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Des dirigeants d'entreprise à la recherche du bonheur

Liaisons Sociales Magazine | Management | publié le : 30.10.2015 | Eric Béal

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A l’occasion de la première Université du bonheur au travail, des DRH et des managers expliquent les raisons pour lesquelles ils croient en cette notion surprenante. Et, surtout, comment ils la traduisent sur le terrain.
 

Ils interviendront le samedi 31 octobre, dans l’après-midi, au cours de la dernière et troisième journée de l’Université du bonheur au travail, organisée dans les locaux parisiens de l’Inseec, à Paris. Ils sont DRH de grandes entreprises ou patrons de PME et souhaitent témoigner de l’intérêt de cette notion quelque peu étonnante de «bonheur au travail».

Loin des considérations psychologiques sur le « je » ou le « tu » au travail et des «méditation de pleine conscience» qui ont été évoquées les deux premiers jours, ils parlent de leur expérience de manager de terrain et décrivent la force du «bonheur», comme outil de prévention des risques psychosociaux et de la souffrance au travail. Comme outil de performance économique également.

Entreprise libérée

Frédéric Roques est directeur exécutif et directeur général d'Egis France, une société d’ingénierie de 4100 salariés. Il est convaincu que «si les salariés ne sont pas présents affectivement et émotionnellement à leur poste de travail, l’entreprise se prive de 50% de ses compétences». Il a donc fait réfléchir son comité directeur sur des valeurs permettant aux collaborateurs d’être le plus autonome possible – seule façon d’être pleinement heureux à ses yeux – et de trouver un sens au travail.

Cette réflexion aboutit à quatre règles d’or : servir le client ; supprimer tout ce qui ne sert pas le client ; prendre les décisions dans le seul intérêt du collectif ; autoriser chacun à prendre une décision stratégique, après avoir consulté tous les gens impactés en interne. Parallèlement, le rôle de manager est redéfini comme étant un «jardinier» qui prend soin de ses collaborateurs. Tel un Candide des temps temps modernes...

L’égo du patron

«Les managers sont au service de leurs collaborateurs, affirme le DG d’Egis. Ils doivent savoir prendre leurs responsabilités et oublier leur égo. Ce qui suppose aussi d’adopter des postures managériales « épanouissantes» : faire confiance a priori, écouter et valoriser ses collaborateurs en toute occasion. «Le principal frein au bonheur au travail est l’égo du patron, estime Frédéric Roques. Au lieu de vouloir survivre le plus longtemps possible, il doit apprendre à lâcher prise. A terme, mon objectif est de devenir inutile.»

Pour Stéphane Saba, DRH de Pepsico France, le bonheur au travail est «un levier de performance économique». «Grâce à l’engagement de nos équipes, nous connaissons une croissance trois fois plus rapide que celle du marché», explique-t-il. Pour expliquer cette performance, il invoque trois ingrédients : la qualité managériale qui permet d’améliorer les relations entre personnes, l’épanouissement personnel des collaborateurs et la reconnaissance au travail.

Bonheur et innovation

«Savoir reconnaître la performance et remercier ses collaborateurs est indispensable, estime-t-il. Chaque trimestre, l’entreprise remet des Awards collectifs et individuels avec invitation à dîner pour l’équipe ou les collaborateurs les plus performants. Côté bien-être au travail, tout est fait pour faciliter la vie des collaborateurs : télétravail, formation en ligne et flexibilité des horaires. Enfin des learning lunches sont régulièrement organisés par le service formation autour d’un thème afin de promouvoir la transmission des savoirs entre collègues.

«Toutes les équipes sont aujourd’hui capables d’innovation. Non seulement les commerciaux ou les spécialistes du marketing. Mais également les équipes de la logistique grâce auxquelles nous avons trouvé le moyen d’être innovants dans l’approvisionnement des rayons snacking, qui sont appréciés par les consommateurs et nos clients.

Le bonheur en mer

On trouve des adeptes du bonheur au travail jusque dans la Marine nationale dont l’ancien DRH, Olivier Lajous, est un fervent promoteur. «L’entreprise est d’abord une aventure humaine, affirme-t-il. Si les personnes qui y travaillent sont heureuses, l’entreprise va bien. A l’inverse, si elles traînent des pieds pour s’y rendre, l'entreprise est en danger.» A la Royale, l’ancien amiral chargé des RH a pris des initiatives pour améliorer le «bonheur» des équipages. Depuis 2002, il a fait adopter les horaires libres pour les marins à terre. «Ils ont des objectifs à atteindre, mais plus de contraintes horaires et les équipes peuvent s’organiser comme elles le souhaitent.»

Pour garder les savoir-faire indispensables, il a même été à l’initiative d’une liaison aérienne entre Brest et Toulon, deux ports militaires. «Les gens qui changent d’affectation peuvent ainsi rejoindre leur famille pour le week-end, et n'ont donc pas l'obligation de déménager.» Enfin, un service appelé «Bien-être à la carte» permet au conjoint resté seul de bénéficier du service d’artisans compétents en cas de problèmes sur la voiture ou dans la maison. Les marins peuvent partir l’esprit tranquille !

Des idées de bon sens qui semblent plus proches d'une amélioration du bien-être ou de la qualité de vie au travail que du véritable bonheur dans le monde professionnel. A minima, cette première Université du bonheur au travail permet de rappeler que la performance économique est intimiement liée à la performance sociale et managériale. Un rappel tout à fait heureux.

Auteur

  • Eric Béal