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Les défaillances de l’évaluation des formations

Entreprise & Carrières | Formation Continue | publié le : 29.09.2015 | Laurent Gérard

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La majorité des formations ne font l’objet d’aucun suivi de la part de l’employeur, constate une étude de Demos. De quoi s’interroger sur la réalité du pilotage de la formation et de la gestion des compétences dans les entreprises.

Ce chiffre donne une idée de l’étendue du chantier : 55% des salariés formés assurent qu’aucun suivi spécifique n’a été mis en œuvre par leur employeur à la suite d’un dispositif de formation. Très peu ont eu un entretien formel avec leur manager (7 %) ou avec le responsable ressources humaines ou de formation (8 %). Et très peu bénéficient d’un plan d’action suivi (8 %).Tels sont les constats peu enthousiasmants d’une étude réalisée par Demos sur le ressenti et l’expérience de 725 salariés formés, et rendue publique la semaine dernière.

 

 

Certes, un entretien informel avec le manager est constaté dans 31 % des cas. Mais, en l’absence de formalisation avec les RH, quel en est le résultat ? Et quel peut être le pilotage de la formation et des compétences dans ces conditions ?

Depuis des mois, la réforme de la formation professionnelle relance les vieux débats sur la qualité, l’achat et l’évaluation des prestations  - lire Entreprises & Carrières n° 1255 (abonné). Or les chiffres de l’étude Demos montrent que les pratiques demeurent à ce stade inchangées et insuffisantes. « La formation est encore un peu trop déconnectée de l’opérationnel. Son impact serait nettement plus fort si un vrai suivi était effectué », convient Denis Reymond, directeur de la practice pôle solutions et conseil chez Demos.

Impact sur les pratiques Ce manque de suivi ne signifie pas pour autant que les salariés jugent négativement leurs formations. Au contraire, pour 82 % d’entre eux, elles ont un impact sur leurs pratiques professionnelles. Mais seuls 28 % répondent « oui, tout à fait » à cette question, une nette majorité (54 %) se contentant de répondre un « oui, plutôt ».

Le ressenti est donc globalement positif, mais l’impact sur le travail et les compétences n’est pas identifié comme totalement satisfaisant ou productif. « Si les formations sont utiles aux salariés dans le cadre de leurs missions, l’entreprise a tout intérêt à les laisser exprimer leurs besoins en termes de développement des compétences, souligne Denis Reymond. D’ailleurs, c’est de plus en plus le cas. Désormais, les plans de formation sont construits de manière plus transparente et prennent davantage en compte les entretiens individuels. »

Professionnalisation Cette faiblesse de la pratique de suivi et d’évaluation de la formation met en cause à la fois les choix politiques et techniques des entreprises et également la professionnalisation des acteurs de terrain. C’est pourquoi la publication prochaine par le Medef des résultats d’un groupe de travail sur la professionnalisation des acteurs de la formation est signe que la question est importante.

Ce groupe a été constitué avec de grandes entreprises, des branches et des organismes de formation il y a un an. Objectif : analyser tout le processus de formation, de la définition du besoin à l’appréciation des résultats, et pointer les bons réflexes qualité à chaque stade. Dans quelques jours, toutes les productions de ce groupe concernant l’évaluation, l’innovation pédagogique et les achats seront rendues publiques : les analyses, les propositions, les outils. Plus tard viendront ses réalisations sur les labels qualité et sur la qualité des certifications.

L’initiative vient combler un vide : la réforme a puissamment restructuré l’architecture juridique et financière de la formation, mais la réussite de ce chantier se jouera sur la professionnalisation et la technicité des acteurs de terrain, du salarié au responsable formation, en passant par les hiérarchies intermédiaires, voire les administrateurs des financeurs.

 

 

 


Des choix pédagogiques très classiques

Concernant les domaines de formation, l’étude Demos montre, là encore, une grande constance : près de 72 % des répondants indiquent que les formations réalisées concernent des compétences techniques ou orientées métier. Suivent les compétences transversales, comme le management de projet ou d’équipe (40 %), les formations en développement personnel (30 %), celles en bureautique (25 %) et, enfin, les formations linguistiques (19 %).

Sur les modalités pédagogiques, tout aussi peu de surprise : 43 % des salariés indiquent souhaiter effectuer leur formation en présentiel, et 38 % privilégient la solution en blended learning (mixe entre le présentiel et la formation à distance).

En revanche, les dispositifs d’e-learning « purs » sont, eux, très peu plébiscités : seulement 8 % des répondants en expriment l’envie, bien que les trois quarts d’entre eux se disent prêts à suivre une formation avec ce dispositif. « Les collaborateurs ont conscience des difficultés liées à l’apprentissage en e-learning, commente Denis Reymond. C’est une modalité pédagogique qui demande beaucoup d’énergie et de motivation personnelle, mais aussi de pouvoir s’isoler pendant une journée de travail, ce qui n’est pas facile. »
Enfin, le CPF est connu (80 % des salariés ont déjà entendu parler du compte personnel de formation), mais il est encore peu utilisé (50 % des personnes interrogées ont ouvert un compte et seulement 28 % ont demandé une formation par ce biais en 2015).

« La communication autour du CPF a bien fonctionné, mais les modalités pratiques et les bénéfices restent encore un peu obscurs pour le salarié, conclut Denis Reymond. Pourtant, ils ont aujourd’hui parfaitement conscience des responsabilités qui pèsent sur eux dans le développement de leurs compétences. »

Auteur

  • Laurent Gérard