À l'occasion du Salon HyVolution, des 11 et 12 mai, l’Afpa et France Hydrogène ont signé un partenariat pour accompagner l'évolution des métiers et des compétences d’une filière majeure dans le cadre de la transition énergétique. Entretien avec Christophe Sadok, directeur de de l'ingénierie, de la formation et de la qualité de l’Afpa.
Comment ce partenariat entre l’Afpa et France Hydrogène s’est-il noué ?
Christophe Sadok : L’Afpa avait commencé le travail de R&D sur la filière hydrogène dès 2016 au vu du fort potentiel de développement énergétique de celle-ci et de son intérêt stratégique pour le pays. Nous avons commencé par un travail de veille et d’identification des quelque 200 entreprises que compte ce secteur afin d’établir une cartographie des projets d’implantation ou de développement au niveau des territoires. Après recensement des besoins en formation de la filière et de l’offre existante, il nous est très vite apparu qu’un nombre conséquent de qualifications dont les entreprises du secteur ont besoin ou auront besoin dans un avenir très proche n’existaient tout simplement pas. Nous avons alors décidé d’engager un travail commun avec la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) pour développer un programme d’incubateurs régionaux ("H2") regroupant entreprises, centres Afpa et acteurs territoriaux de l’emploi, chargés d’élaborer des parcours de formation adaptés aux métiers de la filière hydrogène en répondant aux besoins en qualification et connaissances nécessaires à la tenue de l'emploi.
Quels sont ces besoins ?
C. S. : Nous avons identifié 84 métiers dans le secteur dont un certain nombre sont déjà en tension parmi lesquels nous avons ciblé 17 métiers prioritaires. L’hydrogène fait partie des secteurs qui ont été identifiés dans le cadre de France Relance, notamment pour son intérêt dans le projet de décarbonation de notre industrie. 7 milliards d'euros ont d’ailleurs été débloqués pour la filière et 2 milliards sont déjà engagés en vue de son développement. Il existe par exemple un fort enjeu dans le monde du transport de marchandises autour de l’équipement des véhicules en moteurs à hydrogène. La filière a besoin d’ingénieurs à bac + 5, mais aussi de techniciens et d’ouvriers spécialisés à niveau de formation moindre. À l’Afpa, c’est surtout sur ces derniers profils que nous intervenons en matière de création de titres et de certifications, d’autant que c’est sur ces derniers que la tension est la plus forte. La plupart de ces métiers ne sont pas exclusifs à la filière, d’ailleurs. Par exemple, il existe un fort besoin de soudeurs dans les entreprises de l’hydrogène et les certifications ou titres professionnels correspondant à cette fonction existent déjà, mais ont besoin d’être renforcés par des modules de formation correspondant aux spécificités de la filière : on n’utilise pas un fer à souder dans un milieu hydrogène comme sur un chantier ordinaire. Sont également recherchés des profils de tuyauteurs, métalliers, monteurs-assembleurs, techniciens de maintenance, etc. À condition que leurs compétences soient adaptées aux besoins de la filière. Nous avons regroupé ces métiers en trois catégories d’emploi : opérateurs, techniciens de production et agents de maintenance.
Où allez-vous installer vos incubateurs ?
C. S. : Sur les treize régions administratives, douze sont concernées et les premières formations débuteront en octobre dans six d’entre elles. À la maintenance à Grenoble ou Châtellerault, Mulhouse, Metz ou Béziers, au travail des métaux à Saint-Nazaire, Pau ou Marseille (La Treille), à la soudure à Cherbourg… des formations à la production d’hydrogène se tiendront à Dunkerque, etc. Les candidats à ces formations seront des demandeurs d’emploi candidats à une montée en compétences ou à une reconversion professionnelle. C’est un enjeu RH important, non seulement parce que c’est un secteur stratégique en matière de production énergétique mais aussi parce qu’il pourrait créer entre 50 000 et 150 000 emplois à l’horizon 2030. Leur création est nécessaire car aujourd’hui, les entreprises se font concurrence pour attirer ces profils. Il y a un besoin impératif d’insérer de nouveaux entrants sur le marché du travail.