logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

"Les syndicats ne peuvent être vus comme un obstacle aux ajustements"

Liaisons Sociales Magazine | Mobilités | publié le : 13.07.2016 | Manuel Jardinaud

Image

Coauteur d'une étude comparative France/Grande-Bretagne sur les conséquences de la crise de 2007, l'économiste assure que les syndicats n'ont empêché ni les pertes d'emplois ni les gels de salaires. Ceux-ci ne freineraient donc pas les adaptations du marché du travail.

Pourquoi avoir choisi de comparer le lien entre conséquences de la crise et dialogue social en France et en Grande-Bretagne ?

Il y a d’abord une opportunité scientifique avec deux grandes enquêtes statistiques – Reponse en France et Wers en Grande-Bretagne – qui sont fortement comparables et permettent d’explorer cette question. Ensuite, il est évidemment intéressant de comprendre les réactions de ces deux économies historiquement similaires mais dans lesquelles les syndicats occupent une place bien différente. La crise de 2007-2008 en est un bon révélateur. Observer le lien entre les ajustements à la crise en terme d’emplois et de salaires et la présence syndicale dans les entreprises des deux côtés de la Manche était donc potentiellement riche d'enseignements.

Qu'avez-vous observé ?

Les ajustements sont plus fréquents en Grande-Bretagne qu'en France, en particulier sur la question des salaires. On observe plus fréquemment des gels et même des baisses de rémunération chez nos voisins britanniques qu'en France. Par ailleurs, nous pouvons affirmer, toutes choses égales par ailleurs, que les syndicats ne bloquent aucunement les ajustements par l'emploi ou les salaires. Il y en a même davantage dans les entreprises en difficulté dans lesquelles ils sont présents. Mais attention, cela ne signifie pas en soi que les syndicats sont la cause de ces ajustements…
 
Que pouvez-vous en conclure ?

Contrairement à une idée reçue, il nous semble que les syndicats ne doivent pas être vus comme un obstacle déterminant aux ajustements. C'est en tout cas l'enseignement du choc économique de 2007 et 2008. Globalement, les entreprises qui ont procédé à des diminutions d'emplois ou de salaire net ne l'ont pas fait en opposition frontale avec les syndicats. Ces derniers les ont accompagnées, dans un climat marqué par des relations sociales ouvertes, avec négociations et parfois conflits. Dans le fond, les institutions du marché du travail, en France et en Grande-Bretagne, n'apparaissent pas décisives dans le fait d’empêcher ou non les ajustements. Outre-Manche, on peut d'ailleurs observer que les gels et les baisses de salaire net se sont fait de façon discrète, sans négociations spécifiques avec les syndicats. Cette modération salariale a été facilitée par la forte inflation, qui a mécaniquement réduit la masse salariale. En ce sens, si des institutions ont été déterminantes, ce sont davantage les institutions monétaires que celles du marché du travail.

Auteur

  • Manuel Jardinaud