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L'appel plus ou moins affirmé des organisations syndicales et patronales à voter Macron au second tour

Syndicat | publié le : 14.04.2022 | Benjamin d'Alguerre

Par conviction ou par défaut, le choix des organisations syndicales et patronales pour le 24 avril se portera massivement vers le bulletin Emmanuel Macron. Mais certaines plaident encore la neutralité pour ne pas froisser leur base.

Les résultats du premier tour de l’élection présidentielle divisent le camp syndical sur la stratégie à adopter dans l’entre-deux-tours. Respecter la neutralité syndicale qui interdit les consignes de vote ? Appeler à faire barrage à Marine Le Pen sans appeler explicitement au vote Macron ? Ou assumer de demander aux troupes de glisser un bulletin au nom du candidat LREM dans l’urne le 24 avril prochain ? Dans un contexte marqué par une pénétration croissante des idées d’extrême droite dans le monde syndical, les directions confédérales marchent parfois sur des œufs pour ne pas heurter les sensibilités de la base. Le sondage Harris Interactive sur les intentions de vote des adhérents dévoilé cette semaine par nos confrères de Liaisons Sociales Quotidien montre à nouveau que le vote Le Pen n’est plus un tabou dans les organisations de défense des travailleurs (le vote Rassemblement national séduirait ainsi 31 % des adhérents FO, 29 % de ceux de la CFTC et 22 % des cégétistes) et les récentes élections régionales et départementales ont vu plusieurs patrons de fédération ou d’unions territoriales figurer sur les listes du parti à la flamme, parfois comme têtes de liste (Luc Doumont, ex-secrétaire général de l’Unsa Finances dans les Hauts-de-Seine, Stéphane Blanchon, ancien secrétaire général de l’Unsa Santé et Cohésion sociale dans la Drôme ou Philippe Théveniaud, ex-président de la CFTC de la Somme dans son département). Dans ces conditions, pas toujours facile de prendre position, d’autant qu’en face, les propositions d’Emmanuel Macron sur les retraites ou les réformes accomplies durant son mandat sur l’assurance-chômage ainsi que la gestion de la crise des gilets jaunes sont loin de l’avoir rendu populaire auprès du monde syndical. De quoi favoriser en tout cas la tentation du "ni ni" chez les militants des organisations les plus radicales.

À l’Unsa où le vote RN demeure marginal en dépit de la séduction de quelques caciques, la position est claire : "ni abstention, ni Le Pen, ni blanc, ni nul !" affirmait Laurence Escure, son secrétaire national sur Twitter dès le 10 avril. Une position partagée par la CFDT qui demandait "à toutes celles et ceux qui sont attachés à la démocratie et aux valeurs de la République de se mobiliser dimanche 24 avril pour battre la candidate du Rassemblement national en votant pour Emmanuel Macron" dès les résultats du premier tour connus. Ailleurs, le dilemme est plus prononcé. À FO, on choisit de ne pas donner de consignes de vote, tout comme à la CFTC même si la direction du syndicat précise que les valeurs défendues par l’organisation ne sont pas en phase avec celles du Rassemblement national. À la CGT, si les dirigeants appelaient dès le départ à faire barrage à l’extrême droite mais sans appeler ouvertement au vote Macron, les instances confédérales ont cependant refusé de renvoyer les deux finalistes du 10 avril dos à dos sans cependant donner une consigne de vote explicite.

Dans le camp patronal, le Medef a été la première organisation à dégainer dès le 11 avril en appelant au vote Macron. Le conseil exécutif du Mouvement des entreprises de France […] considère, à l’unanimité, que le programme d’Emmanuel Macron est le plus favorable pour assurer la croissance de l’économie et de l’emploi dans notre pays. Même s’il comporte des lacunes, il est le plus à même de préparer la France aux défis de l’avenir en faisant le choix de la compétitivité et d’une croissance durable. Le programme économique de Marine Le Pen conduirait le pays à décrocher par rapport à ses voisins et à le mettre en marge de l’Union européenne. Il dégraderait la confiance des acteurs économiques, réduisant ainsi les investissements et les créations d’emplois. La hausse très forte et non financée des dépenses publiques risquerait de placer le pays dans une impasse", explique-t-on au sein des troupes de Geoffroy Roux de Bézieux. Une position claire… mais qui risque cependant de renforcer la stature de Marine Le Pen comme "alternative à gauche" d’un Emmanuel Macron perçu comme libéral et pro-patronal.

Chez les patrons de l’économie sociale et solidaire de l’Udes, le rejet du programme lepeniste est sans ambiguïtés, de même que l’appel à voter pour le candidat En Marche. "Alors que la démocratie est mise en danger aux portes de l’Europe par un régime guerrier et autoritaire, l'Udes appelle les citoyens à voter massivement le 24 avril pour montrer combien la démocratie est forte et la nation ouverte au monde. Les citoyens français doivent envoyer un message clair et sans équivoque au monde sur la vivacité de notre modèle démocratique sans aucune ambiguïté vis-à-vis de ceux qui souhaiteraient imposer d’autres modèles et en toute indépendance".

À l’U2P en revanche, on votera Macron mais sans le crier trop fort. Si le communiqué de l'union des patrons de l'artisanat et des professions libérales revendique la devoir de réserve syndicale et interpelle les deux candidats sur les problématiques propres aux TPE, le texte rappelle tout de même "l’importance et la pertinence des mesures prises sous le quinquennat d’Emmanuel Macron pour accompagner les entreprises dans la crise sanitaire et la concertation mise en place dans ce cadre pour les adapter au mieux aux situations des entreprises" et salue le plan "indépendants" mis en place par l’actuel exécutif. Ou l'art de dire les choses sans les dire...

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre