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Une reprise sans accord à la Fnac

ISRH | Organisations professionnelles | publié le : 11.05.2020 | Benjamin d'Alguerre

La reprise de l'activité s'accompagne de tensions entre la direction et les syndicats.

Crédit photo Pixarno/AdobeStock

Le 11 mai, la plupart des magasins du réseau de la Fnac, à l’exception des surfaces de plus de 40 000 m2 toujours fermées pour raisons sanitaires, ont rouvert leurs portes. Quelque 12 000 salariés (80 % de l’effectif total) jusqu’alors confinés en activité partielle ont repris le chemin du travail. Mais l’incertitude pèse quant à l’avenir du géant de la distribution de produits culturels. Les partenaires sociaux de l’enseigne ne sont pas parvenus à s’entendre sur les modalités de la gestion de la crise et de l’après.

Les trois réunions téléphoniques organisées les 16, 20 et 23 avril derniers portant sur la discussion d’un « accord relatif aux mesures mises en œuvre au sein du sous-groupe Fnac résultant de la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 » se sont achevées sur un une fin de non-recevoir de la part des quatre organisations syndicales représentatives (CFDT, CGT, CFE-CGC et CFTC). En cause : l’accord de crise mis sur la table par la direction prévoyait la prise en charge par le groupe de 100 % des salaires des employés en activité partielle pour la période du 1er avril au 11 mai… mais en échange, notamment, d’un lissage annuel du temps de travail sur une base de 35 heures hebdomadaires, avec des semaines pouvant s’échelonner de 25 à 43 heures pour les salariés en fonction de l’affluence dans les magasins. « En outre, les RTT auraient été écornées. Concrètement, certains salariés pouvaient perdre jusqu’à douze jours de repos par an », selon Marc Pietrosini, DSC CGT Fnac-Relais.

« Une négociation sur la modulation du temps de travail était effectivement prévue avant la pandémie. Évidemment, avec l’annonce du confinement, elle est tombée à l’eau. Mais la direction a réintégré dans son accord de gestion de crise un chapitre sur cette question en voulant nous le faire négocier en trois séances et par téléphone. Or, une négociation de cette importance ne pouvait pas être traitée à la va-vite », témoigne Bruno Marc, coordinateur CFTC, qui déplore cette tentative de passage en force. À la modulation du temps de travail, le groupe voulait par ailleurs ajouter, dans le texte refusé en bloc par la partie syndicale, l’obligation pour les salariés de prendre de six à douze jours de congés payés pour compenser les mois de travail perdus, ainsi que la création d’un « fonds de solidarité » permettant de transférer les jours de repos entre salariés. 

Côté direction, on se défend de toute arrière-pensée opportuniste, mais on avance des réalités économiques : « Cette négociation voulait anticiper la reprise de l’activité : la quarantaine nous a fait perdre une part très importante de notre chiffre d’affaires et nous prévoyons une basse de la fréquentation des magasins de 30 % au moment de la reprise et dans les semaines suivantes », avance Delphine Ratouit, directrice des relations sociales du groupe. Faute d’accord, l’activité a donc redémarré le 11 mai… mais sans dispositif pour encadrer le retour à l’activité après un mois et demi perdus. Dans ces conditions, les marges de manœuvre pour le groupe sont faibles et se limitent au périmètre des ordonnances du 23 mars dernier. « Sans modulation, nous allons inciter à la prise des reliquats de congés payés lors de la reprise et on pourrait en dernier recours imposer la prise de RTT dans la limite des ordonnances », poursuit Delphine Ratouit. Mais sans certitude sur l’effet compensatoire de ces mesures pour les finances de la Fnac.

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre