Si les chiffres de l’apprentissage dans l’artisanat enregistrent une forte croissance pour la période 2020-2021, les récentes décisions de restrictions budgétaires pour 2022-2023 laissent entrevoir des difficultés à venir.

Même dans l’artisanat, la forte poussée de l’apprentissage est tirée par l’enseignement supérieur. C’est ce que révèle le baromètre de rentrée CMA-Maaf publié le 5 septembre 2022. Avec 176 000 apprentis accueillis dans les entreprises artisanales de moins de vingt salariés en 2020-2021, le secteur a connu une hausse de 21 830 contrats d’apprentissage signés, soit un bond de 14 % par rapport aux années précédentes. Si le nombre général d’apprentis dans l’artisanat renoue avec les bons chiffres de 2010, la grande nouveauté transparaît au niveau des diplômes recherchés. Le BTS (bac + 2) a aujourd’hui le vent en poupe avec une progression de 69 % au détriment du CAP (- 5 %). "La croissance du nombre d’apprentis s’explique par la progression des inscriptions dans les diplômes de l’enseignement supérieur. En effet, si en 2019-2020, 11 % des apprentis inscrits en 1^re année l’étaient dans un diplôme de l’enseignement supérieur, cette part passe à 18 % pour l’année scolaire 2020-2021. Pris dans leur ensemble, le nombre total d’apprentis inscrits dans un diplôme de l’enseignement supérieur passe de 16 200 en 2019-2020 à 25 300 en 2020-2021", détaille le baromètre.

Les aspirations professionnelles des apprentis changent également. Si le bâtiment constitue encore la locomotive du recrutement des jeunes en apprentissage (67 730 apprentis en 2020-2021), les services (50 840) et la fabrication (15 630) connaissent de belles hausses, portées notamment par des métiers plus demandés qu’ils ne l’étaient hier. Les formations à la fabrication artisanale de véhicule de transport ont ainsi connu un boom de 122 %, celles de la fabrication artisanale de bières de 105 % et la fabrication de parfums de 99 %. Le nettoyage de bâtiments (+ 84 %), la fabrication d’articles en cuir (+ 80 %), de vêtements (+ 80 %), la construction de lignes électriques (+ 65 %), la conduite d’ambulances (+ 55 %), la télésurveillance (+ 48 %) et la réparation d’ordinateurs (+ 47 %) offrent ainsi de nouvelles perspectives susceptibles d’attirer les jeunes.

Des formations plus traditionnelles ont aussi bénéficié d’un net regain. C’est le cas des soins de beauté (+ 30 %), de la réparation automobile (+ 28 %), de l’aménagement paysager (+ 19 %) ou des travaux d’électricité (+ 16 %). D’autres activités voient également leurs effectifs gonfler : c’est le cas dans la maçonnerie générale (+ 12 %), la boulangerie-pâtisserie (+ 10 %), la plomberie (+ 8% ) ou la coiffure (+ 7 %).

Cependant, la situation pour 2022-2023 inquiète. Avec la décision gouvernementale de porter un coup de rabot sur les niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage, les filières s’inquiètent pour l’année à venir. Même si l’action des branches professionnelles et des têtes de réseau de l’apprentissage durant l’été auprès du cabinet d’Olivier Dussopt ont permis de limiter la casse (275 certifications "seulement" seront concernées par une baisse des coûts-contrats), le fait que certaines de ces réductions concernent des diplômes pour des métiers en tension et la perspective d’un second "rattrapage" en avril 2023, le monde des artisans n’est pas complément rassuré. "Il faut sortir d’une logique purement budgétaire, pour regarder ce que l’apprentissage produit comme effet positif en matière d’insertion dans l’emploi. Notre pays doit absolument continuer à accompagner fortement la formation par apprentissage. C’est un impératif pour répondre aux besoins de main-d’œuvre qualifiée de nos entreprises artisanales dans un contexte de forte tension pour de nombreux secteurs et métiers", rappelait Joël Fourny, président des Chambres des métiers de l’artisanat fin août dernier. À suivre, donc.