Ministère du Travail et partenaires sociaux engagent lundi 17 octobre leur concertation sur la modulation des conditions d’accès à l’assurance-chômage. La discussion en trois séances réparties sur un mois et demi doit s’achever en novembre, dans un contexte où l’hostilité des syndicats semble pour l’instant unanime.
Concertation sur la réforme de l’assurance-chômage : c’est parti ! Lundi 17 octobre, de 9 h à 11 h, Olivier Dussopt recevra les partenaires sociaux au ministère du Travail pour engager la première réunion visant à déterminer les conditions économiques et sociales permettant de déclencher la modulation de l’indemnité-chômage selon les termes décrits dans le projet de loi "mesures d’urgence en vue du plein-emploi" voté le 11 octobre dernier en première lecture à l’Assemblée nationale.
Marche forcée
À en croire l’agenda communiqué aux organisations syndicales et patronales, la concertation se déroulera à marche forcée. Devant s’achever fin novembre, elle comprendra en tout trois réunions, en comptant celle de du 17 octobre. À ce stade, cependant, une incertitude pèse sur les discussions, à savoir celle de la participation – ou non – de la CGT aux débats. La centrale de Montreuil ayant annoncé le 12 octobre qu’elle boycotterait toutes les concertations en soutien aux salariés des raffineries en grève pour des augmentations de salaires.
En matière de concertation, le leitmotiv du Gouvernement n’a pas changé, souhaitant rendre les critères d’accès à l’assurance-chômage "plus stricts quand trop d'emplois sont non pourvus, plus généreux quand le chômage est élevé", selon les termes d’Emmanuel Macron durant sa campagne présidentielle, repris depuis par le député Renaissance Marc Ferracci, rapporteur du projet de loi durant l’examen parlementaire au Palais-Bourbon. En clair : en dépit d’une première réforme de 2019 qui a augmenté à six mois de travail le seuil d’accès à l’indemnisation, la France "dispose toujours de conditions d’accès à l’assurance-chômage parmi les moins contraignantes d’Europe". Associée à une durée d’indemnisation pouvant monter jusqu’à 24 mois pour un demandeur d’emploi, cette situation n’inciterait pas un retour rapide à l’emploi. Les syndicats de salariés dénoncent pour leur part une logique purement "adéquationniste" selon laquelle n’importe quel chômeur pourrait occuper n’importe quel emploi, indépendamment de ses qualifications, et en fonction des besoins du marché du travail. "Le Gouvernement veut s’inspirer du modèle canadien… alors que ce modèle est fortement interrogé au Canada", glisse un économiste expert des questions d’assurance-chômage.
Comité d’experts
Si, à ce stade, l’hypothèse d’un consensus demeure peu probable, le ministère du Travail a demandé aux partenaires sociaux de plancher sur trois thèmes précis. Primo : dresser un état des lieux du marché du travail et réaliser un diagnostic sur la hausse des difficultés de recrutement des entreprises. Secundo : quels sont les paramètres de l’assurance-chômage qui pourraient être modifiés en fonction de la conjoncture. Tertio : fixer les critères et modalités du déclenchement du passage aux différentes règles et définir l’ampleur des variations à prévoir. Une nouveauté figure cependant dans le document transmis par le ministère du Travail aux organisations syndicales et patronales : la possible saisine d’un comité d’experts qui pourrait rendre un avis consultatif sur les modulations de l’assurance-chômage en amont de la publication du décret instaurant les nouvelles règles du jeu.
Outre ces débats à venir, la question de la territorialisation de la modulation demeure posée. Au Canada, dont le gouvernement s’inspire, soixante-deux systèmes de variation territoriale de l’assurance-chômage cohabitent. De ce côté de l’Atlantique, un amendement au projet de loi déposé par le député de Guadeloupe Olivier Serva et voté par l’Assemblée nationale a acté le principe d’une modulation spécifique pour les territoires d’Outre-Mer. Une mesure susceptible de rompre le principe d’égalité des citoyens devant la loi et d’unicité de la République. "Un débat juridique est nécessaire sur cette question", estime le ministère du Travail quoique "néanmoins, en vertu des deux premiers alinéas de l'article 73 de la Constitution, la situation des départements et les régions d'outre-mer au regard des caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités peut être regardée comme spécifique". À suivre.