Pour le Forum des acteurs de la formation digitale (FFFOD), la période de confinement a révélé la méconnaissance des acteurs des mécanismes réglementaires et pédagogiques de la formation ouverte et à distance (FOAD), comme l’explique sa déléguée générale, Aurélia Bollé.
Quels enseignements le FFFOD a-t-il tirés des deux mois de confinement qui ont contraint les acteurs de la formation à s’adapter en urgence ?
Aurélia Bollé : Le confinement a eu le mérite de faire rentrer la formation à distance dans la cour des grands, même si ce fut à marche forcée. Beaucoup d’acteurs de la formation ont été amenés par la force des choses à devoir déployer des solutions distantielles pour assurer la continuité pédagogique de leur activité, souvent à la va-vite ou de façon improvisée. Pour autant, il s’est agi davantage de « téléformation » que de véritable formation à distance. À l’issue de la période de confinement, force est de constater que, malgré son introduction dans la loi « avenir professionnel », la FOAD demeure un dispositif largement méconnu. Les modalités du décret qui l’encadre – par exemple la nécessité de conserver un maximum de preuves de la réalisation de l’action de formation – restent encore ignorées de beaucoup d’acteurs. C’est pourquoi le FFFOD a commencé à engager une réflexion pour mieux faire connaître les dispositions qui entourent la FOAD et proposer de vraies solutions de formation multimodale.
Comment développer cette offre multimodale ?
A. B. : Les acteurs qui se sont lancés un peu à la va-vite pendant le confinement ont souvent été tentés de déployer une offre à partir des outils existants mais sans réelle ingénierie pédagogique derrière. Rien d’anormal là-dedans : il leur fallait alors faire face à l’urgence. D’ailleurs, le ministère du Travail, épaulé par un certain nombre de partenaires (Cnam, Openclassrooms, Gifod…), a mis en ligne un certain nombre d’outils d’enseignement à distance pour permettre aux professionnels de la formation de passer le cap du confinement. Mais aujourd’hui, ils ne peuvent plus faire l’économie d’une réingénierie pédagogique dès lors qu’ils souhaitent s’engager sur une offre distantielle ou multimodale. Il ne s’agit pas simplement de transposer des contenus présentiels en ligne, mais de s’assurer de la plus-value qu’ils apportent dans le cadre de la formation à distance.
Comment faire ?
A. B. : Leur réflexion doit partir des situations que connaissent les premiers concernés, à savoir les formateurs et les apprenants eux-mêmes. Il faut réfléchir à la professionnalisation des formateurs afin qu’ils puissent développer les compétences numériques nécessaires à la pédagogie distantielle, ainsi qu’à la manière dont ils peuvent accompagner les apprenants à distance. Cela paraît évident, durant le confinement, certains CFA ont été obligés d’adresser les cours par voie postale à leurs apprentis… puisque ceux-ci ne disposaient pas du matériel ou du temps nécessaire pour se connecter ! Cet accompagnement est indispensable. Placés en situation d’autoformation, certains apprenants peuvent se décourager très vite. Corollaire : il est urgent de travailler sur l’individualisation de la formation, même si la FOAD a souvent été vendue comme un moyen de massification de l’enseignement. Aujourd’hui, nous avons acquis la conviction qu’un parcours de formation réussi se travaille en amont afin de faire coller les objectifs d’apprentissage avec le profil visé. Ces réflexions se trouveront sans doute au cœur des prochaines rencontres annuelles que nous prévoyons d’organiser au mois de décembre 2020, si les conditions sanitaires le permettent.
Propos recueillis par Benjamin d’Alguerre