logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

La cooptation, un levier efficace ?

Recrutement | publié le : 01.02.2023 | Gilmar Sequeira Martins

Face à la pénurie, le groupe Hôpital Paris Saint-Joseph s’est résolu à favoriser la cooptation depuis deux ans. Son DRH, Laurent Canaguier, dresse un bilan de cette approche et de ses résultats.

Laurent Canaguier est DRH du Groupe Hôpital Paris Saint-Joseph, qui emploie 4 200 salariés et compte un établissement dans le 14e arrondissement de Paris et l’hôpital Marie Lannelongue au Plessis-Robinson (Hauts-de-Seine).

Depuis combien de temps avez-vous recours à la cooptation ?

Depuis deux ans. Dans la filière santé, nous avons des difficultés à pourvoir un certain nombre de postes d’infirmière, sage-femme, manipulateur radio, kiné... Cela nous a amenés à négocier avec les organisations syndicales un accord qui vise à mettre en place des mesures incitatives pour être plus attractif par rapport à la concurrence. Nous avons instauré une prime de parrainage de 1 000 euros. Elle est versée — à l’issue de la période d’essai — à des salariés qui nous amènent cette main-d’œuvre à travers leur réseau professionnel. Nous avons même, sur une période transitoire, au dernier semestre 2022, augmenté cette prime à 3 000 euros pour les métiers d’infirmière anesthésiste et infirmière de bloc.

Pourquoi avoir mis en place cette prime de parrainage ?

Il faut être clair, lorsque vous versez une prime de 1 000 euros brut, cela coûte moins cher que de passer par un cabinet de recrutement, ce que faisons par ailleurs pour d’autres métiers. Et en plus, cela encourage nos salariés à être ambassadeurs de notre fondation.

Cela a-t-il porté ces fruits ?

Je m’attendais à un plus grand succès. Nous sommes dans des cultures professionnelles où le réseau fonctionne. Et malgré cela, il n’y a pas eu un effet démultiplicateur de versement de prime. Ce dispositif apparaît, en termes d’affichage, comme séduisant mais, en matière de retour sur investissement, ce n’est pas si évident. Environ 20 % de notre personnel recruté chaque année est coopté. La qualité des candidatures est bonne. En revanche, leur temps de présence dans notre fondation est le même qu’une personne non cooptée et oscille grosso modo à moins de dix ans. Il y a une difficulté à recruter sur le marché parisien, quand bien même vous mettez en place des dispositifs incitatifs très forts. Et nous avons beaucoup de départs vers la province, compte tenu du coût de la vie à Paris. Certains hôpitaux ferment même des services. En 2022, nous avons recruté environ 300 personnes en CDI. Nous terminons l’année avec un solde positif de 31. Cela veut dire qu’il y a eu 270 départs. Et actuellement, nous avons encore à peu près 200 postes à pourvoir. La cooptation est un levier mais ce n’est pas la panacée.

Quelle serait la solution ?

Je crois beaucoup plus à des mesures sur le logement et les crèches qui touchent les nouveaux arrivants en région parisienne. Nous avons un parc de plus de 100 logements aux coûts très compétitifs mis à disposition des nouvelles recrues le temps qu’elles trouvent un logement qui corresponde à leurs attentes. Ce parc immobilier n’étant pas extensible, nous allons aussi regarder notre capacité à prendre en charge une partie du loyer. Nous serions en mesure de mettre 300 euros mensuels pendant 6 mois en contrepartie d’un engagement de servir pendant 12 mois et 300 euros mensuels pendant 12 mois en contrepartie d’un engagement de 24 mois. Le second dispositif est la crèche. Nous avons près de 80 berceaux en interne à Saint-Joseph et une activité sous-traitée à une structure professionnelle de 20 berceaux à Marie Lannelongue. Nous proposons aussi une prime d’arrivée de 3 000 euros qui permet l’installation de nos futurs collaborateurs. Elle peut aller jusqu’à 4 800 euros en fonction de la tension qui existe sur le métier. Nous essayons de faire le maximum pour être attractifs. Quand vous mettez à disposition ce genre de mesures, vous pouvez faire la différence par rapport à un autre employeur, parce que sur le marché des rémunérations, nous sommes tous alignés sur les mêmes taux horaires. Donc, qu’est-ce qui fait la différence ? La façon dont on peut exercer son métier dans notre institution et ces avantages périphériques.

Pensez-vous poursuivre cette technique de recrutement ?

Pour l’instant, elle est inscrite sur les premiers mois de l’année 2023. Nous allons ensuite entrer en négociations annuelles obligatoires et nous remettrons sur la table les différentes mesures retenues pour le reste de l’année. Pour l’heure, c’est un dispositif que nous poursuivons, mais il n’est pas gravé dans le marbre. On peut se poser la question : est-ce que l’enveloppe budgétaire prévue pour cela ne peut pas être réallouée à autre chose ? C’est un des points de discussion avec nos représentants du personnel. Je pense qu’il faut davantage nous centrer sur la fidélisation de nos salariés plutôt que de payer la cooptation. Cela dit, elle fait partie des leviers dont nous ne pouvons pas nous passer aujourd’hui.

Auteur

  • Gilmar Sequeira Martins