Avec les deux revalorisations du Smic de janvier et mai 2022, 143 branches voient leurs minima passer en dessous du seuil malgré les négociations de revalorisation de 2021 et 2022.
Porter le Smic à 1 500 euros comme le suggère Jean-Luc Mélenchon ? Une fausse bonne idée, selon Laurent Berger. Pour le secrétaire général de la CFDT, "on fait une erreur quand on concentre tout le débat autour du salaire sur la question du Smic", affirmait-il au micro des 4 Vérités de France 2 le 16 mai au matin. La raison ? Depuis la revalorisation, le 1er mai dernier du Smic (porté de fait, après un premier rééquilibrage en janvier 2022 à 1 645,58 euros brut par mois sur la base de 35 heures, soit 1 302,64 euros net), 143 branches professionnelles sur les 171 recensées et comptant plus de 5 000 salariés ont à nouveau des minima inférieurs au salaire minimum. Seules 28 dépassent ce plancher de rémunération.
Et ce, même pour celles qui avaient engagé et conclu des accords de revalorisation salariale sur injonction du Gouvernement à partir de septembre 2021. "Cette revalorisation a automatiquement fait basculer 83 branches en dessous des minima fixés au Smic", calcule-t-on à la CFDT. C’est le cas, par exemple, de celle du bois d’œuvre et de négoce dont l’accord, signé le 28 février dernier, revalorisait les minima bruts à 1 642 euros mensuels pour les plus bas salaires et dont les deux niveaux de rémunérations les plus bas viennent de passer en dessous du seuil du salaire minimal. Idem pour les personnels au sol du transport aérien (1 605 euros brut minimum après revalorisation), la coiffure (1 613 euros), la volaille ou l’esthétique. "C’est le problème : les négociations se font toujours dans l’optique de faire coller les rémunérations minimales au Smic. Donc à chaque revalorisation de celui-ci, les plus bas salaires se retrouvent automatiquement en dessous", indique la CFDT.
Certaines augmentations récemment négociées se hissent cependant au-dessus du seuil plancher. C’est le cas dans les hôtels-cafés-restaurants (HCR) où l’accord conclu en décembre 2021 (augmentations salariales de 16,33 % sauf pour les premiers niveaux où elle n’est que de 5 %) garantit une rémunération minimale de 1 650 euros brut mensuels, soit au-dessus du Smic revalorisé. Même chose pour les architectes, les cinq branches de l’alimentaire, les avocats, les bouchers du commerce (rémunération minimale : 1 717 euros brut mensuels), la transformation laitière, les papiers-cartons, la restauration collective, les télécommunications ou les transporteurs routiers de marchandises, autant de branches ayant vu leurs négociations aboutir en 2022 et dont les minima se situent tout de même au-dessus du Smic. Quant à la nouvelle convention collective de la métallurgie, négociée pendant cinq ans et signée en mars dernier, ses signataires se donnent jusqu’à 2024 pour remettre toutes les grilles salariales et de classification d’équerre.
De quoi faire dire à Laurent Berger que c’est moins la question du montant du Smic que celle du pouvoir d’achat qui importe. Le numéro 1 de la CFDT appelle à ce titre à la tenue d’une "grande conférence sociale sur les salaires et la répartition de la valeur dans les entreprises".