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Sans syndicat, pas d’accord d’entreprise ?

Entreprise & Carrières | Dialogue Social | publié le : 31.03.2016 | Emmanuel Franck

Les PME dépourvues de délégués syndicaux peuvent signer des accords à condition, notamment, de les faire valider par des commissions paritaires de branche. Mais très peu se sont saisies de cette possibilité. La future loi Travail tentera d’améliorer la situation, la solution passant vraisemblablement par les branches.

Pas facile de négocier un accord d’entreprise quand on n’a pas de délégué syndical. Les PME en savent quelque chose. Il a fallu un an et beaucoup de précautions à la clinique Saint-Christophe de Bouc-Bel-Air (Bouches-du-Rhône) pour finaliser celui qui lui a permis de basculer en semaine civile dérogatoire, condition pour faire évoluer le temps de travail de ses salariés (lire p. 25). Au mois de septembre, Algimouss (produits de nettoyage) s’est vu refuser la validation de son accord d’aménagement du temps de travail, comme 64 % des entreprises dépourvues de délégués syndicaux qui présentent un texte devant la commission paritaire de validation de la chimie (lire p. 23). Dans la même branche, le groupe de PME spécialisées dans les parfums Elixens a connu 9 refus en trois ans pour deux succès seulement (lire p. 22). « Cela fait trente ans que l’on tente d’aménager le monopole syndical de négociation afin de développer la négociation d’entreprise, mais ce n’est toujours pas rodé, constate Alexia Alart Mantione, juriste en droit social au sein du réseau de cabinets d’experts-comptables Exco. La loi Rebsamen d’août 2015 apporte ici un souffle nouveau. À suivre… »

Absence de syndicats
Depuis les lois Auroux du début des années 1980 jusqu’à la loi Rebsamen de 2015, le législateur fait la promotion de la négociation d’entreprise, dont il estime qu’elle pourrait prendre le relai de la loi dans la production de normes sociales. Il a même subordonné certains dispositifs à la signature d’un accord d’entreprise (participation, temps de travail au forfait, dépassement du contingent d’heures supplémentaires…). Mais cette idée se heurte à l’absence de syndicats dans les PME et au monopole syndical de négociation. Seules 10 % des entreprises employant entre 11 et 19 salariés disposent d’un délégué syndical ; 20 % de celles de 20 à 49 salariés ; 59 % au-delà (Dares 2011). Or, sans délégué syndical, pas d’accord d’entreprise.
 
Modes alternatifs de négociation
C’est pourquoi le législateur a prévu, à l’adresse notamment des PME, des modes alternatifs de négociation ; la loi travail de 2016 apportera à son tour ses petites pierres à l’édifice. Les modalités varient en fonction des sujets et des négociateurs. Un accord de participation peut ainsi être conclu avec des syndicats, avec le comité d’entreprise ou par ratification des salariés. C’est d’ailleurs sur le sujet de l’épargne salariale que sont signés l’essentiel (90 %) des accords atypiques, qui, eux-mêmes, représentent moins de 20 % des 36 000 accords d’entreprise signés chaque année (DGT, 2014).
En dehors du sujet de la participation, la négociation d’un accord avec des élus obéit à des conditions très strictes, la première étant l’absence de délégué syndical (voir infographie p. 21). Une entreprise dans cette situation peut signer un accord avec des élus mandatés par des organisations syndicales représentatives dans la branche ou au niveau national et après approbation de la majorité des salariés.
À noter que la future loi Travail prévoit d’élargir le mandatement. Les pratiques de mandatement des syndicats n’ayant pas été étudiées depuis les lois Aubry, le phénomène reste obscur. « En général, un employeur n’envoie pas un salarié se faire mandater à la CGT », fait néanmoins remarquer Carlos Moreira, de la fédération de la chimie de la centrale de Montreuil (93).
 
Élus non mandatés
Une autre possibilité, un peu mieux renseignée, consiste à signer un accord avec des élus non mandatés, titulaires, représentant la majorité (50 %) des suffrages aux dernières élections, et après approbation par une commission paritaire de branche. Procédure très stricte, et encore, qui ne concerne que les accords relatifs à des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif, comme, par exemple, les forfaits-jours, et à l’exception des accords portant sur les PSE.

Jusqu’à la loi Rebsamen, seules les entreprises de moins de 200 salariés pouvaient négocier avec des élus non mandatés ; le verrou a, depuis, sauté. Mais la même loi a supprimé la validation tacite des accords (...)

Auteur

  • Emmanuel Franck