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Un polytechnicien-patron à la tête de l’UIMM

Liaisons Sociales Magazine | Dialogue Social | publié le : 19.03.2015 | Manuel Jardinaud

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Le directeur général délégué du groupe Haulotte, Alexandre Saubot, prend la tête de l’Union des industries et des métiers de la métallurgie. Un patron féru de dialogue social.

Polytechnicien, ancien du Trésor puis du ministère de la Culture, banquier chez Natixis… Le dense CV d’Alexandre Saubot, 50 ans, s’enrichit : il a été élu ce 19 mars président de l’Union des industries et des métiers de la métallurgie (UIMM), avec 52% des voix exprimées (112 voix sur 234 inscrits). Le patron du groupe Haulotte succède à Jean Luminet, qui assurait l’intérim depuis le départ de Frédéric Saint-Geours au conseil de surveillance de la SNCF.

L’élection d’Alexandre Saubot dès le premier tour est une surprise tant, ces dernières semaines, la candidature de Jérôme Frantz, PDG de Frantz Electrolyse (une PME d'une centaine de salariés) semblait prendre de l'ampleur. Son autre adversaire, Marc Ventre, directeur général délégué de Safran, était déjà donné vaincu.

Sauveur de l'entreprise familiale

Le statut de patron sauveur – lorsqu'il a succédé à son père, en 2008, l'entreprise familiale était en grande difficulté – a certainement joué en sa faveur. « A l'époque, il aurait pu se débarrasser de nous car la situation était très tendue. Il ne l’a pas fait et a tenu ses engagements », témoigne Franck Sauton, délégué syndical central CFDT du groupe Haulotte. Un pari gagnant. Entre 2013 et 2014, le leader européen de la nacelle élévatrice a augmenté son résultat net de 29%.

Le syndicaliste évoque un très bon gestionnaire qui ne prend aucune décision unilatérale. « Certes, nous sommes parfois déçus du résultat des négociations mais, par rapport aux autres PME de notre territoire, nous sommes privilégiés en terme de dialogue social », ajoute Franck Sauton.

Elargir sa vision

Au plan national, Alexandre Saubot a récemment pris du galon comme chef de file du Medef lors de la négociation sur la modernisation du dialogue social. Laquelle s’est soldée par un échec qui ne lui a pas été préjudiciable. « C’est un homme chaleureux et convivial, note Marie-Françoise Leflon, la négociatrice de la CFE-CGC. Mais, s’il a une vraie pratique du dialogue social dans son entreprise, il ne l'a pas encore élargie au champ de l’interprofessionnel en se nourrissant des propositions de chacun. »

Au Medef, on lui reconnait les défauts de ses qualités. "Il a un côté ingénieur. Il s'approprie les sujets très sérieusement mais manque parfois de souplesse en s'attardant sur des détails et en oubliant l'équilibre global", commente un dirigeant de l'organisation patronale. Une faiblesse qu’il va devoir gommer rapidement à l’UIMM, tant l’agenda social est chargé et les enjeux forts pour ce premier mandat de trois ans.

« Nous gageons qu’il saura maintenir le dialogue social comme un pilier de la performance économique de l’industrie », note Gabriel Artero, président de la Fédération de la métallurgie CFE-CGC. En clair : être dans la lignée de son prédécesseur. Pas sûr pourtant que cela soit le centre de son projet. Plus que Frédéric Saint-Geours, Alexandre Saubot entend incarner l'industrie française et remettre au cœur des débats la question du coût du travail et de la pénibilité. "Il saura prendre sa place au sein du comité executif du Medef", ajoute une source interne, qui le qualifie de "très bon communicant".

Un cadre conventionnel à réinventer

Le chantier de la refonte totale du cadre conventionnel de la branche rend son début de mandat risqué. Mais le jeu en vaut la chandelle, les relations sociales s'avérant très complexes avec 76 conventions collectives territoriales. Reste à savoir comment articuler le national et le local. Un exercice de funambule... « Nous sommes dans l’attente, nous manquons de précisions sur les propositions », s’inquiète Frédéric Sanchez, secrétaire général de la CGT Metallo. Seul point incontournable, l’élaboration d’une nouvelle grille de classification nationale pour les ouvriers et les cadres.

Alexandre Saubot va devoir s’approprier ce délicat sujet d’ici juin 2015, date prévue pour la remise de propositions aux fédérations syndicales. Les négociations devraient débuter en septembre. Le nouveau leader de l'UIMM devra alors trouver le bon équilibre entre la qualité du dialogue social et les revendications inquiètes des petits patrons. Et pour cause, l'industrie perd près de 3% d’emplois chaque année.

Auteur

  • Manuel Jardinaud