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Les députés entérinent la création de commissions renforcées pour les TPE

Liaisons Sociales Magazine | Dialogue Social | publié le : 02.06.2015 | Eric Béal

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En première lecture, les députés ont adopté la loi Rebsamen, qui crée des commissions paritaires régionales interprofessionnelles. Des instances saluées par les syndicats mais violemment combattues par le patronat.

Le projet de loi sur le dialogue social a été adopté à l’Assemblée nationale ce mardi 2 juin en première lecture. Parmi les mesures phares du texte, il prévoit la création de commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI). De nouvelles instances qui s'adressent aux 4,6 millions de salariés travaillant dans une entreprise de moins de onze personnes.

Jusqu'alors dépourvus de tout interlocuteur extérieur, ces travailleurs pourront désormais faire appel à ces commissions, qui seront créées dans chacune des treize nouvelles régions. Y siègeront, pour quatre ans, dix représentants des salariés et dix des employeurs. Le nombre de places attribuées à chaque organisation syndicale sera fonction du score obtenu aux élections professionnelles dans les très petites entreprises (TPE).

Réactions violentes

Prévues pour fonctionner à partir du 1er juillet 2017, les CPRI avaient initialement pour objet de permettre la concertation sur la GPEC, l'emploi, la formation, la santé et les conditions de travail. Elles devaient par ailleurs exercer "des missions opérationnelles de conseil et d'information au bénéfice des salariés et des employeurs".

Mais plusieurs amendements sont venus en modifier les contours et les prérogatives. L'un a élargi leurs compétences à l'égalité professionnelle, au temps partiel et à la mixité des emplois. Un deuxième complète encore la panoplie en incluant la médiation, afin de "faciliter la résolution de conflits individuels ou collectifs n'ayant pas donné lieu à saisine d'une juridiction". Un troisième permet enfin de "faire des propositions en matière d'activités sociales et culturelles". Un moyen d'offrir aux salariés des TPE des avantages semblables à ceux d’un CE, grâce à la mutualisation d'achats auprès de prestataires de services.

Loin de faire l'unanimité, la création des CPRI suscite des réactions violentes chez les représentants du patronat. Particulièrement à la CGPME. « Les TPE ne sont pas des zones de non droit. Il existe un dialogue direct entre le patron et ses salariés auquel une telle institutionnalisation n’apportera rien. D’autant plus que les organisations syndicales ont déjà les moyens de les informer grâce à des campagnes de communication sur le terrain », dénonce Geneviève Roy, vice-présidente de la CGPME en charge des affaires sociales.

Satisfaction syndicale

A l’inverse, les organisations syndicales sont plutôt satisfaites. « Le dialogue social territorial doit être développé et la création des commissions paritaires régionales est une bonne chose », estime ainsi Joseph Touvenel (CFTC). « Actuellement, 80% des recours auprès des prud’hommes sont effectués par des salariés de TPE. Et seuls 10% ont voté en 2012 car nous n'avions pas les moyens de les informer », complète Marie-Alice Medeuf-Andrieu (CGT-FO).

La CGT et la CFDT aussi, se disent satisfaites. Même si la première revendiquait des commissions interdépartementales et la seconde des « commissions multi-professionnelles, rassemblant plusieurs branches de métier ». Reste à préciser le fonctionnement de ces nouvelles instances et à trouver le moyen de les financer. Des précisions absentes du texte de loi qui devraient être apportées par un futur décret, à l'issue du processus parlementaire.

Opposition idéologique

Sans attendre, le patronat s'inquiète. « Certains salariés se porteront candidats uniquement pour bénéficier du statut de salarié protégé. Par ailleurs, ces commissions vont créer des difficultés insolubles pour les entrepreneurs. Imaginez ce que représente l’absence d’un salarié dans une entreprise de moins de 11 personnes », s'insurge Geneviève Roy.

Des arguments que balaient les syndicats. « Cette opposition est purement idéologique et la bagarre surjouée. Les commissions paritaires territoriales de l'artisanat fonctionnent depuis 2010 à la satisfaction de tous », estime Marylise Léon, secrétaire national CFDT. Côté patronal, le contexte pousse à la surenchère. CGPME et Medef cherchent par tous les moyens à séduire les dirigeants de PME, à quelques mois des élections de représentativité prévues pour 2016.

Auteur

  • Eric Béal