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Le repreneur de Findus s'engage sur l'emploi durant trois ans

Liaisons Sociales Magazine | Dialogue Social | publié le : 21.10.2015 | Manuel Jardinaud

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La direction du groupe Findus en France, son futur propriétaire américain et les organisations syndicales signent un accord unique. Qui préserve les emplois, garantit l'activité et sécurise les investissements. Un cas d'école.  

Un accord qui tombe à pic. La ministre du Travail, Myriam El Khomri, l’a bien compris : ce 21 octobre, elle organisait rue de Grenelle la signature de l’accord unanime entre la direction de Findus, son futur propriétaire Nomad Foods et les représentants syndicaux (CFDT et CFE-CGC).

Le texte prévoit l’absence de licenciement collectif contraint pour motif économique sur le site de Boulogne-sur-Mer pendant trois ans (deux ans pour le siège et les forces de vente), le maintien du niveau des volumes de production et un investissement industriel de 7 millions d’euros entre 2016 et 2018.

« Nous avons voulu démontrer que nous souhaitions travailler ensemble, avec la direction, pour assurer la pérennité de l’activité et des emplois », résume Madeleine Castaing, secrétaire CFDT du CCE de Findus, à la sortie de la cérémonie. Pari réussi.

Stratégie syndicale offensive

En lançant un droit d’alerte, les élus avaient pris les devants dès le mois de mai et les rumeurs de rachat de Findus (348 salariés, dont 196 à Boulogne-sur-Mer) par Nomad Foods. Le lobbying commence alors rapidement auprès des acteurs politiques locaux. « Nous avons tout mis en route pour être en position de force pour la négociation », assure Madeleine Castaing.

Une stratégie payante, qui oblige la direction et le futur actionnaire à venir à la table des négociations. Ceux-ci arrivent les mains vides ? Pas grave, l'intersyndicale a planché sur des revendications solides. La principale, une demande de sécurisation des emplois sur cinq ans, ramenée à trois ans dans l’accord final.

« Nomad Foods achète une pépite, en croissance tant sur les volumes de production que sur le chiffres d’affaires et la rentabilité », explique Jean-Pierre Maffini, du cabinet Secafi, qui a accompagné le CCE. Le consultant vante l’approche syndicale, qui a consisté à lier investissement et emploi, et à ne pas se contenter de la simple défense des acquis des salariés.

Des syndicats déjà rompus à ce type de négociation : en 2011, un accord avait permis de restaurer la compétitivité du site en contrepartie de la perte de 10 jours de RTT et d'une nouvelle organisation du travail. « On y avait gagné des investissements », se souvient Corinne Courtois, membre CFDT du CCE de Findus. « On a gardé cette culture du dialogue et de l’échange », confirme Madeleine Castaing. À l'époque, les discussions avaient été autrement plus tendues.

Porte de sortie étroite

Le contexte du rachat était pourtant risqué pour le site. « Nomad Foods, propriétaire d’Iglo, le leader mondial du surgelé, possède quatre usine en Europe avec des capacités de production au moins quatre fois supérieures à celle de Boulogne », rappelle Jean-Pierre Maffini. D’où l’importance de trouver des solutions à moyen terme pour préserver l'usine, la seule de la marque en France.

Pour le nouveau propriétaire, la porte de sortie s'avère étroite en cas de production inférieure aux objectifs. Les engagements pris ne peuvent ainsi être affectés que par « des actions réalisées ou non réalisées par les employées de Boulogne-sur-Mer, ou des événements modifiant de façon substantielle les conditions de marché affectant la pérennité de l’entreprise sur le marché français ». En clair, il faudra que Nomad Foods prouve que l’entreprise est en grande difficulté ou que les salariés ont saboté l'accord.

Faibles contreparties

Les élus ont accepté quelques contreparties assez anecdotiques au regard de l’enjeu. Qui portent sur le processus lui-même : le raccourcissement du délai de consultation (7 semaines), la non-sollicitation de l’intervention du CHSCT, la clôture du droit d’alerte et le respect de clauses de confidentialité. Rien sur les salaires ni sur le temps de travail. De quoi faire des jaloux.

Myriam El Khomri avait donc le sourire lors de la signature. Tout comme les élus des collectivités locales, les dirigeants et les représentants des salariés. L’expression « importance du dialogue social » a été répétée à l’envi, jusqu’à satiété. Un marqueur gouvernemental qui, pour une fois, trouve à s'appliquer dans un rachat à haut risque.

Auteur

  • Manuel Jardinaud