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Le rachat de trimestres de retraite est-il rentable ?

Enjeux | Chronique juridique par AVOSIAL | publié le : 12.10.2010 |

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Le rachat de trimestres de retraite est-il rentable ?

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Cette question se repose dans le cadre du débat sur la réforme des retraites.

Il convient au préalable de rappeler le dispositif de rachat mis en œuvre le 1.01.2004 par la loi Fillon de 2003, article L 351-1 du Code de la Sécurité sociale : les rachats de trimestres, officiellement dénommés “versements pour la retraite” (VPLR), visent à permettre à des assurés qui ont atteint l’âge de la retraite sans remplir les conditions requises pour une pension de leur régime de base à taux plein (50 %), d’augmenter leurs droits. Cette faculté était, à l’origine, limitée aux personnes de 26 à 59 ans pour compenser la durée des périodes d’études supérieures et à la récupération de trimestres manquants au cours des années incomplètes. Ce rachat est plafonné à 12 trimestres et peut s’opérer soit dans le cadre de l’option 1 concernant le taux de pension, soit dans celui de l’option 2 portant à la fois sur le taux de pension et la durée d’assurance prise en compte (plus coûteuse). Le coût est déterminé par un barème réglementaire.

Le système s’ajoute à celui des anciens rachats prévus pour les trimestres qui auraient pu être acquis dans le cadre de l’assurance volontaire (notamment par des personnes expatriées).

Préalablement à la décision d’effectuer un éventuel rachat, il est nécessaire de calculer le nombre de trimestres manquants. En effet, l’option 1 vise à réduire la décote, qui correspond au taux unitaire de la décote multiplié par le nombre de trimestres manquants. Tandis que l’option 2 permet, en outre, d’augmenter la durée d’assurance prise en compte.

Dans les deux cas, on doit alors déterminer le nombre de “trimestres inutiles” à racheter puisqu’ils n’auraient pas d’effet sur le taux. Ils sont de deux catégories : si le nombre de trimestres manquants en fonction de la durée d’assurance est plus élevé que celui en fonction de l’âge, la partie excédentaire n’aura aucun effet sur le taux de pension. A l’opposé, il est inutile de racheter plus de trimestres que nécessaire pour atteindre la durée requise au titre du taux plein.

C’est le mécanisme assez complexe de cette concurrence entre l’âge et la durée totale d’assurance qui requiert l’intervention et l’assistance d’un expert. C’est en effet de la détermination des “trimestres inutiles” que dépend l’opportunité du rachat. Deux nouveautés en 2009 relancent cependant le débat sur cette opportunité : le rachat est, en effet, désormais possible au-delà de l’âge de 60 ans.

Cette ouverture ne remet cependant pas en cause la confrontation des avantages éventuels d’un rachat avec ceux de l’assurance chômage (!). Au contraire, l’actualité de ce débat se trouve renforcée, et complexifiée par le développement des “ruptures conventionnelles”, dans la mesure où celles-ci permettent non seulement l’attribution d’allocations chômage, mais aussi la validation de nouveaux trimestres de retraite, sans rachat.

L’article 4 du nouveau règlement, résultant de l’accord Unédic du 30.03.2009, prévoit expressément le maintien de ces allocations jusqu’à l’atteinte de la date permettant le taux plein(1).

Par ailleurs, un nouveau sursis pour bénéficier de l’incidence de ce rachat sur les régimes complémentaires est accordé : la date limite prévue par les accords du 13 novembre 2003 a été prorogée jusqu’au 1er décembre 2010 dans l’attente d’un nouvel accord des partenaires sociaux.

Il est bien évident, en tout cas, que s’il existe des “trimestres inutiles” et si, de surcroît, on ne devait tenir compte du rachat que pour le régime général, le coût de celui-ci pour augmenter la seule pension de base serait disproportionné, même en prenant en compte la déductibilité fiscale des versements effectués !

En conclusion, on ne peut éviter de se poser deux questions primordiales avant toute décision de rachat : quel est le nombre de “trimestres inutiles” à racheter ? Quel est le taux de rendement interne assuré de l’investissement, par rapport à ceux offerts par les multiples contrats d’épargne-retraite, ou l’achat d’un studio pour le louer ? Certains experts n’hésitent pas à conseiller ce type de placement…

Jacques Brouillet, avocat au Barreau de Paris, est spécialiste en droit social et droit européen, conseiller scientifique Cabinet ACD, membre d’Avosial, le syndicat des avocats en droit social.

(1) A noter, toutefois, l’ambiguïté de l’accord d’application n° 15 qui, lui, fait référence à la date d’atteinte d’une durée d’assurance de 160 trimestres.