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Vers un nouveau sauvetage de l'Afpa

Liaisons Sociales Magazine | Formation Continue | publié le : 16.01.2015 | Manuel Jardinaud

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En difficultés financières depuis plusieurs années, le premier opérateur de la formation en France peine à redresser la barre. A tel point que l'Etat prend les rênes pour le sortir de l'ornière.

Le doute s’insinue. Et si l’Afpa allait droit dans le mur ? C’est pour éviter un scénario noir que le ministère du Travail intervient. Il mène depuis octobre, dans la plus grande discrétion, des réunions avec l’ensemble des acteurs concernés (régions, syndicats, ministère des Finances, DGEFP) à l’exception de… la direction de l’association.

Une non-convocation qui sonne comme un camouflet pour le plan de refondation lancé fin 2012 pour éviter la faillite de l’opérateur. Avec une première injection de 110 millions d’euros de l’État, en 2013, suivie d’une seconde d'un même montant, en 2014. Contactée, la direction de l'Afpa n'a pas souhaité répondre à nos questions.

Une concertation s’est tenue le mercredi 14 janvier. Pour le ministère, il s’agit d’entrer dans une logique de projet pour pérenniser l’activité de l’Afpa et voir comment l’association peut apporter sa contribution comme acteur du service public de l’emploi. Le terme « survie » est récusé. « Nous avons quand même voulu rappeler que les objectifs du plan de refondation n’ont pas été atteints », fait valoir Dominique Saint-Araille, représentant de FO au conseil d’administration.

De fait, l’action en profondeur engagée depuis 2012 par Yves Barou, président de l’Afpa, tablait sur un excédent d'exploitation de 2 millions d’euros en 2014. Raté. Les comptes devraient afficher un déficit de 10 millions d'euros… Entre 2011 et 2013, le chiffre d'affaires, lui, a baissé de 12 %.

Report des cotisations Urssaf

Deux volets ont été examinés au ministère du Travail : les comptes et l’activité. Côté finances, les difficultés de trésorerie appellent une réponse rapide, la présence au ministère du Comité interministériel de restructuration industriel (Ciri) renforçant ce sentiment. Déjà, l’Afpa a obtenu en septembre dernier un report du paiement des cotisations patronales auprès de l’Urssaf. Le moratoire court pour 36 mois.

Un tour de table financier est en cours d’élaboration dit-on au ministère. Qui y prendra sa part, assurent des participants à la réunion. Le scénario pour 2015-2017 se veut prudent. Pas de bouleversement donc, mais « à nouveaux le non-remplacement des départs à la retraite », selon Christian Fillot, délégué syndical central CGT. Sur 2013-2014, quelque 500 personnes – non remplacées – ont quitté l’Afpa. Et 850 autres devraient faire de même à horizon 2017.

Un groupement d'achats régional

Côté activité, les pistes sont nombreuses et pas encore arrêtées. L’Etat a rappelé que l’Afpa évolue sur un marché concurrentiel mais doit prendre sa place au sein du service public de l’emploi. En premier lieu, un travail général est effectué avec Pôle emploi sur le raccourcissement des délais d’entrées en formation. La mise en place d’un groupement d’achats entre régions est à l’étude pour les stages qui ne trouvent pas assez de candidats localement. Cela pourrait accroitre les opportunités de l’Afpa au niveau national, veut-on croire au ministère. En outre, une nouvelle mission de refonte des titres professionnels du ministère du Travail pourrait être confiée à l’association, forte de son expertise en ingénierie de la formation.

Autre réflexion en cours : demander à l’Afpa de mettre en place des formations spécifiques pour des publics éloignés de l’emploi (personnes en situation de handicap, par exemple). Afin de proposer, ensuite, une offre de service experte à d’autres prestataires. Enfin, comme un serpent de mer, revient sur la table l’idée des formations stratégiques correspondant à des besoins qui n’existent pas sur le marché. Charge à l’Afpa de les étudier…

Intégration au sein du Cnefop

La symbolique a aussi sa place : remettre l’Afpa au cœur du service public de l’emploi, comme la loi l’indique. Et, en premier lieu, au sein des nouvelles instances issue de la réforme de la formation que sont le Conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (Cnefop) et ses cousins régionaux, les Crefop. Le décret serait déjà en instance de rédaction.

Une nouvelle qui ne réjouirait pas les régions, d'après des participants. Celles-ci entendent en effet garder la main sur la formation au niveau territorial. L’Association des régions de France (ARF) souhaite avoir des garanties vis-à-vis de l’Afpa. Selon elle, aucune obligation d’achat ne saurait être tolérée. « Les politiques des régions sont très hétérogènes. Certaines ne jouent vraiment pas le jeu avec l'Afpa ! » déplore Dominique Saint-Araille, de FO. Il reste jusqu’à fin mars pour rapprocher les points de vue. Et transformer ces multiples pistes en une stratégie gagnante.


Auteur

  • Manuel Jardinaud