Pour conserver ses salariés seniors un peu plus longtemps et leur permettre de se préparer au changement de vie qu’est la retraite, l’éditeur de solutions RH a mis en place une nouvelle politique, négociée dans le dernier accord de gestion des emplois et des parcours professionnels.
Le Gouvernement, qui s’est fixé pour objectif le plein-emploi à l’horizon 2027, ne pourra y parvenir sans les entreprises, en particulier en ce qui concerne l’emploi des seniors… Or, seules 53,8 % des personnes âgées de 55 à 64 ans travaillaient en 2020, selon les données de la Dares, publiées en avril 2022. Un taux en progression depuis 15 ans (38 % en 2003), certes, mais qui laisse la France en dessous de la moyenne européenne (60 %)…
Alors que le chantier de la réforme des retraites est en cours, « nous avons réfléchi à l’accompagnement de nos collaborateurs en fin de carrière, mais aussi aux conditions pour les aider à rester en emploi, déclare Élodie Gourmellet (photo), directrice des ressources humaines du groupe ADP, éditeur de solutions RH. Chaque entreprise a son rôle à jouer pour accompagner les seniors, d’autant que certains ont passé l’intégralité de leur carrière chez nous ». ADP compte une centaine de collaborateurs âgés de plus de 60 ans, sur 2 100 en France, avec une moyenne d’âge de 47 ans.
L’entreprise prévoyait déjà le maintien des cotisations retraite sur la base d’un salaire à taux plein pour les seniors de plus de 55 ans qui choisissaient le temps partiel à 80 %. La négociation du nouvel accord de gestion des emplois et des parcours professionnels, signé en avril dernier par trois syndicats sur cinq (la CFDT, la CFTC et l’UNSA, la CFE-CGC et la CGT l’ayant refusé) et entré en vigueur le 1er juillet, permet d’aller plus loin. D’abord, le maintien des cotisations a été élargi aux salariés seniors qui choisissent de travailler à 90 %. Ensuite, les plus de 60 ans bénéficient désormais d’un accompagnement pour préparer leur retraite. ADP propose ainsi une réunion d’information collective.
Chaque salarié peut ultérieurement demander un entretien individuel avec un conseiller retraite de Malakoff Médéric. Des rendez-vous qui permettent d’aborder « les fondamentaux de la retraite, les questions de famille, de transmission et de santé », détaille Élodie Gourmellet. Un bilan de prévention psycho-médico-sociale avec un médecin est également proposé.
« Projet Association »
Si ADP veut permettre à ses collaborateurs seniors de se projeter dans l’après, son but est aussi d’assurer leur maintien dans l’emploi et la transmission de leurs compétences. La troisième mesure du volet senior de l’accord vise à y répondre. ADP propose en effet un « projet association ». « L’initiative est venue des partenaires sociaux, nous n’y avions pas pensé », avoue Élodie Gourmellet, qui se dit fière de cet accord coconstruit. Les seniors dont le départ est prévu dans l’année peuvent ainsi s’investir dans une association, proposée par le salarié et validée par l’entreprise, pendant six jours d’absence rémunérés. « Nous vérifions le caractère d’intérêt général de la structure, qui doit illustrer les valeurs d’inclusion et de diversité d’ADP », précise la DRH.
Penser à tous les détails
En charge des audits chez ADP et salariée de l’entreprise depuis 21 ans, Marine Aupretre, 60 ans, a participé au programme, au contenu « extrêmement intéressant », dit-elle. « Être à plusieurs permet d’avoir des réponses à des questions auxquelles on n’aurait pas forcément pensé », poursuit-elle, comme des informations liées au décès ou au testament. « Je m’en étais déjà occupée, mais c’est bien d’y songer au moment où l’on aborde cette troisième vie », ajoute-t-elle. Elle envisage de partir au premier trimestre 2024. « Cela va arriver vite et j’estime qu’il est important de se pencher sur tous les éléments de la retraite. Je vais demander un rendez-vous personnel, car il y a nombre de détails à vérifier, dont le dispositif de carrière longue et le montant que je vais toucher », complète Martine Aupretre, qui projette de rejoindre sa sœur malade à Pau et de s’occuper de ses nièces et de leurs enfants. Elle n’aura pas le temps, dans sa fin de carrière et après, pour des associations, mais trouve le projet intéressant, « car certaines personnes peuvent se sentir perdues, dit-elle, quand on n’a pas de jardin, pas d’enfants, de petits-enfants ni d’amis à aller voir, se retrouver dans son appartement, ce n’est pas top », relève-t-elle.
La collaboratrice souhaiterait cependant bénéficier d’un accompagnement individuel, par un cabinet spécialisé, pour remplir le dossier de retraite et en assurer le suivi. « Je ne sais pas si cela se fait ailleurs, c’est très spécifique. Être aidé par un professionnel serait un plus », ajoute-t-elle.
Retrouvez cet article dans le numéro 1 607 d’Entreprise & Carrières