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La Cour des comptes dézingue le contrat de génération

Liaisons Sociales Magazine | Mobilités | publié le : 10.02.2016 | Manuel Jardinaud

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Dans son rapport 2016, les magistrats de la rue Cambon critiquent vertement le dispositif phare de François Hollande. Et pointent des résultats très éloignés des objectifs initiaux et un dialogue social faible sur cette thématique.

Le constat est sans appel. Tout comme le titre du chapitre du rapport 2016 de la Cour des comptes, rendu public le 10 février, qui lui est consacré : « Le contrat de génération : les raisons d’un échec. » Peu de place pour la nuance de la part des conseillers de la rue Cambon : ce dispositif phare de François Hollande pendant la campagne pour la présidentielle de 2012, censé booster le recrutement des jeunes et le maintien dans l’emploi des seniors, obtient « des résultats éloignés des objectifs » et « n’a pas trouvé son public ». On fait difficilement mieux en terme de diagnostic calamiteux.

De fait, la cour rappelle la cible initiale : 500 000 contrats signés fin 2017. Fin juillet 2015, elle en dénombre 40 300 alors que 220 000 étaient espérés à cette échéance. « Peu lisible et complexe à mettre en œuvre, il n’a pas su convaincre les entreprises de son intérêt », juge le rapport. Et ce malgré les modifications apportées en 2014 à l’accord national interprofessionnel (ANI) du 19 octobre 2012 et à la loi du 1er mars 2013.

Un dispositif complexe

Difficile de donner tort aux rédacteurs… Selon le nombre de salariés de l’entreprise – moins de 50, jusqu’à 299 ou au-delà -, et de son appartenance à un groupe ou non, le dispositif procure des aides financières ou non, déclenche l’obligation de négociations d’un accord ou non, et implique le versement ou non de pénalités en cas de non respect des obligations. Une mise à l'amende pouvant aller jusqu’à 1% de la masse salariale pour les PME et grandes entreprises qui, selon la cour, « s’est révélée, à cet égard, inefficace », en particulier pour les entreprises de taille moyenne.

Le rapport se désole que le législateur n’ait pas mieux encadré la cible des jeunes à toucher via cette mesure : niveau de qualification et caractéristiques des difficultés d’insertion. Mais il critique également l’attitude des partenaires sociaux, que ce soit au niveau des branches ou des entreprises. Les magistrats relèvent une dynamique de négociation qui « s’est révélée limitée dans son contenu ». Vingt-trois accords de branche ont été signés couvrant 5,2 millions de salariés. Au total, ils sont 8,8 millions sur 23 millions à bénéficier d’un accord collectif.

Des accords a minima

Derrière ces chiffres se terre une réalité : celle d’accords a minima qui « ont souvent renoncé au principe d’un binôme effectif entre un jeune et un senior » et qui « semblent s’être limités à adjoindre un volet jeunes aux différentes thématiques du dialogue social qui s’étaient précédemment accumulées ».

Seule consolation pour le ministère du Travail, promoteur du dispositif : un effet sur le coût du travail. Au niveau du Smic, l’aide de 4000 euros pendant 3 ans pour les entreprises de moins de 300 salariés représente « une subvention publique du même ordre de grandeur que la réduction Fillon ». Un impact intéressant, juge la Cour.

Une ministre qui pointe une incompréhension

La ministre du Travail, Myriam El Khomri, ne s’y est pas trompée qui, dans sa réponse, note en première observation cet effet positif du contrat de génération sur le coût du travail. Mais ajoute-t-elle : « A bien des égards, l’analyse de la Cour traduit une incompréhension des objectifs du contrat de génération. »

Elle préfère se focaliser sur la redynamisation du dialogue social, la création d’un cadre global de réflexion et l’intégration de cette thématique dans les autres négociations. Enfin, elle botte en touche sur l’objectif initial, rappelant l’incertitude relevée par l’étude d’impact de la loi. En conclusion, la Cour des comptes émet une, et une seule, recommandation : « Revoir en profondeur le dispositif du contrat de génération ». On ne saurait être plus incisif.

 

 

 

 

 

Auteur

  • Manuel Jardinaud