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Seniors : « Une main-d’œuvre abondante et en croissance » (J.-E. Roux, de Teepy Job)

Marché de l'emploi | publié le : 17.04.2024 | Propos recueillis par Gilmar Sequeira Martins

Jean-Emmanuel Roux

Jean-Emmanuel Roux, fondateur de Teepy Job, site spécialisé sur les profils « seniors », note un intérêt plus fort des entreprises, mais la persistance des préjugés entrave les recrutements.

Crédit photo DR

La crise sanitaire a-t-elle changé la donne à l’égard des seniors ? Jean-Emmanuel Roux, fondateur de Teepy Job, site spécialisé sur les profils « seniors », note un intérêt plus fort des entreprises, mais la persistance des préjugés entrave les recrutements.

À partir de quel âge est-on senior ?

Jean-Emmanuel Roux : À 50 ans, vous avez franchi la moitié d'un siècle, ce qui conduit souvent à être perçu comme entrant dans la catégorie des seniors par de nombreuses personnes. Toutefois, les seniors d’aujourd’hui ne sont plus ceux d’hier. Maintenant, les gens vivent plus vieux et à 50 ans, ils sont actifs, souhaitent rester autonomes et sont conscients qu’ils vont devoir travailler encore une quinzaine d'années avant de partir à la retraite. Ils sont donc très différents de leurs aînés.

Comment a évolué ce segment du marché de l’emploi ?

J.-E. Roux : Avant la crise sanitaire, de 2018 à mars 2020, nous travaillions essentiellement avec des secteurs d'activité sous tension : la restauration, le transport de personnes, le transport logistique, le BTP et les services à la personne. Après la crise sanitaire, tous les secteurs d’activité se sont mis à rechercher des seniors : les banques, les assurances, le commerce, la distribution et même l'industrie. Avec la fin du confinement, il y a une forte progression de la demande et le candidat est devenu le roi du marché en quelque sorte. Tous les secteurs d'activité se sont tournés vers Teepy Job, car nous offrons un service de sourcing complémentaire aux méthodes traditionnelles.

 


« Le quatrième complément de sourcing, ce sont les seniors, qui présentent deux grands avantages : ils sont nombreux
et il va y en avoir encore plus dans les vingt ans à venir.
 »


 

En quoi les seniors sont-ils des candidats intéressants ?

J.-E. Roux : Concrètement, il n’existe que quatre compléments de sourcing. Le premier, ce sont les migrants. Dans la grande majorité, il s’agit de main-d’œuvre non qualifiée. Le deuxième, ce sont les robots, mais seules certaines entreprises peuvent y recourir, comme Amazon. Le troisième complément de sourcing, les personnes déjà en emploi. L’entreprise va débaucher le profil qu’elle recherche chez son concurrent, mais c’est une méthode qui peut coûter très cher et qui comporte un risque. Si une personne a consenti à quitter son emploi pour rejoindre votre entreprise, elle pourrait également être approchée par une autre entreprise pour changer à nouveau d'emploi. Le quatrième complément de sourcing, ce sont les seniors, qui présentent deux grands avantages : ils sont nombreux et il va y en avoir encore plus dans les vingt ans à venir.

Ces avantages sont-ils perçus par les entreprises ?

J.-E. Roux : Si de plus en plus de secteurs commencent à se tourner vers les seniors, ce n’est pas le cas de la majorité des recruteurs, car il reste un gros problème en France sur l’emploi des seniors. Dans les années 1980 et 1990, les gouvernements ont mené des politiques pour procurer de l’emploi aux jeunes en mettant en place des dispositifs comme les préretraites, ce qui a incité de nombreux travailleurs seniors à sortir du marché du travail. Ensuite, la bulle Internet a encore terni la perception des seniors, qui étaient perçus comme incapables de maîtriser les nouvelles technologies, entre autres. Cela a entraîné une nouvelle vague de départs à la retraite parmi les seniors.

 


« Pour les seniors âgés de 60 à 64 ans, il subsiste un blocage côté entreprises.
Elles hésitent à recruter une personne
qui va rester au maximum deux à trois ans dans l’entreprise.
 »


 

Cette période n’est-elle pas révolue ?

J.-E. Roux : Les stigmates de cette période persistent et de nombreux préjugés demeurent tenaces. Bien qu'ils reculent quelque peu, les jeunes DRH ou les recruteurs hésitent toujours à embaucher des seniors. D’autant plus que l’entreprise qui recrute un jeune perçoit des aides, pas quand elle recrute un senior. Il y a également des préjugés du côté seniors. Certains ont subi tellement de revers qu'ils ont abandonné leurs recherches d'emploi. J’estime qu’un quart des seniors est dans une position de retrait par rapport à la recherche d’emploi. Mais je pense que cela va diminuer parce que les seniors d’aujourd’hui sont de plus en plus dynamiques. J’en veux pour preuve qu’un certain nombre de start-up sont aujourd'hui lancées par des seniors. C’est un signe de l’évolution actuelle.

N’y a-t-il pas un blocage pour les plus de 60 ans ?

J.-E. Roux : Pour les seniors âgés de 60 à 64 ans, il subsiste un blocage côté entreprises. Elles hésitent à recruter une personne qui va rester au maximum deux à trois ans dans l’entreprise. La solution est peut-être l’intérim. Nous proposons déjà aux entreprises des missions d’intérim qui permettent aux personnes âgées de 60 à 64 ans de travailler et contribuer ainsi à dissiper les réticences psychologiques des recruteurs.

Auteur

  • Propos recueillis par Gilmar Sequeira Martins