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Le big bang patronal n’aura pas lieu

Liaisons Sociales Magazine | Dialogue Social | publié le : 04.02.2016 | Manuel Jardinaud

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La décision du Conseil constitutionnel de valider le décret sur la représentativité, instaurant le principe "une entreprise, une voix", clôt une séquence tendue entre organisations patronales. Mais elle ne satisfait ni le Medef ni la CGPME qui ont rédigé en coulisses un texte alternatif déjà sur le bureau de la ministre du Travail.

La décision était très attendue chez les patrons. Le 3 février, le Conseil constitutionnel a tranché. Il a jugé conforme le décret sur la représentativité patronale précisant la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale. Celui-ci instaure le principe « une entreprise, une voix » pour mesurer le poids des organisations professionnelles au sein des branches.

Une pondération prenant en compte le nombre de salariés des entreprises adhérentes est uniquement prévue en cas de droit d’opposition à un accord. Une règle contre laquelle s'étaient élevés le Medef ainsi que plusieurs grandes branches comme l'UIMM.

Le système est très favorable aux organisations regroupant de nombreuses TPE et PME. Ce qui a fait l'objet d'une bataille tendue. L’UPA, pour les artisans, s’est donc rapidement félicité de cette décision, qui l’avantage grandement dans certains secteurs. Comme le BTP, où elle pourrait truster l’ensemble des sièges au sein des instances paritaires.

Appel au gouvernement

Mais l’Union des artisans savait pourtant que rien n’était joué. Pour preuve, elle a appelé le gouvernement "à ne pas revenir sur les dispositions de la loi du 5 mars 2014 et à en tirer toutes les conséquences concernant la représentativité patronale ainsi que la répartition des sièges et des crédits au sein de l’organisme de gestion des fonds paritaires".

De son côté, l’UNAPL, pour les professions libérales, pousse également un cri de victoire dans son communiqué. Elle juge en effet la décision favorable à "son ambition d’accéder à une représentativité nationale et interprofessionnelle". Comme l’UPA, elle demande néanmoins au gouvernement d’aller "au bout de sa logique". Traduction : laisser la loi en l’état.


Un front Medef-CGPME

Ces appels du pied montrent la fébrilité des deux organisations au moment de la décision du Conseil constitutionnel. A raison. Car le Medef et la CGPME – qui se sont bien gardés de s’exprimer officiellement sur la décision des Sages – n’ont jamais rompu le dialogue en coulisses. Selon nos informations, ils ont rédigé un texte commun qui instaure une règle plus favorable aux deux organisations. Une sorte de front anti-UPA et anti-UNAPL.

Au final, la mesure de la représentativité dans les branches se fera sur une base mixte : 80% en fonction du nombre de salariés employés par les entreprises adhérentes, 20% en fonction du nombre d'entreprises. Un deal qui favorise au mieux "le statu quo", selon une source interne au Medef.

Pression des grosses fédérations

Sous la pression de l'UIMM menaçant de ne plus adhérer à la CGPME - comme nous l'a confié un habitué de la métallurgie -, l'organisation des petites entreprises a dû se résoudre à reprendre la plume. Au Medef, on confirme le rôle joué par de "grosses fédérations" qui ont pesé de tout leur poids - en clair, menacer de ne plus adhérer à la CGPME - pour obtenir un accord.

Le texte est déjà sur le bureau de la ministre, Myriam El Khomri. Le calendrier joue donc en faveur de Pierre Gattaz et, par ricochet, de François Asselin. Le projet de loi El Khomri, qui doit être présenté en conseil des ministres en mars, constitue un excellent moyen pour faire évoluer le texte. C'est aussi une aubaine pour le gouvernement qui voit d’un mauvais œil un grand chambardement du paysage patronal.

Auteur

  • Manuel Jardinaud