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Ce que changera le projet de loi plein-emploi pour les travailleurs des Esat

Handicap | publié le : 14.09.2023 | Benjamin d'Alguerre

Projet de loi plein-emploi : ce qui change pour les travailleurs des Esat

Projet de loi plein-emploi : ce qui change pour les travailleurs des Esat

Crédit photo Firma V / Adobe stock

Le projet de loi pour le plein-emploi prévoit une évolution des droits sociaux des travailleurs handicapés des Esat. Ceux-ci pourront bénéficier d’une complémentaire santé prise en charge par l’établissement d’accueil, tenter une reconversion dans le secteur privé ou même se syndiquer… et exercer leur droit de grève.

C’est une petite révolution qui va se jouer dans le monde feutré des 1 500 établissements et services d’aides par le travail (Esat) qui maillent le territoire français. Beaucoup moins commentés que ceux concernant la transformation de Pôle emploi en France Travail ou les dispositions liées au contrat d’engagement pour les allocataires du RSA, deux articles du projet de loi pour le plein-emploi, que l’Assemblée nationale se prépare à examiner à partir du 25 septembre prochain, prévoient de doter les travailleurs handicapés qui exercent dans ces établissements protégés d’une batterie de nouveaux droits sociaux individuels et collectifs dont ils étaient jusqu’à présent exclus.

Concrètement, et si le texte demeure en l’état, les 120 000 travailleurs disposant actuellement du statut d’« usagers du médico-social » pourront bénéficier du droit d’adhésion syndicale, du droit de grève, de l’affiliation obligatoire de leur Esat d’accueil à une complémentaire santé, d’une représentation étendue au sein des instances représentatives du personnel et même de la possibilité de rejoindre les effectifs d’une entreprise privée tout en ayant la garantie de pouvoir revenir en établissement spécialisé si leur expérience tourne mal. À quoi s’ajouteront plusieurs dispositifs de gratification calqués sur ceux des salariés comme les titres-restaurants, les chèques-vacances ou même la prise en charge partielle des frais de transports par l’établissement accueillant.

Les avantages du salariat… sans le statut salarié

Toutefois, le projet de loi ne va pas jusqu’à pousser la transformation pure et simple de ces usagers du médico-social en véritables salariés dotés d’un contrat de travail. Si ce changement radical a fait partie des premières hypothèses de travail des concepteurs du « plan de transformation des Esat » porté en 2021 par l’ex-secrétaire d’État en charge du handicap, Sophie Cluzel, il a rapidement été écarté. Motif : trop insécurisant pour ces travailleurs fragiles. « Cela aurait signifié qu’un travailleur d’Esat aurait pu être soumis à des objectifs inscrits dans son contrat de travail, voire licencié ! Il n’en était pas question au vu du caractère très particulier de ces personnes », explique-t-on aujourd’hui au cabinet du ministre du Travail, Olivier Dussopt, qui a récupéré le volet « emploi » du projet en 2022. Autre avantage, mais pour les établissements, cette fois : le non-changement de statut n’entraînera pas un bond dans les seuils sociaux, comme une précédente réforme mal pensée de l’IAE avait pu le faire en 2015 au sein des entreprises et chantiers d’insertion.

En 2022, la première mouture du plan de transformation des Esat avait déjà provoqué un certain nombre de changements dans les établissements : affiliation obligatoire à un Opco pour la gestion des plans de développement des compétences (l’Opco Santé pour la plupart) et constitution d’une instance représentative élue de travailleurs handicapés à voix consultative pouvant aiguiller les CSE et directions sur les conditions de travail, d’hygiène et de sécurité des usagers du médico-social étaient au menu. Demain, les CSE des établissements (représentant exclusivement les personnels salariés) pourront s’ouvrir à des délégués des travailleurs handicapés qui y porteront la voix – mais consultative, seulement - de leurs camarades. « C’est une étape supplémentaire dans la politique d’inclusion que défend le Gouvernement depuis 2017. Un travailleur handicapé doit avant tout être considéré comme un travailleur », rappelait Fadila Khattabi, la nouvelle secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées, le 7 janvier dernier. Et le travail n’est pas achevé puisqu’il appartient désormais à une mission conjointe des inspections générales des finances et des affaires sociales de plancher sur le développement de nouveaux droits pour ces personnels pas comme les autres.

Reste pour l’heure à attendre la fin du parcours parlementaire du texte, exceptionnellement étudié par le Sénat en juin dernier, en amont de sa présentation au Palais-Bourbon. Côté ministère du Travail, on ne se dit pas inquiet : « C’est un sujet consensuel. Il n’y a pas de raisons qu’il suscite des polémiques ». À voir.


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Auteur

  • Benjamin d'Alguerre