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Les grands dossiers à l’agenda de Patrick Martin

Organisations patronales | publié le : 06.07.2023 | Benjamin d'Alguerre

Patrick Martin, président du Medef.

Patrick Martin, président du Medef.

Crédit photo DR

Patrick Martin vient d’être élu président du Medef pour les cinq années à venir. Dès sa prise de fonction le 17 juillet, le nouveau patron des patrons va devoir s’atteler à renouveler son état-major au sein de l’organisation, enchaîner sur les premières négociations du nouvel agenda social et remettre en marche le mouvement sur le plan de la production doctrinale. 

Il n’y aura finalement pas eu de surprise. Suite au vote final des « grands électeurs » du Medef réunis le 6 juin au Hangar Y à Meudon – la salle de la Mutualité, à Paris, choisie il y a cinq ans pour la précédente réunion de l’Assemblée générale de l’organisation, étant désormais trop petite pour accueillir ce corps électoral élargi à 1 100 votants – c’est l’ultra-favori Patrick Martin qui a été choisi pour succéder pour cinq ans à Geoffroy Roux de Bézieux. Avec 73,98 % des suffrages, le Rhônalpin de 63 ans a largement triomphé de sa challenger, Dominique Carlac’h qui, comme lui, faisait partie de l’exécutif sortant.

Adoubé par les fédés et les territoires

Il faut dire que ces derniers mois, les soutiens s’étaient multipliés autour de la candidature de l’ancien président du Medef Auvergne-Rhône-Alpes, qui a passé sa campagne à ratisser le terrain pour rameuter à lui les fédérations et les Medef territoriaux. Métallurgie, bâtiment, plasturgie, banques, assurances… les faiseuses de roi se sont rapidement orientées vers le bulletin Martin, suivies par les fédérations plus petites et la plupart des Medef territoriaux. Sa concurrente aura eu beau aligner de son côté les soutiens de poids, de Jean-Dominique Sénard, patron de Renault à Christel Heydemann, directrice générale d’Orange, et réussi à fédérer autour d’elle tous les anciens candidats à la présidence ayant jeté l’éponge avant terme (Pierre Brajeux, Guillaume Cairou et Olivier Klotz), cela n’aura pas réussi à faire pencher la balance en sa faveur. « Dominique Carlac’h a choisi d’aller chercher ses soutiens chez les "peoples" du grand patronat. C’était futé comme stratégie, car les grandes fédés et les Medef territoriaux, très traditionnalistes, avaient toutes les chances de soutenir Patrick Martin, numéro deux du mouvement et adoubé discrètement par le président sortant », analyse un fin connaisseur des arcanes patronales. Futé… mais insuffisant pour l’ancienne championne d’athlétisme, qui n’aura pas réussi à créer la surprise dans cette élection.

Incarner le Medef pendant cinq ans

Ancien rival de Geoffroy Roux de Bézieux en 2018 avant de se rallier à sa bannière dans la dernière ligne droite, Patrick Martin a occupé ces cinq dernières années la fonction – créée spécialement pour lui – de « président délégué » du Medef. Un poste qui l’a amené à parfois s’impliquer directement sur certains dossiers, comme la formation professionnelle en début de mandat ou les PGE durant la crise sanitaire, mais aussi à se retrouver sous le feu des médias… pas toujours de son plein gré. Ainsi, l’affaire des surfacturations des prestations des mandataires judiciaires de l’AGS, le régime de garantie des salaires dont il est administrateur, révélée par la presse en début d’année, a éclaboussé sa campagne sans qu’aucune charge n’ait pu néanmois être retenue contre lui. Aujourd’hui encore, cette histoire fait grincer des dents parmi ses supporters. « Un coup de barbouzard pour lui nuire ! » s’agace-t-on dans son entourage.

À 63 ans, Patrick Martin est le premier dirigeant d'un Medef territorial à prendre la présidence du Mouvement. Ni superstar patronale, ni président de fédération, ce Lyonnais, qui a repris l’entreprise familiale – Martin-Belaysoud, spécialisée dans la distribution professionnelle – en 1987 pour en faire l’un des leaders du secteur, va devoir se faire une place au soleil. Et incarner l’organisation patronale pendant les cinq années, quitte à multiplier les coups de gueule contre des leaders syndicaux avec lesquels il entretient au naturel des rapports plutôt cordiaux, Frédéric Souillot (FO) et Marylise Léon (CFDT) en tête.

Agenda social, Medef Lab et vice-présidente aux idées et à la prospective

Car, d’ores et déjà, les dossiers s’accumulent sur ce qui devient désormais son bureau – la passation officielle de pouvoir aura lieu le 17 juillet – au dernier étage du 55, avenue Bosquet, à Paris. Pas le temps de souffler : il va falloir s’attaquer dès la rentrée au second volet de l’agenda autonome des partenaires sociaux, dont le programme vient d'être bouclé par son prédécesseur, avec ses homologues de la CPME et de l’U2P, ainsi qu’avec les dirigeants des organisations syndicales. Et le calendrier est chargé : gouvernance des groupes de protection sociale qui doit commencer dès cet été ; convention quadriennale Agirc-Arrco prévue pour s’engager à la rentrée ; lancement du comité de suivi de l’ANI télétravail de 2020 : lancement du comité paritaire de transposition de l’ANI sur le partage de la valeur ; diagnostic sur la prévoyance des non-cadres et valorisation des parcours syndicaux. Autant de négociations à venir pour lesquelles il va falloir trouver des négociateurs patronaux dans le cadre d’un état-major du Medef à reconstituer d’urgence.

C’est d’ailleurs l’autre défi immédiat qui attend Patrick Martin : renouveler l’exécutif de l’organisation et y faire revenir les penseurs susceptibles de redonner une colonne vertébrale doctrinale à l’organisation. Une absence qui a lourdement pesé ces cinq dernières années au sein d’un Medef qui s’est un peu laissé porter par les réformes initiées par l’exécutif et qui allaient dans son sens. Mais alors que, galvanisés par la lutte contre la réforme des retraites, les syndicats ont retrouvé du poil de la bête, le Medef, lui, s’est un peu endormi dans un confort ouaté… Si le nouveau patron des patrons entend bien continuer à accompagner le Gouvernement dans ses réformes de baisse du coût du travail et d’augmentation de l’âge légal de départ à la retraite, il sait que le mouvement va devoir recommencer à phosphorer. Dans son programme, Patrick Martin entendait mettre sur pied un « Medef lab » chargé, en collaboration avec différents think tanks, de faire revenir les intellos rue Bosquet. Et même de créer un poste inédit de vice-présidente en charge des idées et de la prospective, qu’il compte proposer à « une femme entrepreneuse de haut niveau ». Tout un programme. 

 

 

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre