logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

500 000 chômeurs ne recourraient pas à l’assurance-chômage

Marché de l'emploi | publié le : 15.03.2022 | Benjamin d'Alguerre

assurance chômage

L’existence d’un rapport non publié par le Gouvernement sur le non-recours des demandeurs d’emploi à l’assurance-chômage suscite des tensions entre la CGT et le ministère du Travail. Plusieurs centaines de milliers de chômeurs seraient concernés.

C’est un rapport au contenu potentiellement explosif en période électorale. "Plusieurs centaines de milliers" - le chiffre de 500 000 est avancé par le député Insoumis François Ruffin - de demandeurs d’emploi ne feraient pas valoir tout ou partie de leurs droits à l’indemnisation chômage, soit par ignorance de ceux-ci, soit par réticence de Pôle emploi à les leur ouvrir. Pire, affirme le parlementaire LFI, ce rapport serait "bloqué" par Matignon et l’Elysée afin d’éviter qu’il ne soit transmis au Parlement à un mois de la présidentielle.

L’histoire débute en 2016 lorsque la CGT, administratrice de l’Unédic qui gère le régime d’assurance-chômage, demande au bureau de l’organisme une étude sur les raisons et la proportion du non-recours aux droits à l’indemnité chômage par les demandeurs d’emploi. "Il existe par exemple des dispositions prévoyant qu’en cas de décès d’un chômeur, son conjoint ou sa conjointe et leurs enfants puissent toucher une part de l’indemnité chômage du disparu. Or, Pôle emploi ne recherche jamais les ayant-droits pour les informer de ces droits", explique Denis Gravouil, membre du conseil d’administration de l’Unédic pour la CGT.

La commande de ce rapport a été introduite dans le projet de loi "Pour la liberté de choisir son avenir professionnel" du 5 septembre 2018 par un amendement du député communiste Pierre Dharréville qui s’est à l’occasion fait le relais de la sollicitation de la CGT. En 2018, un premier rapport parlementaire d’évaluation de la loi Pénicaud évoquait le report de ce travail d’évaluation au début de l’année 2022. Motif : "la complexification des règles d’éligibilité" à l’assurance-chômage générait du retard pour le recueil des données.

La question du rapport n’est revenue sur le tapis qu’à l’été 2021 lorsque la CGT a demandé ce qu’il en était à l’occasion de l’entrée en application du second volet de la réforme de l’assurance-chômage au mois de juin. "Le bureau de l’Unédic nous a alors appris que le rapport avait été réalisé par la Dares à la demande du ministère du Travail", indique Dens Gravouil. Depuis, plus de nouvelles… jusqu’à ce que François Ruffin ne demande des comptes au ministère du Travail début mars 2022. Dans une adresse directe à Élisabeth Borne, le député amiénois lance "après renseignements, nous pouvons affirmer que ce rapport existe, qu’il est finalisé, que vous et votre cabinet l’avez relu. Et pourtant, nous, députés, n’avons toujours rien reçu". Réponse du ministère via l’AFP : "Les premiers résultats nécessitent d’être approfondis car, d’une part ils font apparaître que le taux de non-recours serait inférieur à celui des rares études disponibles, ce qui pose des questions, et que d’autre part, ils n’expliquent pas les raisons de ce non-recours (questions de méconnaissance ou retrait volontaire du marché du travail ?)."

À la CGT, on s’impatiente. Et on soupçonne que la non-publication du rapport soit la conséquence d’une discrète intervention du patronat auprès du ministère du Travail. "Le Medef est très braqué sur cette question. Il n’a jamais favorisé les études sur le non-recours à l’assurance-chômage", glisse Denis Gravouil. "Pourtant, il faudra bien qu’il sorte. Il y a des rapports sur le non-recours au RSA ou aux allocations familiales, pourquoi pas sur l’assurance-chômage ?" Une question que le syndicat, soutenu par FO, a remise sur la table lors de la réunion du bureau de l’Unédic le 15 mars et qui devrait à nouveau être évoquée lors de la prochaine rencontre du conseil d’administration de Pôle emploi le 24 mars. Affaire à suivre.

Auteur

  • Benjamin d'Alguerre