Organisation du travail, formation, partage de la valeur… l’Institut de l’Entreprise, au terme d’un travail collaboratif entre entreprises et citoyens, a conçu une série de propositions adressées aux candidats à l’Élysée.
Qu’un think tank patronal pose ses propositions sur la table à l’occasion d’une présidentielle n’a rien d’extraordinaire. Que le même fasse préalablement « tester » et réviser son programme auprès d’une cinquantaine de chefs d’entreprise et de 120 simples citoyens, c’est en revanche inédit ! Telle est cependant la méthode de travail choisie par l’Institut de l’Entreprise, en collaboration avec le sondeur Elabe, pour accoucher de quinze propositions sur l’employabilité, la QVT, le partage de la valeur ajoutée et la transition énergétique adressées à une dizaine de candidats à l’Élysée. Une démarche collaborative logique, assure Antoine Frérot (photo), PDG de Veolia et président de l’Institut puisqu’elle vise à « rapprocher le citoyen de l’entreprise ».
Des avantages fiscaux pour les entreprises qui investissent dans la formation
Comment ? En renforçant dès le départ les liens entre école et entreprise dans un cadre partenarial, par exemple, répond l’Institut, qui milite pour que ces deux mondes apprennent à se parler, que ce soit en inscrivant au cursus de formation des profs un certain nombre de visites en entreprises ou en permettant à des représentants des employeurs de venir présenter leurs métiers devant les classes. Mais aussi en renforçant le rôle formateur de l’entreprise afin de mieux faciliter les transitions professionnelles de leurs salariés. À ce titre, une proposition choc : « labelliser et octroyer des avantages financiers aux entreprises investissant au moins 25 % de plus que la moyenne nationale dans des formations certifiantes/diplômantes. Et ce, par catégories d’entreprises (TPE, PME, ETI, grands groupes), à tous les niveaux de leur organisation et pour tous les types de formations certifiantes/diplômantes (hard skills et soft skills) », avance l’Institut de l’Entreprise, qui voit dans cette ambition « un nouveau pilier du contrat social ». Initiative qui s’accompagnerait d’un assouplissement des règles d’inscription des certifications internes des entreprises à Répertoire national de la qualification professionnelle (RNCP) de France Compétences et de la possibilité pour les opérateurs de compétences (OPCO) de financer plus facilement les formations conçues par les entreprises elles-mêmes.
Nouveaux modes de travail
Difficile pour une structure patronale de faire abstraction des deux années écoulées marquées par la pandémie et sa profonde influence sur la réorganisation du travail à marche forcée… Le télétravail ? Désormais entré dans les habitudes des salariés, sa pratique demande une sérieuse refonte de la législation en vigueur afin de permettre de sécuriser les deux parties, employés et employeurs. L’individualisation des horaires de travail aux besoins de chaque collaborateur ? Oui... mais à condition de refondre, là encore, un cadre réglementaire rendu obsolète par la pandémie et qui exige l’avis conforme des CSE, voire de l’Inspection du travail pour favoriser les arrangements de gré à gré entre patrons et salariés. Surtout, le gros morceau des propositions présentées par l’Institut du travail verrait la frontière stricte entre salariés et travailleurs indépendants s’effacer au profit d’un « socle de droits » portables et commun à ces deux catégories qui permettrait d'effectuer les transitions entre les statuts selon un système de « passerelles sécurisées » encore à inventer. À quoi s’ajoutent plusieurs dispositions en faveur du bien être au travail, comme la formation systématique des managers à la prévention des risques psycho-sociaux ou un développement du partage de la valeur dans les entreprises par la simplification de la mise en place des dispositifs d’intéressement de participation et d’épargne salariale, la création d’un « guichet unique » pour les PME-TPE leur proposant notamment des accords-types et une nouvelle réduction du forfait social.
Transition écologique
Et puisque l’entreprise de demain doit être plus verte qu’aujourd’hui, l’Institut entend bien interroger les candidats à la présidentielle sur fléchage qu’ils imaginent pour les ressources issues de la fiscalité vers les besoins de transition énergétique et climatique. Les rédacteurs des quinze propositions, eux, demandent notamment une meilleure prise en compte des efforts écologiques réalisés par les entreprises dans la commande publique ou la création « d’une administration de mission, permettant aux entreprises et aux filières de bénéficier d’une meilleure coordination publique, afin de faire avancer plus vite et plus efficacement les nombreux projets techniques, financiers ou éducatifs en faveur de la transition énergétique et climatique ». À voir si, le 21 février prochain, les principaux concernés, invités à entendre les propositions patronales lors d’un événement organisé conjointement par le Medef et CCI France, auront des réponses à apporter…