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Thibault Lanxade : "Le partage de la valeur est une forme de rénovation structurante du capitalisme"

Participation | publié le : 23.09.2022 | Benjamin d'Alguerre

Thibault Lanxade, patron du groupe Luminess et ambassadeur de l’intéressement auprès des entreprises.

Crédit photo Bruno Lévy

Olivier Dussopt a invité les partenaires sociaux à négocier sur le partage de la valeur. Pour Thibault Lanxade, patron du groupe Luminess et ambassadeur de l’intéressement auprès des entreprises, un accord conclu fin novembre permettrait une mise en œuvre des premières mesures dès le PLFSS.

L’expression « dividende salarié », dont vous êtes l’auteur, n’apparaît pas dans le document d’orientation adressé aux partenaires sociaux par le ministère du Travail concernant la future négociation sur le partage de la valeur. N’êtes-vous pas trop déçu ?

Thibault Lanxade : Non. Ce qui m’importe, c’est le fond, pas la forme. Le « dividende travail » que je qualifiais dans mon raisonnement de « dividende salarié » figure déjà dans le code du travail, et englobe les notions d’intéressement, de participation et d’épargne salariale. Je suis très content de voir le gouvernement appeler les partenaires sociaux à négocier de sa mise en œuvre et de voir ceux-ci répondre, pour la plupart, favorablement à cet appel.

Pensez-vous que le timing choisi par Olivier Dussopt soit le bon ?

T.L : Oui et non. C’est un marqueur fort du gouvernement sur sa volonté de faire atterrir la promesse présidentielle et, en ça, le fait que les délais soient courts imposent à chacun de se positionner vite sur le sujet. En revanche, s’il s’agit de porter un véritable projet ambitieux et novateur qui repense notre modèle actuel pour aller vers un capitalisme rénové, il faudra laisser du temps aux syndicats. L’urgence a été traitée dans la Loi pouvoir d’achat, laissons le temps aux partenaires sociaux de s’emparer de ce sujet. S’ils ne le font, cela reviendra à la main du gouvernement avec des éléments qui pourraient être intégrés dans le projet de loi de finance de la sécurité sociale (PLFSS) en novembre prochain.

Plusieurs organisations syndicales reprochent au document d’orientation du gouvernement de ne pas ouvrir la négociation sur les questions d’augmentations de salaires et de hausse du SMIC. Qu’en pensez-vous ?

T.L : Il ne s’agit pas de la même chose. Les augmentations salariales s’inscrivent dans le temps court et dans le cadre des négociations annuelles obligatoires (NAO) propres à chaque entreprise. Quant à la hausse du SMIC, c’est un outil aux mains de l’Etat pour faire face à la conjoncture économique. Je ne vois pas tellement comment intégrer ces sujets à une négociation interprofessionnelle sur le partage de la valeur. C’est un sujet qui s’inscrit dans le temps long. Les premiers débats sur la participation et l’intéressement se sont tenus en 1967, il y a plus de 50 ans. L’enjeu, c’est une forme de rénovation structurante du capitalisme, pas d’apporter des réponses à des tensions immédiates en matière de pouvoir d’achat ou d’emploi. Pour envisager le partage de la valeur, il faut l’aligner sur la production de cette valeur. Cela ne s’envisage pas au mois le mois.

Comment voyez-vous se dérouler les NAO 2023. Avec les augmentations des tarifs de l’énergie et de certaines matières premières, n’y-a-t-il pas de risques que certains employeurs ne gèlent les augmentations de salaires ?

T.L : Oui, cela pourrait être le cas dans certaines entreprises. Tout va dépendre des secteurs. Un maraîcher qui va voir sa facture de chauffage augmenter au risque de mettre sa production en danger pourrait être contraint de geler les rémunérations. Idem dans le bâtiment où le manque de matières premières et la flambée des coûts de l’énergie peuvent jouer sur les NAO. En revanche, dans d’autres secteurs encore portés par une dynamique de croissance, la situation devrait être différente. Certaines seront plus épargnéesdes risques énergétiques que d’autres.

Vous avez été vice-président du Medef à l’époque de Pierre Gattaz. Si Geoffroy Roux de Bézieux vous appelle pour conduire la délégation patronale lors de cette négociation sur le partage de la valeur, accepterez-vous ?

T.L : Aujourd’hui, je consacre l’essentiel de mon temps à mon entreprise, à la mission d’ambassadeur à l’intéressement et à la participation que m’a confié le gouvernement ainsi qu’à mon mandat de Président du Conseil d’Administration de la Caisse Nationale des Ursaff. Si on m’appelle, je déclinerai.

 

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre