Lorsque Victoria de Winter, 42 ans, DRH d’un groupe industriel international de 12 000 salariés, et David Kolski, 42 ans, directeur de travaux parisien, se rencontrent dans un banal centre commercial, cela donne un coup de foudre et une relation adultère passionnelle et destructrice. L’auteur et romancier Éric Reinhardt met face à face une femme de pouvoir et d’argent, voyageant constamment d’un pays à un autre, chargée notamment de négocier la fermeture d’une usine sidérurgique en Lorraine pour obéir aux ordres des actionnaires, et un ancien architecte qui dirige actuellement la construction de la Tour Uranus à La Défense, un immense building de 150 étages.

Victoria incarne le capitalisme financier et décomplexé, elle vit dans le mouvement, la vitesse, l’argent, la mondialisation, tout en se targuant d’avoir une fibre sociale. David, d’origine modeste, est un homme aux valeurs de gauche qui vit dans le concret, le réel le plus brut, fier de son travail et de cette aventure collective. Travailleur acharné, il tente quotidiennement de résister aux contraintes fixées par les financiers pour terminer les travaux dans des délais impitoyables. Quitte à ce que la qualité en pâtisse…

L’auteur, qui avait déjà décrit les rouages du capitalisme financier dans Cendrillon (2007), montre brillamment la pression que fait peser sur le monde du travail la logique des profits poussée à l’extrême. Le Système Victoria est d’abord une histoire de passion amoureuse mais également un roman social, une plongée palpitante dans l’univers de l’entreprise et de la finance. Dans cette confrontation de deux visions du monde, dans ce duel amoureux et politique, l’auteur se refuse à tout manichéisme. Ce roman a été sélectionné pour le Goncourt.

Le Système Victoria

Éric Reinhardt, Stock, 528 pages, 22,50 euros.