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L'Indre veut renforcer l'attractivité de ses emplois auprès des franciliens

Recrutement | publié le : 22.11.2023 | propos recueillis par Gilmar Sequeira Martins

« Nous voulons créer un effet curiosité » (Thierry Bluet, Agence d’attractivité de l’Indre)

« Nous voulons créer un effet curiosité » (Thierry Bluet, Agence d’attractivité de l’Indre)

Crédit photo Thierry Vincent Photographe

L’Indre, département situé à 2 h 30 de la capitale, veut recruter des… Franciliens. Son agence d’attractivité est revenue pour la deuxième fois au Salon Paris pour l’emploi les 23 et 24 novembre derniers avec 3 000 offres d’emplois. Thierry Bluet, directeur de l’agence d’attractivité, expose la stratégie et les moyens mis en œuvre pour atteindre cet objectif.

Pourquoi avez vous participé au Salon Paris pour l’emploi, a priori destiné aux Franciliens ?

Thierry Bluet : Notre première participation date de 2022 et nous avons fait le pari de nous immiscer dans ce Salon pour créer de l'inattendu. Les visiteurs s'attendent à trouver des employeurs d’Île-de-France et ils tombent sur notre stand, l'Agence d'attractivité de l'Indre, un territoire qui propose des offres d'emploi à 2 h-2 h 30 de Paris. C'est l'effet curiosité que nous voulions créer. Et cela a fonctionné.

Venez-vous recruter des Franciliens ?

T. B. : À ce jour, nous avons en moyenne 3 000 offres d'emploi à pourvoir sur le département. Nous subissons les mêmes tensions qu’ailleurs, mais le tissu économique du département présente deux grandes spécificités. La première, c’est l’importance du secteur du luxe. Le département a une longue tradition d’industrie textile qui a connu une crise profonde dans les années 1980. Il reste aujourd’hui une activité centrée sur l’habillement de luxe, avec quelques centaines d’emplois. La maroquinerie de luxe emploie beaucoup plus de personnes, quelques milliers, notamment chez des façonniers qui travaillent pour des maisons françaises très connues. Et c’est un secteur qui recrute. L’une de ces entreprises a vu ses effectifs passer de 300 avant la Covid à plus de 1 000 aujourd’hui. Ce secteur emploie quelques milliers de personnes et, chaque année, il lance des centaines de recrutements. Or, le bassin d’emploi local ne peut pas pourvoir tous ces emplois. La seconde spécificité du tissu économique indrien, c’est le secteur aéronautique. C’est l’héritage d’une longue tradition industrielle liée d’abord à l’armement, puis à l’automobile. Ce secteur compte deux acteurs clés sur le département : Safran, qui emploie 1 300 personnes à Issoudun dans la production de sièges d’avions de ligne et l’aéroport de Châteauroux. Celui-ci a été jusqu’en 1966 le plus grand aéroport de l’Otan en Europe et il accueille aujourd'hui les pilotes des compagnies aériennes européennes pour des formations en vol, ainsi que de nombreux acteurs aéronautiques qui font de la maintenance ou de la peinture d’avions. Au total, cela représente environ 400 emplois. Ce secteur de l’aéronautique recrute des cadres, des ingénieurs, des techniciens, des ouvriers, etc. Et il a des difficultés à recruter. Par exemple, une entreprise spécialisée dans la peinture d'avions cherche en ce moment 30 personnes. Comme le territoire ne peut pas satisfaire ces besoins, nous allons les chercher à l’extérieur.

Quel type de profil recherchez-vous ?

T. B. : Nous cherchons des personnes qui sont autant dans une volonté de changement de vie professionnelle que personnelle, qui sont fatiguées des durées de trajet ou du coût élevé des loyers parisiens et qui cherchent un autre cadre de vie. Même s’il n’est pas plus facile de se loger ici qu’ailleurs, les coûts sont très différents : à l’achat, le mètre carré est aux alentours de 1 000 euros et pour la location, il est à 10 euros par mois contre au moins le triple dans la région parisienne. Il suffit de 600 euros par mois pour louer une maison avec jardin. L’agence d’attractivité mobilise une ingénierie d’accompagnement des nouveaux arrivants. Dans tous les cas, nous les aidons à trouver aussi un emploi pour leur conjoint(e), à trouver l’école qui convient à leurs enfants, à les socialiser à travers des réseaux, la participation à des soirées, des apéritifs, etc., afin qu’ils puissent s’intégrer plus facilement dans leur nouvel environnement. Nous répondons aussi à des problématiques très concrètes : où les enfants peuvent-ils faire de l’escalade, du ski nautique, de la danse, etc. Avant la décision d’installation, il y a aussi une phase de réflexion durant laquelle nous rencontrons les personnes, répondons à leurs questions et leur faisons découvrir le département.

Comment va évoluer votre démarche ?

T. B. : Nous réfléchissons à aller sur d'autres Salons professionnels qui, du fait des difficultés de recrutement, développent de plus en plus d’espaces dédiés à l’emploi. Je pense notamment à Global Industrie, un Salon référent dans le domaine industriel, mais aussi au Salon du Bourget ou aux Salons consacrés à l’agroalimentaire. Ces manifestations attirent des personnes déjà formées dans ces secteurs. Le défi est alors de leur prouver qu’un emploi dans l’Indre, dans un autre cadre de vie, mérite d’être tenté. En allant sur ce type de manifestations, nous pouvons accroître nos chances d'aider nos entreprises à trouver les talents qu’elles peinent à repérer.

Quel bilan tirez-vous de vos actions ?

T. B. : Ce type de démarche n’ayant commencé qu’en 2022, il est donc difficile de dresser un bilan. Toutefois, elle nous a permis d’affûter notre message. L’Indre n’est pas un département très connu ni très bien situé spontanément, mais il est attractif et il a un véritable capital « sympathie » auprès des Franciliens. Beaucoup de gens viennent visiter notre stand, car nous piquons leur curiosité. Cela a conforté la pertinence de notre démarche. Quand les gens viennent dans l’Indre, ils sont agréablement étonnés. Ceux qui s’y installent vivent une autre vie, avec moins de stress, plus de temps pour profiter de leur famille et de leur environnement. Dès qu’il y a une grève des transports à Paris, nous avons beaucoup plus d’appels de gens qui veulent savoir ce que nous avons à leur proposer… En étant présents sur ces Salons, nous avons aussi été questionnés sur un aspect auquel nous n’avions pas pensé : neuf fois sur dix, les gens nous interrogeaient sur la sécurité. Nous ne nous attendions pas à cette question, car dans notre département elle ne se pose tout simplement pas ! Notre présence dans les Salons nous permet donc d’affiner notre offre à travers nos échanges, mais aussi d’améliorer notre notoriété.

Combien de personnes suivez-vous ?

T. B. : À chaque opération, nous rencontrons de 100 à 150 personnes avec qui nous passons vraiment du temps, nous prenons leurs coordonnées et ils nous laissent leur CV. Ensuite, nous engageons un suivi, nous reprenons contact régulièrement avec eux jusqu’à ce qu’ils nous disent que le projet n’est plus d’actualité ou qu’ils ont décidé de s’installer ailleurs. En moyenne, nous gérons en permanence 150 projets.

Auteur

  • propos recueillis par Gilmar Sequeira Martins