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La durée d’indemnisation réduite de 25% en cas de tensions sur l'emploi

Assurance chômage | publié le : 21.11.2022 | Benjamin d'Alguerre

Les nouvelles règles de l’assurance chômage entreront en vigueur le 1er février prochain. En cas de fortes tensions sur l’emploi, la durée d’indemnisation baissera de 25%. Certaines professions et les territoires d’outre-mer sont épargnés, mais pas les seniors.

Patronat heureux, syndicats furieux. Le lundi 21 novembre au matin, à l’issue de la présentation de la nouvelle réforme de l’assurance chômage aux partenaires sociaux par Olivier Dussopt, c’était un peu « deux salles, deux ambiances » au ministère du Travail. Côté syndical, on dénonce unanimement une réforme « punitive » qui ne réglera pas les problèmes des tensions sur l’emploi; tandis que dans le camp des employeurs, on salue une réforme qui permettra aux entreprises de trouver les compétences dont elles manquent cruellement. « Il est anormal d’avoir un marché du travail si tendu alors que l’on compte plus de six millions d’inscrits à Pôle emploi », lançait Éric Chevée, vice-président de la CPME en charge des Affaires sociales depuis le perron de l’hôtel du Châtelet juste après l’ultime multilatérale, qui concluait un cycle de concertations entre le ministère et les partenaires sociaux, entamé le 17 octobre dernier. Même l’U2P, critique au départ envers la réforme, s’y est finalement ralliée tout en reconnaissant que les dispositions présentées par Olivier Dussopt avaient peu de chance de réellement régler les problèmes de recrutement des artisans et professionnels libéraux.

Exceptions

En tous cas, l’affaire aura été bouclée en un temps record. Moins d’une semaine après le vote du projet de loi « marché du travail » au Parlement, Olivier Dussopt présentait les contours des nouvelles règles d’indemnisation du chômage selon le principe de la contracyclicité. Sur le fond, l’exécutif est demeuré d’équerre avec ses annonces initiales du mois de juillet, à savoir une durée d’indemnisation resserrée en cas de bonne situation économique et plus étendue en cas de fortes pressions sur l’emploi. Conformément aux promesses, le montant de l’indemnité ne sera pas affecté par la réforme. Pas plus qu’elle ne s’appliquera dans les territoires d’outre-mer au vu de la situation déjà critique de l’emploi. Les catégories déjà exclues de la réforme de 2019 (dockers, marins-pêcheurs, intermittents du spectacle, expatriés et demandeurs d’emploi engagés dans un contrat de sécurisation professionnelle) ne seront pas concernées par les nouvelles règles. En revanche, la territorialisation de la modulation des règles de l’assurance chômage, un temps espérée par les élus locaux, sera également passée à la trappe. « Il aurait été trop difficile de l’adapter à chaque bassin d’emploi », confessait le ministre du Travail. Verdict: la réforme s’appliquera d’une manière uniforme en métropole en fonction des indicateurs retenus au niveau national.

Garde-fous

Concrètement, les demandeurs d’emploi entrant dans le régime d’assurance-chômage à partir du 1er février prochain verront leur durée d’indemnisation diminuer de 25%. En clair, « un demandeur d’emploi qui a cotisé vingt-quatre mois sera indemnisé dix-huit », a détaillé le ministre. La mesure paraît rude, mais plusieurs garde-fous ont cependant été intégrés à la réforme. Primo: les droits des allocataires seront pleinement rétablis si le chômage passe en période « rouge », c’est-à-dire s’il dépasse les 9% – contre 7,3% aujourd’hui – selon les critères du Bureau international du travail, ou s’il augmente de 0,8 point sur un seul trimestre. Secundo: une période d’indemnisation minimale de six mois est garantie. Tertio: afin de protéger les demandeurs d’emploi n’ayant pas retrouvé de travail et arrivant en fin de droit en période « rouge », leur durée d’indemnisation sera prolongée de 25% « à hauteur de la réduction initiale liée à l’application du coefficient de conversion ». Quarto: pour repasser dans le vert, les indicateurs devront être inférieurs aux seuils fixés pendant trois trimestres et en cas d’atteinte du plein-emploi, des cliquets plus sévères pourraient même être appliqués. Une absence de poids parmi ces dispositifs de sécurité: il n'y a pas de dispositif spécifique concernant les seniors, qui seront donc soumis aux mêmes règles que les autres demandeurs d'emploi, alors qu’ils appartiennent à une catégorie particulièrement touchée par le chômage de longue durée.

Négociations

Selon Olivier Dussopt, l’application de la réforme devrait permettre la création de « 100.000 à 150.000 emplois nouveaux » – à titre de comparaison, 83.000 l’ont été lors du dernier trimestre – et générer quelque 4 milliards d’euros d’économies pour l’Unédic. Les règles présentées par le ministre du Travail seront valables, mais d’ici là, les partenaires sociaux seront invités, fin 2023, à réengager une nouvelle négociation sur la prochaine convention d’assurance chômage. Ils ont la possibilité de modifier le seuil de déclenchement de la modulation de la durée d’indemnisation, le taux ou le coefficient… mais pas le principe de la contracyclicité, inscrit dans le marbre. Ce n’est d’ailleurs pas le seul sujet dont les partenaires sociaux ont été invités à s’emparer par Olivier Dussopt, puisqu’ils sont désormais incités à se pencher sur l’épineuse question de la gouvernance de l’Unédic, ce que les organisations syndicales perçoivent déjà comme l’amorce de l’étatisation du régime.

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre