« En voilà un beau travail ! » Une telle exclamation est désormais rare ou même déjà en voie de disparition. Une situation que le sociologue Jean-Philippe Bouilloud attribue à la rationalisation du travail, à la course éperdue aux réductions de coûts et à la prévalence des seules dimensions économiques. Et pourtant, quel professionnel peut totalement occulter la dimension esthétique de son travail ? Un ébéniste, un soudeur, un chirurgien ou un maçon, chacun à leur façon, auront une appréciation de la « beauté » de leurs réalisations. C’est le point de départ de l’essai de l’auteur qui constate que « l’oubli du beau, voire son empêchement, met chacun dans l’inconfort et la frustration ». À cette souffrance éthique s’ajoute une souffrance esthétique dans l’empêchement du « beau travail » qui, pour le sociologue, doit être une véritable revendication professionnelle et un droit moral pour chacun. Un choix difficile, alors que les débats autour du travail sont davantage marqués par des enjeux de domination, d’aliénation ou de risques psychosociaux…
Pouvoir faire un beau travail. Une revendication professionnelle, Jean-Philippe Bouilloud, Éditions Eres, 160 pages, 20 euros.