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Les scénarios pour l’avenir des formations linguistiques

Entreprise & Carrières | Formation Continue | publié le : 01.12.2015 | Laurent Gérard

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À la suite de la réforme de la formation professionnelle, les entreprises vont exprimer des demandes différenciées en matière de formations linguistiques, selon la nature du financement. Ce qui va scinder le marché des prestataires, selon une étude réalisée par Linguaid.

Qu’attendent les entreprises aujourd’hui des prestataires de formations linguistiques ? Et comment ce marché évolue-t-il ? Le cabinet Linguaid répond à ces questions dans une étude très fournie à paraître prochainement, qui analyse les tendances de la demande, l’évolution de l’offre et l’impact de la réforme sur le secteur (1).

Formation ponctuelle « Fondamentalement, explique Andrew Wickham, consultant en charge de l’étude, les résultats reflètent une tendance profonde : la formation linguistique est de moins en moins gérée comme un investissement stratégique à long terme pour l’entreprise, et de plus en plus comme une spécialité de formation ponctuelle, devant constamment s’adapter aux besoins opérationnels immédiats et aux contextes changeants de l’entreprise et de ses personnels. Et cela dans un environnement de réforme que l’on connaît. »

En conséquence, selon lui, les responsables formation ont à faire face à des défis renforcés : maîtriser les coûts, les budgets, les tarifs et les financements ; trouver des solutions efficaces ; adapter et personnaliser la formation linguistique aux besoins de l’entreprise ; motiver les stagiaires, en particulier pour les modalités à distance et en e-learning ; évaluer les compétences et assurer un retour sur investissement ; gérer l’impact de la ­réforme ; centrer les cours davantage sur les métiers de l’apprenant ; bien utiliser les nouvelles technologies ; et assurer la qualité. Alors même que « la part moyenne des langues dans les budgets de formation des ­entreprises est de 10 %, et que 31 % d’entre elles ont un budget de formation linguistique 2015 orienté à la baisse, contre 17 % en 2014 », constate Andrew Wickham.

Cet état de fait va se traduire par deux types de demandes différentes sur le marché et donc pousser davantage celui-ci à se scinder en deux domaines, chacun avec des pratiques et des contraintes très différentes.

Garanties de pérennité Le premier type de demandes sera dépendant d’un marché B2C très encadré, financé par les fonds paritaires (CPF, CIF, VAE, professionnalisation.) très contrôlés. « Les financeurs vont sans doute privilégier des organismes certifiés, d’une certaine taille, ayant une assise régionale et offrant des garanties de pérennité, précise Andrew Wickham. Ils devront être capables de prendre en charge à des tarifs préférentiels à la fois les demandes individuelles, les dispositifs des entreprises et les actions collectives de A à Z, en fournissant accompagnement et conseil, car peu d’Opca ou d’entreprises auront les moyens en personnel et en temps pour le faire. »

La seconde demande sera celle de formations en cohérence forte avec la stratégie et les besoins des entreprises et des salariés, débouchant sur un marché B2B concurrentiel, peu régulé, financé directement par les entreprises. « À la condition de ne pas faire appel aux fonds publics, la réforme libère les entreprises de toute obligation de dépense et du carcan administratif », indique le consultant.

Conséquences : une demande caractérisée par un focus accru sur les retours sur investissement et sur les attentes, et une recherche importante d’innovations pédagogiques. « La fiabilité et la pertinence de l’évaluation avant/après formation seront un enjeu déterminant », conclut-il.

Au final, la reconfiguration du marché et la concentration des acteurs s’accentueront, et les petits organismes sont déjà sous pression.

(1) Étude menée auprès de 90 organismes de formation linguistique, soit 23 % des prestataires réalisant 153 millions d’euros de chiffre d’affaires sur un total marché de 358 millions d’euros. Étude menée également auprès de 114 responsables de formation et de 800 formateurs en anglais. L’accès aux résultats est payant (375 euros HT). www.linguaid.net/fr/etude-linguaid-2015

 

Un marché très concentré, et en baisse
Selon Linguaid, le marché des formations linguistiques représen­te un chiffre d’affaires de 358 millions d’euros en 2013 contre 389 en 2008, en baisse de 14,7 % en euros constants (-19 % pour les spécialistes du présentiel).
Le distanciel (formation à distance par téléphone, Web-conférence ou visioformation, de plus en plus en format mixte), représente aujourd’hui entre 10 % et 15 % du marché en valeur et jusqu’à 30 % en volume. Il progresse depuis 2008 à un rythme de 4,5 % par an.
Le secteur est très concentré : six réseaux (CEL-CCI, Wall Street, Berlitz-Telelangue, Greta, Inlingua, Can Speak) captent 50 % du chiffre d’affaires. Les formateurs indépendants et petits organismes ne font que 36 % du marché.
La marge bénéficiaire moyenne des organismes est passée de 4,4 % en 2009 à 1,4 % aujourd’hui.
« Avec le choc brutal de la réfor­me et la conjoncture morose, on peut s’attendre à une baisse moyenne de chiffre d’affaires entre 15 % et 20 % en 2015 », prévoit Joss Frimond, coauteur de l’étude.

Andrew Wickham, consultant en charge de l’étude : « Le CPF est une opportunité complexe »
« Le chiffre d’affaires du CPF langues pour toute l’année 2015 ne représentera que l’équivalent d’un mois de DIF langues de 2014. Paradoxalement, le fait que le CPF, doté d’un budget presque deux fois plus élevé que celui du DIF, n’ait pas atteint son objectif de financer les formations longues et diplômantes pour les salariés pourrait jouer en faveur de la formation linguistique. Plus de 50 % des parcours CPF validés et 80 % des demandes concernent en effet les langues. La principale attente des entreprises envers leurs prestataires aujourd’hui est l’accompagnement et le conseil dans la mise en œuvre du CPF. De même, les demandeurs individuels sont perdus dans le labyrinthe et cherchent à être pris en charge. Des opportunités existent donc pour les acteurs proactifs, même si la charge administrative engendrée par le CPF est bien plus lourde que celle du DIF. » ♦

Auteur

  • Laurent Gérard