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Représentativité, simplification, emploi… les dossiers qui attendent le nouveau président de l’U2P

Organisations patronales | publié le : 25.01.2024 | Benjamin d'Alguerre

De gauche à droite, Bruno Le Maire, Dominique Métayer (président sortant, Capeb) et Michel Picon (nouveau président, UNAPL).

Crédit photo DR

Michel Picon vient d’être désigné président de l’U2P pour quatre ans. Le nouveau dirigeant, qui a déjà rencontré Gabriel Attal le 22 janvier, engage son organisation sur plusieurs chantiers. Dont certains particulièrement sensibles.

Passation de pouvoir à la tête de l’Union des entreprises de proximité. Après trois années de présidence, Dominique Métayer, artisan maçon et vice-président de la Capeb (la fédération des artisans du bâtiment), vient de confier les clés de la boutique à l'agent d'assurances Michel Picon, jusqu’alors président de l’Union nationale des professions libérales (Unapl).

Selon les règles de la présidence tournante en vigueur entre les différentes composantes de l’U2P, ce dernier tiendra les rênes de l’organisation patronale jusqu’en janvier 2028. À cette date, les règles relatives à la présidence de l’Union devraient avoir évolué pour limiter la durée des mandats présidentiels à trois années « afin de mieux assurer la rotation entre les quatre composantes de l’U2P », explique Michel Picon, à savoir la Capeb, l’Unapl, la CGAD (alimentation et hôtellerie-restauration) et la CNAMS (fabrication et services). Ce changement statutaire devrait être adopté ces prochains jours.

Peser face au Medef

Pour cet agent général d’assurances camarguais qui, jusqu’à présent, occupait la fonction de vice-président de l’organisation en charge des questions d’emploi et d’assurance-chômage, le travail de président de l’U2P avait, de toute façon, débuté quelques jours plus tôt lors de la rencontre des partenaires sociaux avec Gabriel Attal à Matignon. L’occasion d’évoquer avec le nouveau Premier ministre les principaux dossiers à l’agenda du syndicat des artisans et des professionnels libéraux.

À commencer par celui de la représentativité patronale. Un sujet toujours brûlant pour l’Union depuis la loi El Khomri, qui a inscrit dans le marbre une règle de représentativité dans laquelle le nombre d’entreprises adhérentes à une confédération d’employeurs ne compte que pour 30 % alors que les effectifs des salariés pèsent 70 % du classement final. Une clé de calcul qui assure au Medef une prédominance dans le camp patronal, à la CPME sa place de deuxième et à l’U2P… un simple strapontin dans les instances paritaires et la négociation collective, en dépit des quelque 2,8 millions d’entreprises. C’est d’ailleurs cette répartition « injuste » qui avait, en 2016, poussé l’ancienne UPA à se rapprocher de l’Unapl afin de peser davantage. Puis, en octobre dernier, de lancer le projet de création d’un « cinquième pôle » de l’U2P visant à y intégrer toutes les TPE non-couvertes par l’une de ses quatre composantes et à permettre l’adhésion directe d’une entreprise à l’Union.

« Nous n’avons pas la place qui nous revient dans le champ social ! » conclut Michel Picon. Pour rééquilibrer les forces, le nouveau président entend « prochainement » présenter au Premier ministre et à sa ministre du Travail, Catherine Vautrin, une série de propositions visant à instaurer « un nouveau coefficient de représentativité modulée » qui donnerait plus de voix aux représentants des TPE. Mais aussi une révision du système de la « double adhésion » des entreprises à une confédération patronale – une première fois par la branche, une seconde au niveau territorial – qui multiplie artificiellement le nombre des adhérents revendiqués par les organisations d’employeurs et fausse donc leur périmètre réel.

L’affaire risque donc de créer à nouveau quelques tensions dans le camp patronal – déjà fracturé par le récent désaccord sur l’Agirc-Arrco qui a opposé, en octobre dernier, le Medef d’un côté et la CPME et l’U2P de l’autre – mais Michel Picon veut jouer la carte de « l’apaisement » en proposant à Patrick Martin, son homologue de l’avenue Bosquet, une discussion à ce sujet.

150 propositions de simplification administrative

Moins violent que les heurts entre patrons, le « choc de simplification administrative » promis lors des dernières rencontres de l’U2P de septembre 2023 par Bruno Le Maire – et réitéré depuis par Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse du 16 janvier – est tout autant, voire davantage attendu par les dirigeants de TPE et leurs représentants.

Le locataire de Bercy, qui avait fait le déplacement le 25 janvier pour saluer le nouveau président de l’Union, a confirmé son engagement à mener ce chantier à terme. « Il faut faire une révolution idéologique dans la relation entre administration et administrés. L’administration doit arrêter de considérer chaque administré comme un fraudeur potentiel. Il faut apprendre à faire confiance au citoyen, à l’entreprise. Nous ne sommes pas là pour les fliquer ! » a énoncé le ministre de l’Économie et des Finances, s’engageant pour produire, dans les prochains mois, « une simplification drastique » des normes en matière fiscale, sanitaire et administrative. Un objectif qui pourrait notamment passer par un relèvement des seuils sociaux dans les entreprises « comme cela a été fait avec la loi Pacte ».

De son côté, l’U2P a annoncé transmettre à Bercy prochainement une série de 150 propositions touchant tous les domaines de la vie d’une TPE, allant d’une refonte de la TVA à celle du site impots.gouv.fr, en passant par des modifications attendues sur le statut de la SARL et la simplification du bulletin de paie. Des propositions que Bruno Le Maire s’est engagé à reprendre « dans leur intégralité ».

Emploi : France Travail attendu au tournant

Sur le front de l’emploi, le nouveau président – lui-même administrateur ces cinq dernières années de l’Unédic et de Pôle emploi – attend beaucoup de la réforme France Travail et de l’installation du nouveau service public de l’emploi. « Nous partageons la même vision que Gabriel Attal. Il est conscient que les TPE représentent un important vivier de recrutements et de création d’emplois non délocalisables. Une giga-factory qui recrute, c’est ponctuel. Demain, elle peut partir à l’étranger. Un boulanger, un maçon ou un boucher, lui, créé de l’emploi durable. »  À condition que France Travail change de braquet et s’intéresse aux petites entreprises, là où Pôle emploi avait tendance à privilégier les grands comptes au détriment des TPE. « Je suis convaincu que Thibaut Guilluy a la volonté d’apporter ce changement, mais il faudra lutter contre l’inertie de cette administration », prévient toutefois le nouveau leader de l’U2P.

Quant à la menace de sanctions pesant désormais sur les allocataires du RSA refusant les termes du « contrat d’accompagnent renforcé » signé avec France Travail, elles peuvent constituer un mal nécessaire. À condition, cependant, que les publics les plus éloignés de l’emploi soient, eux, réinsérés en douceur avec un accompagnement assuré à la fois par un conseiller France Travail connaissant la situation de son bassin d’emploi sur le bout des doigts et par un travailleur social.

La difficile fusion des fonds d’assurance-formation

Enfin, la fusion entre les deux fonds d’assurance-formation des chefs d’entreprise des professions libérales (le Fif-PL) et de l’artisanat (le Fafcea) est également à l’ordre du jour. Sur le papier, le rapprochement de ces deux structures paritaires gestionnaires des fonds de la formation continue des dirigeants de TPE semble entendu… or des blocages politiques subsistent. D'une part, particulièrement avec la CPME qui siège également au conseil d’administration du Fafcea et qui souhaiterait, pour sa part, étendre le périmètre de fusion jusqu’à l’Agefice, un autre fonds d’assurance-formation, dédié, lui, aux commerçants. Et d'autre part, au conseil d’administration auquel siègent à la fois l’U2P, la CPME et le Medef, chacun demeurant campé sur des positions contradictoires pour l’instant. « Une belle usine à gaz », soupire un dirigeant de l’U2P.

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre