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« Je veux encore renforcer le caractère social d’Ikea »

Liaisons Sociales Magazine | Management | publié le : 26.05.2015 | Manuel Jardinaud

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Belge flamand, le patron d'Ikea France s'efforce de donner un nouvel élan à l'entreprise et à ses 9700 collaborateurs. Pas simple dans une maison durement secouée, en 2012, par une affaire d'espionnage.

Quels sont les grands axes de votre stratégie en France?

Elle se décline en deux points. D’abord l’expansion. Ikea a la volonté d’être plus proche des Français alors que nous ne sommes actuellement implantés que sur deux tiers du territoire. Nous allons passer de 30 à 40 magasins d’ici à 2020, pour proposer une offre plus accessible. En complément, nous développons une nouvelle façon de rencontrer les clients avec le drive. Tous les magasins devront le proposer en septembre. Nous étudions également une nouvelle solution, dans Paris, avec un magasin plus petit. L’autre axe, c’est l’approche multicanal avec le développement de l’e-commerce. Notre nouvelle plate-forme numérique sera en ligne dans un an. Ainsi, nous renouvellerons radicalement l’expérience client en étant pertinents sur les différents supports.

Comment portez-vous cette évolution auprès des collaborateurs?

Chacun doit prendre conscience que le monde change, tout comme les attentes des consommateurs. Nous agissons d’abord auprès des managers et des hauts potentiels. Par exemple, nous avons organisé trois jours d’échanges avec des hackers et des spécialistes du cerveau pour parler du futur, des frontières entre numérique et commerce réel. Et ce travail de réflexion doit être mené jusque dans les entrepôts. Au-delà, je dois insuffler une vision sans dramatiser les choses. Le postulat est simple: il faut placer le client au centre de nos préoccupations. Pour cela, accompagner le changement est la clé.

Dans cette période de bouleversement, comment préservez-vous le climat ­social de l’entreprise?

L’indice fourni par notre enquête annuelle est en augmentation depuis quatre ans. J’en suis heureux, même si l’on est encore un peu en dessous des objectifs que je me suis fixés. Nous avons beaucoup travaillé, notamment sur le développement des compétences. Je souhaite que les collaborateurs prennent confiance dans l’exercice de leur métier. Côté managérial, nous avons déployé un programme sur le leadership auprès des directeurs et des chefs de département et de service. Nous les ­aidons à être authentiques, à mieux se connaître. Ils sont ainsi en capacité de donner de l’espace à leurs collaborateurs afin qu’ils s’épanouissent. Nous avons beaucoup fait pour professionnaliser et moderniser le management chez Ikea.

Ces actions ont-elles un lien avec l’affaire d’espionnage qui a ébranlé Ikea?

Cette affaire fut un grand choc mais elle appartient désormais au passé Nous avons mis en place un grand plan d’action sur la gouvernance et la conformité. Comme P-DG, il m’a surtout fallu comprendre l’impact sur les individus. J’ai agi en redonnant du sens, en me focalisant sur le futur de l’enseigne tout en étant plus transparent. Nous continuons encore aujourd’hui à communiquer sur nos actions, en organisant des ateliers sur les valeurs d’Ikea.

En France, Ikea est-il toujours une ­entreprise sociale?

Oui, Ikea est une entreprise sociale et j’ai encore la volonté de renforcer cela. Je suis inspiré par les modèles scandinave et allemand. J’ai échangé avec des syndicats de ces pays et c’est un peu mon rêve que l’on arrive à avoir un dialogue social au sein duquel syndicats et direction aient une empathie réciproque. Je veux créer une entreprise meilleure. J’ai toujours été disponible en comité central d’entreprise pour parler de la stratégie, et cette proximité avec les organisations syndicales est essentielle. Aujourd’hui, la confiance s’est réinstallée avec les partenaires sociaux.

Ikea est-il encore cette entreprise où chacun peut progresser?

Dans tous les pays, beaucoup de collaborateurs commencent comme étudiants. Mon homologue aux États-Unis a débuté comme simple cariste. Moi-même, après des études d’ingénieur civil et de com­munication, j’ai été préparateur de commandes en intérim puis ai enchaîné deux ou trois missions. Je suis passé par toutes les étapes : responsable de rayon et de département, directeur de magasin, responsable des ventes au niveau national… Chez Ikea, chacun peut progresser. La seule différence, aujourd’hui, c’est que nous structurons cette stratégie à l’échelle mondiale. On la nomme désormais «politique de talent», mais c’est ce que nous faisons déjà depuis des années.

Auteur

  • Manuel Jardinaud