La 5e édition annuelle de l’Observatoire des trajectoires professionnelles, publiée par la Fondation The Adecco Group en coordination avec LHH et le Groupe IGS, laisse apparaître un paysage du travail morcelé, loin des grands bouleversements annoncés. Interrogés sur les conséquences de la crise sanitaire sur leur situation de travail, les salariés émettent des avis très divergents. Si un actif sur trois considère que la crise n’a pas bouleversé sa situation de travail, plus de 65% des actifs affirment qu’elle a encore des impacts sur leur emploi, positifs ou négatifs. 40% des actifs jugent leur travail impacté négativement et que la crise pourrait les mener au burn-out. Les auteurs du rapport de l’observatoire en concluent qu’une telle diversité des vécus au travail rend plus difficile la tâche des acteurs sociaux: comment poser un diagnostic clair sur les conséquences de la crise sanitaire sur le travail, puisque ses effets semblent disparates à l’échelle des personnes plutôt qu’à celle des collectifs de travail?
Les données recueillies confirment que la progression du volume de transitions professionnelles ne faiblit pas. Un tiers des actifs en ont connu une en 2022. Par ailleurs, parmi ceux qui ont vécu plusieurs transitions professionnelles dans la même année, 34% déclarent déjà vouloir changer de profession dans l’année à venir. Ils sont 35% parmi ceux qui indiquent avoir vu leur situation de travail « profondément et négativement » touchée par les conséquences de l'épidémie de Covid-19.
Ces évolutions prennent-elles en compte les enjeux majeurs du moment, le digital et la transition écologique? Rien n’est moins sûr, puisque 24% seulement des actifs estiment que le digital va impacter leur emploi, soit 4 points de plus qu’en 2018, mais la prise de conscience paraît malgré tout limitée. L’impact de la transition écologique est encore plus diffus, puisque 17% seulement des actifs reconnaissent qu’elle impactera leur activité professionnelle. Pour les auteurs de la 5e édition de l’observatoire, il s’agit clairement d’une occasion manquée.
Ils en appellent logiquement à un renforcement des dispositifs d’accompagnement et d’orientation pour éclairer les actifs « en manque de projection professionnelle »: ils sont en effet 60% à ne pas avoir de vision claire de leur avenir professionnel sur les cinq années à venir. Certains points positifs méritent d’être relevés, comme la notoriété très élevée du CPF, désormais connu de 95% des actifs. Ils sont cependant à peine 20% à l’avoir mobilisé pour suivre une formation… Un bilan malgré tout bien plus reluisant que celui concernant le conseil en évolution professionnelle qui reste ignoré de près de 85%. Un dernier facteur devrait favoriser un renforcement des dispositifs d’accompagnement et d’orientation: la forte inquiétude que suscite le futur. Plus de quatre actifs sur dix se déclarent en effet « inquiets, voire très inquiets » des évolutions du monde du travail.