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L’égalité professionnelle avance à tout, tout petits pas

Liaisons Sociales Magazine | Management | publié le : 14.10.2015 | Anne-Cécile Geoffroy

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La France ne parvient toujours pas à assurer une égalité réelle entre les femmes et les hommes au travail. Malgré les sanctions.

Une campagne de testing du ministère du Travail sur les discriminations, une mission de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) pour mesurer et comprendre les écarts de salaires entre les hommes et les femmes… Tout juste nommée rue de Grenelle, Myriam El Khomri, épaulée par Pascale Boistard, secrétaire d’état chargée des Droits des femmes, s’attaque à son tour aux inégalités professionnelles.

Un sujet documenté depuis des années mais qui piétine. En France, l’écart de salaire net en équivalent temps plein s’élève encore à 19% dans le secteur privé. Malgré l’instauration obligatoire, depuis 2006, d’accords ou, à défaut, de plans d’action dans les entreprises d’au moins 50 salariés. Malgré, aussi, la loi du 4 mai 2014 qui interdit l’accès aux marchés publics des sociétés qui ne respectent pas leurs obligations légales. «Nous ne comprenons pas la persistance d’un écart de salaire une fois neutralisés le temps partiel, la moindre rémunération de certains secteurs d’activité et le plus faible accès des femmes aux postes à responsabilités», avoue-t-on au secrétariat d’état des Droits des femmes.

Opacité

Dans le cadre de sa mission, l’Igas est chargée d’analyser les outils utilisés par les entreprises dans la gestion des carrières. Mais aussi de faire des recommandations pour les aider à déconstruire les stéréotypes qui peuvent biaiser leurs efforts. «Malgré tout, les choses changent un peu, souligne avec un optimisme mesuré Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités.

Pendant des années, on a vu l’écart de salaire stagner. Depuis deux ans, il se réduit.» Une bonne nouvelle qu’explique, selon lui, davantage la propension des jeunes filles à suivre des études supérieures que l’effet des accords ou des chartes d’entreprise.

Pour Julien Bayou, conseiller régional Europe écologie-Les Verts en Île-de-France, c’est le manque de transparence qui freine l’avènement d’une égalité salariale réelle entre les deux sexes. Car la loi de 2006 a beau permettre de sanctionner les entreprises non couvertes par un accord ou un plan d’action à hauteur de 1% de leur masse salariale, elle ne prévoit pas de dresser la liste des mauvais élèves.

Liste cachée

Le recours au name and shame pourrait pourtant faire des dégâts. Avant l’été, seules 38 % des entreprises assujetties étaient couvertes. Et mi-mai, quelque 1800 mises en demeure avaient été prononcées. Les pénalités financières? Seules 60 y avaient eu droit! En juillet, l’élu écolo a fait adopter un amendement permettant au président du conseil régional de saisir la Direccte francilienne pour obtenir copie de la liste des entreprises sanctionnées. «J’ai parallèlement saisi la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) pour avoir les noms des entreprises vertueuses. En cas d’avis favorable, le ministère du Travail devra obtempérer dans le mois», assure-t-il. Réponse fin septembre, après la réunion de la Cada sur le sujet.

«Les sanctions n’y changeront rien. Il faut avant tout faire évoluer les mentalités en entreprise. Les stéréotypes perdurent du côté des employeurs et du côté des femmes. Celles-ci n’osent pas prendre de responsabilités», répond Françoise Holder, présidente de l’association Force Femmes qui épaule les plus de 45 ans privées d’emploi. La patronne du groupe Holder regrette que la loi Copé-Zimmermann n’ait pas imposé un quota de femmes dans les comités de direction, comme elle l’a fait pour les conseils d’administration.

La solution viendrait-elle des hommes? De ceux qui trustent les postes de direction? C’est l’idée défendue par Antoine de Gabrielli, dirigeant du cabinet conseil Companeiros et fondateur des cercles d’hommes Happy Men. «Les grandes entreprises jouent sur la formation, créent des réseaux de femmes. Mais ne faire que ça revient à leur dire que si elles n’obtiennent pas l’égalité, c’est de leur faute», explique-t-il. Lui a convaincu dix entreprises d’accueillir des… cercles d’hommes. Objectif: leur faire prendre conscience que mixité est synonyme d’efficacité. Et leur  permettre de revendiquer un meilleur équilibre entre vie privée et travail, en toute légitimité.

Auteur

  • Anne-Cécile Geoffroy