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Quand les communes se prennent pour Pôle emploi

Liaisons Sociales Magazine | Mobilités | publié le : 02.03.2016 | Anne-Cécile Geoffroy

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Des communes se mettent en réseau pour développer des missions emploi. Afin de lutter elles aussi contre le chômage. Le début d'une nouvelle génération de services publics de l'emploi.

« Surtout pas de subventions ! » L’interjection de Jérôme Laverny, responsable du réseau national des Missions Emploi, résume la philosophie de cette toute nouvelle association créée en début d’année. « Les Plie et autres maisons de l’emploi sont englués dans les systèmes de financement comme le Fonds social européen. Cette dépendance les met aujourd’hui en difficulté du fait de la baisse des subventions publiques », ajoute-t-il. Responsable de la Mission Emploi de Drancy, à l’origine du réseau, Jérôme ­Laverny entend créer une nouvelle gé­né­ration de services publics de l’emploi ­portés par des communes, gratuits pour les chômeurs comme pour les entreprises. À ce jour, une poignée de villes et de com­munau­tés d’agglomération se sont lancées. Huit au total, situées en Ile-de-France (Drancy, Dugny, Le Raincy, Argenteuil) mais aussi en province (Montluçon, Angoulême, Bourges et l’agglomération Côte Basque-Adour).

Solidarité territoriale.

L’aventure a commencé à Drancy en 2013. À l’époque, le maire, Jean-Christophe La­­garde, veut doter sa ville d’un service em­ploi digne de ce nom. « Généralement, l’emploi est un thème de campagne électorale que les élus oublient vite ou né­gligent en se contentant de nommer un conseiller emploi au sein du centre communal d’action sociale », pointe Jérôme Laverny. Les Mission Emploi des villes membres du réseau affichent une autre ambition. Il s’agit d’offrir aux demandeurs d’emploi et aux employeurs les mêmes services qu’un cabinet de recrutement, tout en créant de la solidarité territoriale au service du développement économique.

Car les huit communes se partagent la même base de données de CV. Soit 8 000 profils renseignés à ce jour. Un vrai plus pour Christelle Prenois, maire adjointe de Bourges, chargée de l’emploi. « Dans notre bassin d’emploi, par exemple, la ­société MBDA recherche des candidats dans l’aéronautique. Or, à Drancy, les compétences ne manquent pas car ce secteur d’activité y est aussi très présent. Si nous pouvons faciliter la rencontre entre l’offre et la demande tout en facilitant la mobilité géographique, nous aurons rempli notre mission », explique-t-elle.

Dernier à avoir rejoint le réseau, le pôle d’équilibre territorial et rural (PETR) Pays de la vallée de Montluçon et du Cher, qui regroupe 92 communes, 115 000 habitants avec de forts taux de chômage : près de 12,5 % à Montluçon et 13,9 % à Aubenas. Mi-février, la nouvelle mission a organisé une grande collecte de CV sur plusieurs jours. « C’est un nouveau service à la disposition des citoyens, explique Yveline Dubillon, responsable du PETR. Nous travaillons en complémentarité avec Pôle emploi qui n’a pas la capacité de se déployer en proximité quand nos élus, eux, sont au contact quotidien des chefs d’entreprise et des habitants. »

Service de proximité.

À Dugny, en Seine-Saint-Denis, c’est aussi l’absence de service public de l’emploi sur le territoire qui a poussé les élus à ouvrir une mission il y a un an. « Dugny est une ville enclavée. L’agence Pôle emploi dont dépen­dent les habitants se trouve à La Courneuve. Pour s’y rendre, c’est le bus ou la voiture », indique Stéphanie Naissant, respon­sable de la Mission Emploi. Ateliers d’envoi de CV pour apprendre à maîtriser les outils nu­mé­riques, petits déjeuners « savoir-être » organisés avec des chefs d’entreprise, accompagne­ment individualisé… Les structures multiplient les événements pour ­apporter un service de proximité aux entreprises et aux demandeurs d’emploi qui les sollicitent.

Les résultats sont encou­rageants. À Drancy, en trois ans, près de 1 700 per­son­nes ont retrouvé un poste en CDI ou en CDD ou décroché une formation. À Dugny, sur les 250 personnes venues toquer à la porte, 53 ont décroché un entretien avec une entreprise. Des gouttes d’eau diront certains. « Qu’importe ! Trop de gens sont sur le carreau pour qu’on ne se retrousse pas les manches », rétorque Jérôme Laverny. Le réseau a déjà réussi à convaincre des entreprises comme Carglass ou KPMG de travailler avec lui.

Auteur

  • Anne-Cécile Geoffroy