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La Cour des comptes en veut-elle aux OPCA ?

Liaisons Sociales Magazine | Formation Continue | publié le : 22.12.2014 | Manuel Jardinaud

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Fin novembre, l’institution rendait public un référé acide relatif à la mutualisation des fonds de la formation professionnelle. Pourtant, dans un relevé d’observation provisoire resté confidentiel, le ton était beaucoup plus nuancé, voire positif. Un écart qui interroge.  

Est-ce que la Cour règle leurs comptes aux OPCA ? La question se pose, à en juger son référé à charge mis en ligne fin novembre concernant la mutualisation des fonds collectés par les OPCA pour le financement des plans de formation. D’autant que des observations provisoires et confidentielles transmises à cinq OPCA audités par les Sages de la rue Cambon il y a un peu moins d’un an avaient une tonalité bien différente. Si bien que, dans plusieurs chapitres, les deux versions sont parfois diamétralement opposées.

Le référé est tranchant. Concernant le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), la Cour des comptes s’émeut : « Le FPSPP a pour vocation d’opérer une péréquation entre les OPCA, mais celle-ci ne s’applique pas au plan de formation. » Ceux-ci n’ont représenté « entre 2010 et 2012 que 22,5% des appels à projet du Fonds ». Cette présentation laisse à croire que le FSPP et à travers lui les OPCA faillissent à leur mission.

Faits identiques, interprétation opposée

Or, dans la version provisoire non publique, l’analyse est tout autre, prenant le sujet par l’autre bout. La Cour des comptes explique que « le montant des appels à projets fléchés vers les demandeurs d’emplois a progressivement augmenté […] soit environ 88% du montant total […] » Elle ajoute : « Les montants programmés [...] marquent une inflexion de cette tendance, sans toutefois remettre en cause le fléchage prioritaire des appels à projets du fonds vers les demandeurs d’emploi. »

Les faits sont identiques. Mais ce qui est donc très négatif dans le référé transmis au ministre du Travail était vu sous un jour bénéfique dans la version provisoire. Version qui mentionnait même : « Conformément aux objectifs qui lui ont été assignés par la loi du 24 novembre 2009, le FPSPP a donc commencé à réorienter une partie des fonds de la formation professionnelle vers les demandeurs d’emploi. » La phrase a disparu dans le référé…

Les deux faces d’une même solidarité

Autre élément troublant : dans un chapitre intitulé « La mutualisation par les OPCA a toutefois eu en pratique des effets très réduits », le référé désespère du manque de solidarité entre les « sections financières », c’est-à-dire entre les différentes catégories d’entreprises (moins de 10 salariés, de 10 à 49 et plus de 50). Cette « fongibilité asymétrique descendante », dans le jargon, « est en pratique très peu appliquée par les OPCA » au détriment des petites entreprises, explique la Cour.

Dans sa version provisoire, le texte est bien plus nuancé. Si la Cour reconnaît que cette perméabilité se fait surtout au sein de chaque section, elle assure néanmoins que la loi, et son application par les OPCA, a permis d’inverser une tendance qui voulait que la solidarité joue en faveur des grandes entreprises. Le texte assure que « la mise en place des sections financières a mis fin à ce phénomène ».

Amertume des OPCA

Une fois encore, les deux versions divergent. Quand la version publique se montre vertement critique sur l’application de la loi par les OPCA, l’autre assure que les choses évoluent dans le bon sens. La vision de la Cour des comptes apparaît, à la lumière de cette comparaison, très politique. Interrogée, elle indique : « Seules les observations définitives engagent la Cour, car son appréciation s’appuie, à ce stade seulement, sur les informations et sur les réponses détaillées qui lui ont été transmises lors de la contradiction. »

Une réponse qui irrite le directeur d'un important OPCA : « On ne se retrouve en aucune façon dans le référé de la Cour des comptes dont l'analyse se positionne sur les chiffres au lendemain de la réforme de la formation de 2009 sans laisser à celle-ci le temps de produire ses effets. Les multifinancements dont peuvent bénéficier les PME ne sont pas pris en compte dans l'analyse. » Ne reste plus qu’à regarder vers l’avenir avec la mise en œuvre de la nouvelle réforme.

Auteur

  • Manuel Jardinaud