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La sélection des étudiants en master hors-la-loi

Liaisons Sociales Magazine | Formation Continue | publié le : 29.01.2015 | Anne-Cécile Geoffroy

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Interdite par la loi, la sélection en master est pourtant largement pratiquée par les universités. Derrière ce sujet tabou se joue la qualité de l’insertion des jeunes sur le marché du travail.

C’est ce qu’on appelle mettre les pieds dans le plat ! Inquiète de récents jugements des tribunaux administratifs de Bordeaux et Aix-en-Provence concernant la sélection en master 2, la conférence des doyens des facultés des sciences économiques et de gestion s’alarme dans un communiqué officiel "d’une possible remise en cause de la sélection des étudiants en master."

À Bordeaux, l’université de Montesquieu qui avait refusé l’entrée en master 2 de droit des affaires à une étudiante ayant validé une première année de master dans la même spécialité s’est vue contrainte par le juge d’accepter la jeune femme.   

Le sujet de la sélection est tabou à l’université. « C’est surtout le bal des hypocrites, pointe Yves Le Duc, juriste spécialisé en droit des diplômes. En l'état, la loi interdit formellement la sélection des étudiants à l’entrée et entre les deux années de master. Les universités prennent donc de très gros risques juridiques. » Un décret devait normalement fixer une liste de formations autorisées à sélectionner les étudiants. Celui-ci n’est jamais sorti.

Sélection drastique

Sur le terrain la réalité est tout autre. Les patrons de master 2 se retrouvent généralement à devoir sélectionner une vingtaine d'étudiants parmi plus de 400 dossiers. Cette année par exemple, les taux de sélection à l’entrée en deuxième année des masters en gestion des ressources humaines, variaient de 4% à 35,3%.

Des chiffres qu’il faut relativiser. Les étudiants, inquiets de ne pas trouver de place en M2, multiplient les dossiers d’admission sans toujours s’interroger sur la cohérence de leurs parcours et leur motivation. Pour contrer le phénomène et s’assurer de recruter les meilleurs, les responsables de master ont donc musclé leur processus de sélection. Certains demandent dès le dépôt du dossier la rédaction d’une dissertation sur un sujet RH. D’autres imposent un premier stage en ressources humaines et, de plus en plus souvent, un très bon niveau d'anglais.

Garantir l'insertion professionnelle
 
Résultat, le taux de passage moyen entre le master 1 et le master 2 au sein des universités, toutes spécialités confondues, n'était que de 59,7% en 2012. Plus de 40% des étudiants ne parviennent pas à terminer leur master au sein de l'université. Une question dont la Conférence des présidents d'université (CPU) s'est emparé en septembre en créant un groupe de travail ad hoc qui n'a pas encore rendu ses conclusions.

Pour les masters, l’enjeu est de taille. S’ils n’opèrent pas de sélection, c’est la notoriété de leur diplôme auprès des entreprises où ils placent leurs étudiants en stage ou en contrat d'alternance qui risque de s’étioler.

"Notre responsabilité est d’assurer l’insertion professionnelle des jeunes, souligne Sébastien Richard, responsable du master management des ressources humaines de l’université de Lille 1. Les étudiants peuvent entendre que les formations de master soient sélectives. Ils savent que c’est raisonnable. Si nous n’opérons aucune sélection, c’est le marché du travail qui le fera."

Pour accompagner au mieux les étudiants vers l'emploi, des tutorats assurés par des DRH, souvent d'anciens élèves, sont mis en place par certaines formations, comme celle de l'IAE de l'université de Paris I ou encore de l'IAE Gustave Eiffel de l'université de Paris Est Créteil Val-de-Marne. Un "coaching" de luxe que les masters peuvent proposer lorsque les effectifs des promotions ne dépassent pas 25 étudiants.

Auteur

  • Anne-Cécile Geoffroy