux mois de préavis. Il faut donc trouver la bonne fenêtre de tir ! Mais c’est surtout la pluralité des acteurs qui complique la donne : la négociation se joue entre les partenaires sociaux, qui défendent le pouvoir d’achat des salariés, l’employeur, qui ne veut pas que la protection sociale lui coûte trop cher, et l’assureur, qui doit veiller à l’équilibre financier du régime mis en place. La Direction de la sécurité sociale commence également à entrer dans la danse : la question de l’égalité de traitement entre salariés est un nouvel élément de la négociation.

E & C : À vous, courtier, de gérer la montre et les équilibres financiers!

J.-P. F. : À défaut d’accord dans le délai de quinze mois, le courtier peut être assigné pour défaut de conseil. De même, si le régime est déficitaire ou si la sécurité sociale conteste les exonérations de cotisations sociales patronales au motif que le régime n’est pas obligatoire ou que les différences de traitement ne sont pas motivées, le courtier est sur la sellette. Nous devons être vigilants car, avec la norme Solvabilité 2, les assureurs peuvent être tentés par le dumping pour faire rentrer de la trésorerie et gonfler leurs fonds propres.

E & C : Les entreprises ne cherchent-elles pas à casser les prix ?

J.-P. F. : En quinze ans, leur budget protection sociale a quasiment décuplé. Elles ont envie d’arrêter les frais ! Mais en matière de couverture santé, il n’y a pas de mystère : le niveau de prestation doit être conforme au niveau de cotisation. Sinon, le régime est déséquilibré. L’année suivante, l’assureur n’aura d’autre solution que d’augmenter fortement les tarifs : au lieu de la hausse annuelle moyenne de 5 à 6 %, il pourrait passer à 10-12 %. Les frais de santé relèvent davantage de la gestion de trésorerie que de l’assurance.

E & C : La dérive des coûts des complémentaires santé est-elle inexorable ?

J.-P. F. : Non. Il existe différents leviers pour maîtriser les coûts. Le principal est le choix des ayants droit : les célibataires ont de moins en moins envie de payer pour les familles ; quant aux conjoints, ils sont souvent couverts par leur propre employeur. Bien que des organisations syndicales telles que la CFTC ou FO y soient fermement opposées, la démutualisation est de plus en plus fréquente. Aujourd’hui, 40 % des entreprises proposent un taux de cotisation différencié entre célibataires et familles ; 40 % gardent le principe du taux unique ; les 20 % restants adoptent des formules plus complexes.

E & C : Cette différenciation peut-elle être contestée par la Sécurité sociale ?

J.-P. F. : Non. La Sécurité sociale ne conteste pas les inégalités de traitement entre ayants droit, mais entre salariés. Proposer des niveaux de cotisations ou de prestations différents entre cadres et non-cadres, par exemple, me semble de plus en plus difficile à justifier, du moins pour la couverture santé. En prévoyance, il est encore possible de faire de petites différences. Mais on va de plus en plus vers des régimes homogènes entre catégories de salariés.

Auteur

  • SABINE GERMAIN