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“Le management des hommes fait partie de mon métier”

Liaisons Sociales Magazine | Management | publié le : 27.04.2015 | Eric Béal

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A la tête de l'ETI depuis vingt ans, le P-DG de l'entreprise de rcyclage Paprec revient sur son style de management, au paternalisme revendiqué. Il pointe aussi les failles de la politique d'aides à l'embauche du gouvernement qui pénaliserait les entreprises qui ont une politique de rémunération élevée.

Vous vous impliquez beaucoup dans le management des équipes et des hommes. Quelle est votre méthode?
Tous les cadres et agents de maîtrise ont eu au moins un entretien en tête à tête avec moi. Je visite quarante usines du groupe chaque année. Il est important que les employés me connaissent et puissent parler avec moi. Par ailleurs, ça me fait plaisir d’échanger avec des gens qui travaillent pour moi. C’est vrai pour les autres membres du comité directeur. Nous nous arrangeons pour que l’un d’entre nous soit présent à la fête du Nouvel An de chaque entité juridique du groupe afin de pouvoir répondre à toutes les questions. Je considère que le management des hommes fait partie de mon métier de P-DG. Si, ces dernières années, on a pu constater le cynisme de certains dirigeants et le regretter, ce n’est pas le cas pour la plupart. Et, dans une entreprise de taille intermédiaire à ­capital familial comme Paprec, la direction est proche de son personnel.

Peut-on qualifier ce management de paternaliste?

J’assume ce terme, mais je n’en revendique qu’une partie. Il est vrai que je me préoccupe des conditions de vie de mes collaborateurs. Je n’hésite jamais à investir dans des locaux propres et modernes. Nous fournissons des vêtements de travail ainsi que tout le matériel nécessaire à la protec­tion individuelle. Nous n’hésitons pas non plus à venir en aide aux salariés qui ont des difficultés, par exemple pour se loger. Mais je récuse toute intervention concernant ce qu’ils doivent penser ou comment ils doivent voter.
Vous avez adopté l’an dernier une charte de la laïcité très restrictive, qui a fait couler beaucoup d’encre…
Je souhaite que les entreprises privées puissent, comme le secteur public, affirmer des principes de laïcité en leur sein. Au nom de la paix sociale. Depuis l’an dernier, rien n’a évolué d’un point de vue législatif. Mais l’histoire n’est pas finie. Le président du Sénat a l’intention de pousser la réflexion sur le sujet au sein de son assemblée et plusieurs députés sont favorables à l’application de la laïcité dans les entreprises.

Certains syndicalistes vous accusent de choisir vos interlocuteurs.

Vous trouverez un grand choix de sigles chez Paprec : CGT, CFDT, CFTC, Unsa. Simplement, nous sommes attachés à un dialogue social constructif avec des interlocuteurs qui acceptent de prendre en compte les contraintes commerciales et financières. Si quelqu’un vient me voir avec des intentions politiques et fonde son action sur la lutte des classes, je dis non. Nous avons rencontré ce genre de situation lors d’un rachat d’entreprise. Nous n’avons alors pas hésité à faire comprendre aux intéressés qu’ils n’avaient pas leur place dans notre société.

Que pensez-vous de l’échec des négociations sur le dialogue social?

C’est malheureux car je pense, comme le Medef, qu’une modernisation est nécessaire. Il faudrait réduire le nombre de seuils sociaux et diminuer les obligations légales ou le nombre d’instances. Sur la base d’un vote majoritaire en entreprise. Pour adopter un système qui privilégie la concertation en entreprise, il faudrait aussi pouvoir créer des CHSCT communs à plusieurs sites. De même, l’utilisation du 0,2 % pour financer le fonctionnement du CE devrait être assouplie. Nous avons besoin de plus de souplesse, même s’il est normal que l’État encadre par la loi.

Soutenez-vous la mise en place du CICE et les aides à l’embauche?

Le CICE touche toutes les entreprises. Or seules 10 % d’entre elles sont affectées par la concurrence internationale. Louis Gallois souhaitait leur réserver cette subvention. Je partage son avis. Maintenant, le dispositif est en place et il est excellent. Quant aux aides à l’embauche, elles ont le défaut de s’appliquer au niveau du Smic et de disparaître rapidement dès que le ­salaire s’élève. Cela pénalise les entreprises comme la mienne qui ont une politique de rémunération plus élevée.

L’instauration du compte pénibilité vous fait-elle peur?

Le décret d’application n’est pas clair. Chez Paprec, ce sont surtout les salariés des chaî­nes de tri qui effectuent un travail pénible. Ils comptent pour moins de 8 % de nos effectifs ouvriers. Mais avec les chauffeurs et les grutiers on passe à 55 %. Le gouver­nement est persuadé que les chefs d’entreprise hurlent pour défendre leur intérêt personnel. Mais ce n’est pas le cas. Il y a un vrai problème de lisibilité du texte.

Auteur

  • Eric Béal